Un organisme panamazonien épiscopal et permanent : c’est ce qu’on souhaité les 180 Pères synodaux présents à la onzième congrégation générale du synode des évêques pour l’Amazonie, sous la présidence du pape François ce 15 2019. Voici la synthèse officielle des interventions, rédigée par Vatican News.
Créer d’urgence un organisme épiscopal permanent et représentatif, coordonné par le Repam (Réseau ecclésial panamazonien), pour promouvoir la synodalité en Amazonie : c’est l’une des suggestions émises lors de la 11e Congrégation générale du synode spécial pour l’Amazonie. Cet organisme, intégré au CELAM (Conseil épiscopal latino-américain), devra aider à façonner la physionomie de l’Église en Amazonie, en vue d’une pastorale commune plus efficace, en donnant une forme concrète aux indications que le Pape François donnera après le synode et en travaillant pour la défense des droits des peuples indigènes, la formation intégrale des agents pastoraux et la création de séminaires amazoniens. Cette action pastorale commune, élaborée par toutes les circonscriptions ecclésiastiques d’Amazonie en relation étroite avec le CELAM, sera utile pour faire face aux problèmes communs, tels que l’exploitation du territoire, la délinquance, le trafic de drogue, le traite humaine et la prostitution.
Un observatoire des droits de l’homme et de la protection de l’Amazonie
La salle du Synode s’est ensuite penché sur les peuples indigènes, en se concentrant sur les problèmes posés par la colonisation, les migrations internes et la promotion des modèles économiques prédateurs et colonialistes, souvent mortifères. Ces modèles conduisent d’ailleurs à l’expropriation et à l’expulsion des communautés de leurs territoires, et celles-ci se voient contraintes d’émigrer. Au contraire, les peuples autochtones en mobilité doivent être compris dans leur spécificité à travers une pastorale particulière, afin que leurs droits humains et environnementaux soient toujours garantis, en particulier le droit d’être consultés et informés avant toute action sur leurs territoires respectifs. A cette fin, la création d’un observatoire permanent des droits de l’homme et de la protection de l’Amazonie a été proposé. Le cri de la terre et des peuples amazoniens doit être entendu, en donnant la parole avant tout aux jeunes, car il s’agit d’une question de justice intergénérationnelle.
Inculturation et éducation
La question de l’inculturation est aussi centrale; pour l’Église, elle est une façon d’être qui l’ouvre à de nouvelles voies dans la riche diversité des cultures amazoniennes, pour en faire une Église plus disciple et sœur dans une attitude d’écoute, de service, de solidarité, de respect, de justice et de réconciliation. Lié au thème de l’inculturation, celui de l’éducation des peuples indigènes amazoniens ; une éducation malheureusement caractérisée par une piètre qualité. Que peut donc faire l’Église, qui est l’une des institutions les plus qualifiées et les plus compétentes dans le domaine de la formation ? On a suggéré une plus grande collaboration avec d’autres organismes afin d’offrir des services de meilleure qualité aux peuples indigènes : par exemple, les universités catholiques pourraient élaborer des stratégies solidaires pour soutenir économiquement les universités autochtones, comme Nopoki, au Pérou, afin que le droit à l’identité culturelle soit protégé et que la sagesse ancestrale des peuples amazoniens d’origine soit préservée, au nom du dialogue et des échanges culturels, de la sensibilité, des langues et des visions.
L’engagement missionnaire et le témoignage des martyrs
Les pères synodaux ont ensuite réfléchi sur la violence : l’Amazonie est comparable à une femme violée dont le cri doit être entendu, a-t-on insisté dans la salle, car c’est la seule façon de réveiller l’évangélisation. En effet, l’annonce effective de l’Évangile ne se fait qu’au contact de la douleur du monde qui attend d’être rachetée par l’amour du Christ, grâce à une théologie de la vie. L’on s’est référé en cela à l’exemple précieux des missionnaires martyrs de la région, comme Monseigneur Alejandro Labaka, la religieuse tertiaire capucine Inés Arango, ou encore sœur Dorothy Stang, qui ont donné leur vie au nom de la cause des peuples amazoniens sans défense et pour la protection du territoire. Le travail missionnaire en Amazonie doit être davantage soutenu, a-t-on encore souligné, et c’est pourquoi nous réfléchissons à la création d’un fonds financier, national et international, pour renforcer la mission dans la région, surtout pour les frais de transport et de formation des missionnaires eux-mêmes.
Le défi œcuménique
Sans oublier que l’engagement missionnaire doit aussi se faire dans une perspective œcuménique, car une Église missionnaire est aussi une Église œcuménique. Ce défi concerne aussi l’Amazonie : loin de toute forme de prosélytisme ou de colonialisme intra-chrétien, l’évangélisation chrétienne est la libre invitation, adressée à la liberté des autres, à entrer en communication et à engager un dialogue vivifiant. Une évangélisation attrayante sera donc la preuve d’un œcuménisme crédible. Un autre point de réflexion est offert par la musique, un langage commun compréhensible par tous qui conduit à la réflexion sur la communication de la foi : il ne doit pas nier la doctrine, ont expliqué les pères synodaux, mais doit la faire comprendre par la sensibilité humaine. De cette façon, la Bonne Nouvelle sera attrayante pour tous, en allant vers cette renaissance du sacré qui se vit même dans les régions les plus sauvages de l’Amazonie.
La réponse de l’Eucharistie
Face aux situations difficiles vécues en Amazonie, d’importantes réponses viennent donc de l’Eucharistie, canal de la grâce de Dieu, et par des ministères variés qui commencent aussi à partir des femmes, protagonistes incontestées de la transmission du sens radical de la vie. Certains conseillent donc de repenser le ministère. Beaucoup de communautés, en effet, ont du mal à célébrer l’Eucharistie en raison du manque de prêtres : on suggère de modifier les critères de sélection et de préparation des ministres autorisés à administrer ce sacrement, afin qu’il ne soit pas destiné à quelques-uns seulement.
Le ministère féminin, l’exemple de l’Antiquité
Les pères synodaux affirment encore qu’il faut trouver de nouveaux chemins vers les traditions anciennes. Certaines interventions ont rappelé des pratiques en cours dans l’antiquité, notamment celle des ministères liés aux femmes, et ont invité à la réflexion sur la possibilité d’instaurer des ministères similaires, en particulier pour les fonctions de lecteur et d’acolyte. Un intervenant s’est attardé sur la faculté de renoncer au célibat, afin de pouvoir ordonner des hommes mariés qui, sous l’égide d’un prêtre responsable, puissent exercer dans des communautés ecclésiales dispersées. Dans le même temps, il est suggéré de créer un fonds pour financer la formation des laïcs dans les domaines biblique, théologique et pastoral, afin qu’ils puissent contribuer toujours mieux à l’action évangélisatrice de l’Église. Enfin, dans ce contexte, on rappelle aussi l’importance des communautés ecclésiales de base et de la vie consacrée, qui est prophétie et envoi aux frontières du monde.
Ouverture du Synode sur l'Amazonie, 6 octobre 2019 © Vatican Media
Synode pour l’Amazonie: synthèse officielle de la 11ème Congrégation générale
Le besoin d’un organisme panamazonien épiscopal et permanent