Signature de la Déclaration de Lesbos, 14 avril 2016, capture CTV

Signature de la Déclaration de Lesbos, 14 avril 2016, capture CTV

«Qui aime Dieu aime l’humanité et prend soin de la création»: lettre du patriarche Bartholomaios Ier

Au pape François pour la fête des apôtres Pierre et Paul (traduction complète)

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« Qui aime Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de toute sa force aime aussi l’humanité et prend soin de la création de Dieu comme la maison bénie de l’humanité », souligne le patriarche Bartholomaios Ier.
Une lettre du patriarche œcuménique de Constantinople a été remise au pape François, mardi 28 juin, au cours de l’audience accordée à la délégation du Phanar venue à Rome, selon la tradition, pour la fête des apôtres Pierre et Paul. Elle était conduite par le métropolite Methodios de Boston.
Le patriarche – parfois appelé le « patriarche vert » – y insiste notamment sur l’action commune des chrétiens pour la sauvegarde de la Création : « Nous exprimons notre joie et notre satisfaction pour l’appréciation ample qu’a suscitée votre encyclique Laudato si’, qui a délicatement fait référence aux initiatives écologiques du patriarcat œcuménique ainsi qu’à l’accent que nous mettons sur les racines spirituelles et morales de la crise écologique avec le besoin de repentance, d’une conversion radicale de l’attitude et de la conduite, nécessaires à sa résolution. »
Il souligne les conséquences sociales du mépris de la création épinglées par l’encyclique du pape François: « Laudato si’ a aussi démontré les dimensions et conséquences sociales du problème écologique. Qui aime Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de toute sa force aime aussi l’humanité et prend soin de la création de Dieu comme la maison bénie de l’humanité. Le double « grand commandement » de l’amour, sur lequel « reposent toute la loi et les prophètes » embrasse aussi le souci de la création. »
Evoquant le voyage à Lesbos (Grèce), le 14 avril 2016, auprès des réfugiés, avec le métropolite Hiéronyme d’Athènes, il appelle de ses vœux l’engagement commun des chrétiens face aux défis actuels : « Nous sommes convaincus que nos efforts et initiatives communs pour affronter aux défis mondiaux de notre époque se poursuivront parce qu’ils constituent un bon témoignage rendu à l’Église du Christ, servant l’humanité et le monde, tout en manifestant et renforçant notre responsabilité spirituelle face aux défis de notre temps au profit du monde chrétien et de l’humanité tout entière. »
Voici notre traduction intégrale de cette lettre, d’après le texte en anglais (original en grec).
A.B.
Lettre du patriarche Bartholomaios Ier
À Sa Sainteté le pape François de l’Antique Rome : Réjouissez-vous dans le Seigneur.
En célébrant avec vous la mémoire vénérable du chef des apôtres Pierre, et de l’apôtre des Gentils, Paul, qui furent martyrisés dans votre Siège et grandement honorés tant par l’Antique que par la Nouvelle Rome, nous adhérons à cette tradition bénie qui consiste à échanger des visites officielles à travers des délégations de nos Églises à l’occasion de nos fêtes du Trône respectives. C’est pourquoi, nous nous adressons fraternellement à vous par un joyeux salut, embrassant Votre Sainteté d’un saint baiser et priant pour que le Seigneur de gloire vous fortifie pour le bien de l’Église et l’unité des chrétiens ainsi que pour le bénéfice d’une humanité si troublée.
Nous nous souvenons avec des sentiments chaleureux et une profonde gratitude de notre récente rencontre sur l’île bénie de Lesbos afin d’apporter notre soutien aux réfugiés et aux migrants, en les encourageant et en leur offrant de l’espérance, mais aussi pour affirmer dans une déclaration conjointe avec Sa Béatitude Hiéronyme d’Athènes et de toute la Grèce le besoin d’assurer une résolution paisible à la plus grande crise humanitaire depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, qui a fait d’innombrables victimes, parmi lesquelles aussi des populations chrétiennes nées en l’Orient. Nos Églises entendent le cri de « ceux qui peinent et qui ploient sous le fardeau » (Mt 11,28), victimes de la violence et du fanatisme, de la discrimination et de la persécution, de l’injustice sociale, de la pauvreté et de la faim ; et nous mettons avec audace la lampe « sur le lampadaire » (Mt 5,15) devant ce tragique rejet du respect pour le caractère sacré de la personne humaine.
La crise contemporaine des réfugiés et des migrants a démontré le besoin pour les nations européennes d’affronter ce problème sur la base des vieux principes chrétiens de fraternité et de justice sociale. Nous reconnaissons que la civilisation européenne ne peut pas être comprise sans référence à ses racines chrétiennes et que son avenir ne peut pas être une société entièrement sécularisée ou soumise à l’économisme et à différentes formes de fondamentalisme. La « culture de la solidarité » nourrie par le christianisme n’est pas préservée par les progrès des standards de vie, l’internet et la mondialisation.
Personne n’honore l’humanité créée à l’image et à la ressemblance de Dieu autant que l’Église du Christ, qui nous a été révélé comme étant Dieu « avec nous » (Mt 1,23) et comme Dieu « pour nous » (Rm 8,32). C’est pourquoi la parole de l’Église est, et restera pour les âges, une intervention pour le bien de l’humanité et de sa liberté divinement offerte. La vie dans l’Église incorpore, avec la Sainte Eucharistie, la splendide adoration et la vie de prière, le combat ascétique et intérieur contre les passions, ainsi que la résistance contre le mal social et le combat pour que prévalent la justice et la paix.
Nous sommes convaincus que nos efforts et initiatives communs pour affronter aux défis mondiaux de notre époque se poursuivront parce qu’ils constituent un bon témoignage rendu à l’Église du Christ, servant l’humanité et le monde, tout en manifestant et renforçant notre responsabilité spirituelle face aux défis de notre temps au profit du monde chrétien et de l’humanité tout entière.
Nous exprimons notre joie et notre satisfaction pour l’appréciation ample qu’a suscitée votre encyclique Laudato si’, qui a délicatement fait référence aux initiatives écologiques du patriarcat œcuménique ainsi qu’à l’accent que nous mettons sur les racines spirituelles et morales de la crise écologique avec le besoin de repentance, d’une conversion radicale de l’attitude et de la conduite, nécessaires à sa résolution. Elle a aussi démontrée les dimensions et conséquences sociales du problème écologique. Qui aime Dieu de tout son cœur, de toute son âme et de toute sa force (cf. Mc 12,30) aime aussi l’humanité et prend soin de la création de Dieu comme la maison bénie de l’humanité. Le double « grand commandement » de l’amour, sur lequel « reposent toute la loi et les prophètes » (cf. Mt 22,37, 40-41) embrasse aussi le souci de la création.
Votre Sainteté et cher Frère, nous avons été bénis en tant que gardiens de traditions inestimables d’amour divin et de charité humaine, héritiers aussi de vérités vitales se rapportant aux êtres humains en tant que citoyens du monde et citoyens du ciel, que nous sommes obligées de préserver dans leur intégrité, restant fidèles au Seigneur qui « est venu non pour être servi, mais pour servir » (Mt 20,28) ainsi qu’aux vénérables fondateurs des Églises de Rome et de Constantinople, les frères Pierre et André, qui ont marqué de leur sceau leur témoignage rendu à Sa vérité sur la croix d’une manière digne du Christ. Nos efforts sont nourris par cette source inépuisable pour le progrès de notre cheminement  vers l’unité désirée de nos Églises. Le dialogue qui se poursuit entre l’Église orthodoxe et la très sainte Église de Rome est un domaine qui produit une connaissance théologique, une expérience œcuménique et un enrichissement mutuel. Les textes de ce dialogue de vérité confirment nos modèles chrétiens communs et expriment notre foi dans le fait que la Vérité de l’Église est une personne – à savoir la Parole de Dieu incarnée, souffrante et ressuscitée. Le dialogue « en vérité » implique de « vivre selon la vérité et dans la charité » (cf. Ep 4,15), « demeurant » dans l’amour (cf. Jn 15,9) en lequel « se noue la perfection » (Col 3,14).
Ces sentiments et mes vœux et félicitations fraternels à l’occasion de la fête glorieuse de l’Église de Rome seront apportés et exprimés à Votre Sainteté en personne par notre délégation patriarcale conduite par Son Éminence le métropolite Methodios de Boston, accompagné de Son Excellence l’archevêque Job de Telmessos et du Très révérend diacre patriarcal Nephon Tsimalis.
Étant parvenus, avec la bonne volonté du Dieu bienfaisant, au Saint et Grand Concile de l’Église orthodoxe, nous demandons à Votre Sainteté de prier pour la récolte fructueuse de ses délibérations dans le Saint Esprit pour la gloire de la divinité trine et indivise, et nous vous assurons de notre amour profond et de notre estime particulière dans le Seigneur.
29 juin 2016
De votre vénérable Sainteté,
le frère bien-aimé dans le Christ
© Traduction de Zenit, Constance Roques
 

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Constance Roques

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