CITE DU VATICAN, Vendredi 10 mai 2002 (ZENIT.org) – Voici la traduction de l´intervention du cardinal Alfonso Lopez Trujillo, président du Conseil Pontifical pour la Famille et chef de la délégation du Saint-Siège à la 27ème Session Spéciale de l’Assemblée Générale de l´ONU sur les Enfants, à New York, le 7 mai 2002 (cf. ZF020509) .
– Discours du cardinal Trujillo –
Monsieur le Président,
Le Saint-Siège se veut fidèle à l’amour pour les enfants, un amour empreint d’une prédilection et d’une affection particulières, dans la pleine reconnaissance et le respect qui leur sont dus: les enfants sont des dons merveilleux de Dieu.
Au long des siècles sont apparues, au sein des communautés chrétiennes, des institutions et des œuvres reconnues en faveur de l’enfance, offrant leurs services généreux dans les domaines les plus divers: la famille, l’éducation, la santé, avec une attention spéciale envers les plus pauvres et les plus démunis. La lutte contre la pauvreté qui frappe cruellement l’enfance, en faisant tant de victimes, est une exigence fondamentale.
Dans sa Lettre aux Enfants, écrite durant l’Année Internationale de la Famille (1994), le Pape Jean Paul II leur exprime sa sollicitude paternelle. Les enfants sont une source de joie et d’espérance pour leurs parents et pour la société, et sont aimés de Dieu en l’Enfant Jésus qui è venu à Bethléem comme un nouveau-né. Le Saint-Père dénonce les souffrances, les menaces et les atteintes dont les enfants sont victimes: «Ils endurent la faim et la misère, ils meurent de maladie et de malnutrition, ils sont victimes de la guerre, ils sont abandonnés par leurs parents et condamnés à rester sans foyer, privés de la chaleur de leur famille, ils subissent de nombreuses formes de violence et d’oppression de la part des adultes. Comment est-il possible de rester indifférent face à la souffrance de tant d’enfants, surtout quand, d’une manière ou d’une autre, elle est provoquée par les adultes?» (Lettre aux enfants). On ne peut pas rester indifférent, dit le Pape, face à la souffrance de tant d’enfants.
Mais à côté des multiples formes de violence déjà citées, d’autres sont en train de proliférer, avec des conséquences dramatiques. C’est le cas de la « pollution morale » de l’environnement qui, du point de vue spirituel, les empêche de respirer de l’air pur. Les familles et les États ne peuvent pas se soustraire aux exigences d’une «écologie humaine» (Cf. Centesimus annus, n. 30). Quand les valeurs morales sont impunément bafouées, quand l’atmosphère est chargée artificiellement d’érotisme et la sexualité humaine est banalisée et vidée de son sens au point à induire les enfants à des «styles de vie» et des comportements inqualifiables dans un climat de permissivité alarmant, alors les risques de violence se multiplient. C’est avec un grand retard, car les victimes sont déjà très nombreuses, qu’il semble que beaucoup commencent à réagir, à réviser leurs attitudes et à renforcer les normes législatives pour en éviter des conséquences dévastatrices.
En diverses occasions, le Conseil Pontifical pour la Famille a célébré des Congrès internationaux sur l’Enfance:
* La dignité de l’Enfant et ses droits (Rome, 18-20 juin 1992)
* L’exploitation sexuelle de l’Enfant dans la prostitution et la pornographie (Bangkok, 9- 11 septembre 1992
* La Famille et le travail des mineurs (Manille, 1-3 juillet 1993)
* Les Enfants de la rue (Rio de Janeiro, 27-29 juillet 1994)
* L’adoption internationale (Séville, 25-27 février 1994).
Plus récemment, à l’occasion du Grand Jubilé de l’an 2000, nous avons organisé un Congrès mondial intitulé: «Les enfants, printemps de la famille et de la societé» (Rome, 11-13 octobre 2000). En plus, le 5 juin de l’anné dernière, ici même aux Nations Unies, a eu lieu le Symposium sur «Les enfants dans les conflits armés: la responsabilité de chacun», organisé par la Mission Permanente d’Observation du Saint-Siège, en union avec le Bureau du Représentant du Secrétaire Général des Nations Unies pour les enfants en situation de conflit. Il serait trop long d’énumérer ici tous les Congrès, Rencontres et autres activités organisées par l’Église dans le monde entier.
La pleine reconnaissance de la dignité de l’enfant, de tous les enfants, images de Dieu, dès le premier moment de leur conception, semble s’être perdue et doit être retrouvé. La vraie mesure d’une société est la mesure avec laquelle elle reconnaît et protège cette dignité et les droits humains, et assure le bien-être de tous ses membres, et spécialement des enfants. Une société saine pourvue d’une physionomie vraiment humaine, en est une dans laquelle tous les individus reconnaissent la famille en tant que cellule de base de la société et principale pourvoyeuse et éducatrice de l’enfant, comme le proclame la Convention sur les droits de l’enfant (1989).
Il est très important d’observer le critère central mentionné à plusieurs occasions dans la même Convention par lequel «les meilleurs intérêts de l’enfant» doivent prévaloir. Ce critère illuminant ne doit pas être ignoré ou bafoué par des lois injustes. «Le bien supérieur de l’enfant» est un critère précieux qui prend racine dans sa dignité personnelle: l’enfant est une fin, et pas un instrument, un moyen, une chose (cf. Gaudium et Spes, n. 24); il est un sujet de droits, à commencer par le droit fondamental à la vie dès sa conception, un droit que rien ni personne ne peut lui contester, comme l’affirme le paragraphe 9 du préambule de la Convention.
Le processus de développement humain sous tous ses aspects, physique, émotionnel, spirituel, intellectuel et social, est le fruit d’une synergie entre famille et société. Leur collaboration efficace est le seul moyen de protéger l’enfant contre les injustices, abus et oppressions, pour qu’il soit à même de partager et de contribuer au bien commun de l’humanité. Réaliser ce développement est une grande entreprise, toujours en construction, qui révèle l’esprit véritable et l’état de santé des sociétés, et apporte des remèdes opportuns contre les injustices et les nécessités.
«Le bien supérieur de l’enfant» exige sa relation adéquate à la famille fondée sur le mariage, berceau et sanctuaire de la vie, lieu de la croissance personnelle, des affects, de la solidarité, lieu du droit et de la transmission intergénérationnelle de la culture. En étant au service des enfants, la communauté internationale doit s’engager à «défendre la valeur de la famille et le respect de la vie humaine à partir du moment de la conception. Telles sont les valeurs qui appartiennent à la grammaire de base du dialogue et de la coexistence humaine entre les peuples» (Discours de Jean Paul II à l’occasion du Jubilé des Familles, 14 octobre, 2000).
En conséquence, le Saint-Siège soutient que les Droits de l’Enfant doivent être reliés aux Droits de la Famille. En tant qu’institution fondamentale pour la vie de toute société, la famille fondée sur le mariage doit être entendue comme le pacte par lequel «un homme et une femme constituent entre eux une communauté de toute la vie, ordonnée par son caractère naturel au bien des conjoints ainsi qu’à la génération et à l’éducation des enfants» (Jean Paul II, Lettre aux Familles, Gratissimam sane, 1994, n. 17, cf. Code de Droit canonique, can. 1055; Saint-Siège, Charte des Droits de la Famille, 1983, art. 1-3); Déclaration universelle des droits de l’homme, art. 16).
L’enfant, tous les enfants, en toute situation et en toute circonstance, doivent être aimés, accueillis, protégés et éduqués avec une affection et un dévouement particuliers, et cela d’autant plus lorsqu’ils s
ouffrent de limitations ou difficultés pénibles et lourdes.
Tout le possible doit être fait pour qu’ils soient conçus, naissent, grandissent et soient formés dans une famille, capable d’offrir, de manière positive et permanente, une protection et un exemple, comme éléments irremplaçables de leur éducation.
L’enfant doit être considéré comme un membre de la famille, de telle sorte que leurs parents, ouverts au don de la vie dans le cadre d’une paternité et d’une maternité responsables bien comprises, s’acquittent de leurs devoirs incontournables en étant soutenus par la société, au lieu d’être entravés dans leur mission (cf. Charte des Droits de la Famille, art. 1,b et 3,c).
Ce n’est que lorsque la famille vient à manquer que la société et l’État doivent offrir ce qui est nécessaire à l’enfant privé de famille, si possible dans un milieu présentant des qualités familiales d’accueil, de dévouement, de respect et d’affection. «Tous les enfants, qu’ils soient nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent du même droit à la protection sociale, en vue du développement intégral de leur personne» (Charte des Droits de la Famille, art. 4, e).
Monsieur le Président,
Ma Délégation soutient qu’il faut obtenir une législation pour la protection de l’enfance qui mette les enfants à l’abri de toute forme d’exploitation et d’abus, comme dans les cas d’inceste et de pédophilie, ainsi que par le travail, l’esclavage, les crimes abominables de la prostitution et de la pornographie, par leur séquestration ou leur utilisation comme soldats, guérilleros, ou quand ils sont victimes de conflits armés ou des sanctions internationales ou unilatérales imposées sur certains pays. Tous ces fléaux sont un outrage et un scandale pour l’humanité. Toutes ces formes de violence ne doivent pas rester impunies.
Il faut veiller attentivement à ce que les adoptions, tant nationales qu’internationales, quand elles sont vraiment recommandées suivant le principe du «bien supérieur de l’enfant», soient faites par des couples mariés qui offrent de véritables garanties de stabilité, moralité, capacité d’accompagnement et exemplarité, de sorte que les enfants puissent être éduqués de façon appropriée et ne soient pas gênés dans leur développement ou, pire encore, détruits dans leur personnalité. L’intérêt de l’enfant exige, en vue de son développement intégral et harmonieux, qu’il ait un père et une mère, comme nous l’enseigne d’ailleurs la science.
Monsieur le Président,
Ma Délégation est convaincue que le bien supérieur de l’enfant n’est pas respecté lorsque, conditionnés par le mythe de la surpopulation – un mythe dont les données et les tendances démographiques les plus récentes montrent l’absence de fondement – on impose des politiques de population contraires aux droits de la famille et des enfants. Il faut avant tout que soit reconnu le droit fondamental à la vie.
Les enfants représentent une richesse et une espérance pour la famille humaine. C’est pourquoi la Délégation du Saint-Siège formule le vœu que cette Session spéciale de l’Assemblée Générale des Nations Unies donne des fruits abondants et féconds pour garantir que les enfants du monde entier soient «le printemps de la famille et de la société».