Imposition des cendres au pape François par le cardinal

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Carême : le « Père tendre et miséricordieux attend notre retour »

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Homélie de la messe du Mercredi des Cendres

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Pendant le Carême, Dieu, « Père tendre et miséricordieux », « nous désire, nous attend » et « attend notre retour », a affirmé le pape François dans son homélie de la messe du Mercredi des Cendres, premier jour du Carême. Et d’ajouter : « il nous encourage toujours à ne pas désespérer, même lorsque nous tombons dans la poussière de notre fragilité et de notre péché ».

Le pape François a célébré la messe du Mercredi des Cendres en la Basilique Sainte-Sabine, mercredi 22 février, au cours de laquelle a eu lieu le rite de l’imposition des cendres. Dans so homélie, il a commenté la parole du prophète Joël, « Revenez à moi de tout votre cœur », rappelant que le rite des cendres nous introduit sur un « chemin de retour » et nous adresse « deux invitations : revenir à la vérité sur nous-mêmes et revenir à Dieu et à nos frères ».

Le Carême est un temps « favorable » pour « changer de regard sur nous-mêmes » et « faire tomber les masques que nous portons », a souligné le pape. Un temps pour se rappeler que « sans Dieu, l’homme n’est rien ». Avec lui, « nous renaîtrons de nos cendres, mais sans Lui nous sommes poussière ». Un temps pour découvrir que « la vie est relation » : « relation originelle avec le Seigneur » et « relations vitales avec les autres ».

Pour vivre ce temps, François a rappelé les « trois grandes voies », qui ne sont pas des « rites extérieurs », mais des « gestes » exprimant « un renouvellement du cœur » : l’aumône, pour « toucher de ses mains et de ses larmes la souffrance des pauvres », la prière, « dialogue de vérité et d’amour avec le Père », et le jeûne, « un geste fort pour rappeler à notre cœur ce qui compte et ce qui passe ».

 

Homélie du pape François

« Voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut ! » (2 Co 6, 2). Cette expression de l’apôtre Paul nous aide à entrer dans l’esprit du temps du Carême. En effet, le Carême est le temps favorable pour revenir à l’essentiel, pour nous dépouiller de ce qui nous encombre, pour nous réconcilier avec Dieu, pour rallumer le feu de l’Esprit Saint qui demeure caché dans les cendres de notre fragile humanité. Revenir à l’essentiel. C’est le temps de grâce pour mettre en pratique ce que le Seigneur nous a demandé dans le premier verset de la Parole que nous venons d’écouter : « Revenez à moi de tout votre cœur » (Jl 2, 12). Revenir à l’essentiel qui est le Seigneur.

Le rite des cendres nous introduit sur ce chemin de retour et nous adresse deux invitations : revenir à la vérité sur nous-mêmes et revenir à Dieu et à nos frères.

Tout d’abord, revenir à la vérité sur nous-mêmes. Les cendres nous rappellent qui nous sommes et d’où nous venons, elles nous ramènent à la vérité fondamentale de la vie : seul le Seigneur est Dieu et nous sommes l’œuvre de ses mains. C’est notre vérité. Nous avons la vie tandis que lui, il est la vie. C’est lui le Créateur, tandis que nous sommes de l’argile fragile, modelée par ses mains. Nous venons de la terre et avons besoin du Ciel, de lui ; avec Dieu nous renaîtrons de nos cendres, mais sans Lui nous sommes poussière. Lorsque nous inclinons humblement la tête pour recevoir les cendres, ayons donc à cœur cette vérité : nous sommes au Seigneur, nous lui appartenons. En effet, il « modela l’homme avec la poussière tirée du sol ; il insuffla dans ses narines le souffle de vie » (Gn 2, 7) : nous existons parce qu’il a insufflé en nous le souffle de vie. Et, en tant que Père tendre et miséricordieux, il vit aussi le Carême, parce qu’il nous désire, nous attend, il attend notre retour. Et il nous encourage toujours à ne pas désespérer, même lorsque nous tombons dans la poussière de notre fragilité et de notre péché, car « il sait de quoi nous sommes pétris, il se souvient que nous sommes poussière » (Ps 103, 14). Réécoutons ceci : il se souvient que nous sommes poussière. Dieu le sait ; mais nous, nous l’oublions souvent, pensant que nous sommes autosuffisants, forts, invincibles sans lui ; nous nous maquillons pour nous croire meilleurs que ce que nous sommes : nous sommes poussière.

Le Carême est donc le temps de nous rappeler qui est le Créateur et qui est la créature, de proclamer que Dieu seul est Seigneur, de nous dépouiller de notre prétention à nous suffire à nous-mêmes et de notre frénésie à nous mettre au centre, à être les premiers de la classe, à penser qu’avec nos seules capacités nous pouvons être les protagonistes de notre vie et transformer le monde qui nous entoure. C’est le temps favorable pour nous convertir, pour changer de regard avant tout sur nous-mêmes, pour regarder à l’intérieur de nous-mêmes : combien de distractions et de superficialités nous détournent de ce qui compte, combien de fois nous nous concentrons sur nos envies ou sur ce qui nous manque, nous éloignant du centre de notre cœur, oubliant d’embrasser le sens de notre être dans le monde. Le Carême est un temps de vérité pour faire tomber les masques que nous portons chaque jour pour paraître parfaits aux yeux du monde ; pour lutter, comme Jésus nous l’a dit dans l’Évangile, contre le mensonge et l’hypocrisie : pas ceux des autres, les nôtres : les regarder en face et lutter.

Il y a cependant une deuxième étape : les cendres nous invitent également à revenir à Dieu et à nos frères. En effet, si nous revenons à la vérité de ce que nous sommes et que nous nous rendons compte que notre moi ne se suffit pas à lui-même, nous découvrons alors que nous n’existons qu’à travers les relations : la relation originelle avec le Seigneur et les relations vitales avec les autres. Ainsi, les cendres que nous recevons aujourd’hui sur nos têtes nous disent que toute présomption d’autosuffisance est fausse et que l’idolâtrie du moi est destructrice et nous enferme dans la prison de la solitude : se regarder dans le miroir en imaginant être parfait, en imaginant être au centre du monde. Notre vie, en revanche, est avant tout une relation : nous l’avons reçue de Dieu et de nos parents, et nous pouvons toujours la renouveler et la régénérer grâce au Seigneur et à ceux qu’il place à nos côtés. Le Carême est le temps favorable pour revitaliser nos relations avec Dieu et avec les autres : pour nous ouvrir dans le silence à la prière et sortir de la forteresse de notre ego fermé, pour briser les chaînes de l’individualisme et de l’isolement, redécouvrir, à travers la rencontre et l’écoute, ceux qui marchent chaque jour à nos côtés, et réapprendre à les aimer comme des frères ou sœurs.

Frères et sœurs, comment réaliser tout cela ? Pour accomplir ce parcours – pour revenir à la vérité sur nous-mêmes, pour revenir à Dieu et aux autres – nous sommes invités à parcourir trois grandes voies : l’aumône, la prière et le jeûne. Ce sont les voies classiques : il ne faut pas de nouveautés sur cette route. Jésus l’a dit, c’est clair : l’aumône, la prière et le jeûne. Il ne s’agit pas de rites extérieurs, mais de gestes qui doivent exprimer un renouvellement du cœur. L’aumône n’est pas un geste rapide pour se donner bonne conscience, pour équilibrer un peu le déséquilibre intérieur, mais c’est le fait de toucher de ses mains et de ses larmes la souffrance des pauvres ; la prière n’est pas un rituel, mais un dialogue de vérité et d’amour avec le Père ; et le jeûne n’est pas un simple renoncement, mais un geste fort pour rappeler à notre cœur ce qui compte et ce qui passe. La mise en garde de Jésus est un « avertissement qui conserve sa valeur salutaire également pour nous : aux gestes extérieurs doit toujours correspondre la sincérité de l’âme et la cohérence des œuvres. À quoi sert en effet – se demande l’auteur inspiré – de déchirer ses vêtements, si le cœur demeure éloigné du Seigneur, c’est-à-dire du bien et de la justice ? » (Benoît XVI, Homélie Mercredi des Cendres, 1er mars 2006). Pourtant, trop souvent nos gestes et nos rituels ne touchent pas la vie, ils ne sont pas vrais ; peut-être les accomplissons-nous uniquement pour être admirés des autres, pour être applaudis, pour nous attribuer des mérites. Rappelons-nous ceci : dans la vie personnelle, comme dans la vie de l’Église, les apparences, les jugements humains et l’estime du monde ne comptent pas ; seul compte le regard de Dieu qui y lit l’amour et la vérité.

Si nous nous mettons humblement sous son regard, alors l’aumône, la prière et le jeûne ne restent pas des gestes extérieurs, mais expriment ce que nous sommes vraiment : des enfants de Dieu et des frères entre nous. L’aumône, c’est-à-dire la charité, manifestera notre compassion envers ceux qui sont dans le besoin, nous aidera à revenir vers les autres ; la prière donnera voix à notre désir intime de rencontrer le Père, en nous faisant revenir vers lui ; le jeûne sera le gymnase spirituel pour renoncer joyeusement à ce qui est superflu et qui nous encombre, pour devenir intérieurement plus libres et revenir à la vérité sur nous-mêmes. Rencontre avec le Père, liberté intérieure, compassion.

Chers frères et sœurs, inclinons la tête, recevons les cendres, rendons notre cœur léger. Mettons-nous en route dans la charité : quarante jours favorables nous sont donnés pour nous rappeler que le monde ne doit pas être enfermé dans les limites étroites de nos besoins personnels, et pour redécouvrir la joie non pas dans les choses à accumuler, mais dans l’attention aux personnes qui sont dans le besoin et dans l’affliction. Mettons-nous en route dans la prière : quarante jours favorables nous sont donnés pour rendre à Dieu la primauté dans nos vies, pour nous remettre à dialoguer avec lui de tout notre cœur, et non occasionnellement. Mettons-nous en route dans le jeûne : quarante jours favorables nous sont donnés pour nous retrouver, pour limiter la dictature de nos agendas toujours pleins de choses à faire, des prétentions d’un ego toujours plus superficiel et encombrant, et choisir ce qui compte.

Frères et sœurs, ne perdons pas la grâce de ce temps saint : fixons le Crucifié et marchons, répondons avec générosité aux appels forts du Carême. Au bout du chemin, nous rencontrerons avec une plus grande joie le Seigneur de la vie, nous le rencontrerons, le seul qui nous fera renaître de nos cendres.

© Traduction de Zenit, à partir de celle de la Libreria Editrice Vaticana

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Hélène Ginabat

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