« Le pont qui fait la différence » évoque avec pudeur et poésie la tragédie d’une vie brisée par les abus sexuels sur un mineur et qui un jour, sur ce pont, s’ouvre à nouveau à l’espérance. Il appelle à entendre le cri des victimes désespérées de ne pouvoir parler à personne de leur secret.
Ce témoignage, pré-enregistré, venu d’Asie, a été écouté lors de la prière de ce vendredi soir, 22 février 2019, lors de l’assemblée des évêques pour la protection des mineurs dans l’Eglise (21-24 février).
Lors des sessions du matin et du soir, comme avant la rencontre, le 20 février, la parole est donnée à des victimes de tous les continents: l’écoute est le ressort qui permet ensuite d’agir efficacement en vue et de la prévention des abus et de la guérison des victimes.
AB
Le pont qui fait la différence
Un petit garçon est arrivé
Dans un monde tout neuf ;
C’était un défi
Comme pour tout nouveau-né.
Qui pouvait penser que ce monde
Lui apporterait des surprises et des dangers impensables.
La recherche d’une bonne formation catholique
L’a fait quitter
Un environnement heureux et sain.
C’était une juste cause,
Et donc, avec tristesse, il dit adieu
A tout ce qu’il connaissait :
Parents, frères et soeurs, amour, sollicitude,
Protection et tout.
À seulement cinq ans,
Vers un monde inconnu,
Plein d’innocence et de craintes,
Il entra dans des espaces nouveaux.
Son chez lui lui manquait,
Il chercha ainsi parmi ses amis
Et ses gardiens des parents.
Elle fut fatale cette substitution
Car leurs désirs étaient étranges
Pour lui qui était neuf.
Son innocence arrachée
Encore et encore,
Laissé à se débrouiller tout seul
Dans ce monde d’adultes,
Il ne trouva pas d’espérance
Et devint un reclus.
Cela le mit à l’écart,
Au fil des années.
Mais il n’avait personne à qui parler,
Par peur de la disgrâce et de la honte.
En en apprenant plus sur les “valeurs chrétiennes”
Il se retira du monde
Dans la sécurité de rester tranquillement caché intérieurement;
Car le secret était sa seule issue.
Souvent il se posa la question :
Qu’était ce monde ?
Il n’avait ps sens et ne lui donnait pas d’espérance.
Un jour, il contempla du haut d’un pont
Et il se demanda :
« Comment cette descente changerait-elle,
Changerait-elle l’ordre des choses ? »
Il n’y eut jamais de réponse.
Qui saura jamais
Ce qu’il a traversé ?
Qui le demandera ?
Qui assumera la responsabilité
De cette vie apparemment perdue ?
Pas une chose dans sa vie
N’était restée intacte.
Elle était toute maculée.
Dieu était-il là ?
Car il serait le seul
A tout savoir.
C’est le pont qu’il contemplait
Qui lui montra un chemin,
Un chemin différent
Qui se concrétisa, quand,
Etrangement, il entendit dans son cœur bruyant, troublé,
Une voix qui l’appelait à un changement.
Il entreprit un voyage
Pour réaliser ce que la voix avait dit.
Un voyage de pardon,
Un voyage de réconciliation,
Un voyage pour accepter cette vie,
Une vie pleine de blessures, de chagrin et de désespoir.
Ce nouveau chemin depuis le pont
Fut long et difficile.
Il toucha à l’essence même de sa vie.
Mais, il y avait un chemin, différent.
Un chemin qui guérit, une guérison qui prend du temps.
Cela attendrit son coeur endurci
Et transforma sa vie.
Cela brisa la coquille dans laquelle il vivait, pour marcher librement
Et dire au monde : « Il y a un chemin ».
Voilà son histoire.
Mais maintenant, qui va assumer la responsabilité
Des vies brisées ?
Il y a un chemin !
Il y a une possibilité !
Il y a l’espérance !
Il y a la vie !
Ramenez ce qui est perdu !
Montrez que vous vous en souciez!
Car tout ce que vous ferez
Sauvera les nombreux cris silencieux
Qui attendent un jour sauveur.
Traduction de l’anglais
Pont de Beipanjiang (Chine) @ wikimedia commons / Eric Sakowski 2003
Protection des mineurs/témoignage d'Asie: "Le pont qui fait la différence"
« Montrez que vous vous en souciez! »