Mgr Bruno Forte @ wikimedia commons / Medan / 2006

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Journée œcuménique de Bari : Un signe éloquent de la communion possible, par Mgr Bruno Forte

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La catholicité ne peut se passer du patrimoine de foi et de pensée des Églises d’Orient

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La Journée œcuménique de Bari du 7 juillet 2018, affirme Mgr Bruno Forte, « a dit au monde que le chemin de l’unité avance et que ce qui semblait jusqu’hier impossible est en train de devenir réalité sous l’action de l’Esprit et dans l’engagement commun au service de la paix, de la justice et de la sauvegarde de la création. » Elle a été, explique-t-il, « un signe éloquent » de la « communion possible autour du ministère de l’évêque de Rome »
Mgr Bruno Forte, archevêque de Chieti-Vasto, revient sur la signification de la Journée œcuménique de Bari dans un article intitulé « L’union des Églises pour la paix » paru dans le quotidien italien « Il Sole 24 Ore » du dimanche 22 juillet 2018.
Pour l’archevêque italien, cette rencontre a affirmé implicitement que « le christianisme ne s’identifie pas avec l’Occident et que la catholicité ne peut pas se passer du patrimoine de foi et de pensée qui a été mûri par les Églises d’Orient ». Elle a montré, en outre, que « la foi des chrétiens n’est pas un spiritualisme désincarné, mais la clé pour lire les événements de l’histoire et y intervenir avec des jugements et des actes inspirés de l’Évangile pour la paix et la vie de tous ».
Voici notre traduction de l’article de Mgr Bruno Forte.
HG
L’union des Églises pour la paix
La journée oecuménique du 7 juillet dernier à Bari a été voulue par le pape François dans l’intention d’unir dans la prière pour la paix au Moyen-Orient, et aussi dans le dialogue sur la dramatique situation des conflits en cours dans cette zone, les représentants des Églises orthodoxes, de l’Église apostolique assyrienne de l’Orient, des Églises orientales catholiques, de l’Église latine de Jérusalem, de l’Église évangélique luthérienne en Jordanie et en Terre Sainte et du Conseil des Églises du Moyen-Orient.
L’importance historique de cette rencontre a été partout soulignée, non seulement en raison de la nouveauté de l’initiative prise par l’évêque de Rome et du choix d’un lieu aussi significatif pour les relations entre l’Orient chrétien et l’Occident que représente Bari, où le culte des reliques de saint Nicolas attire des pèlerins de tous les coins du monde et en particulier de l’orthodoxie, mais aussi en raison de l’adhésion de nombreux chefs des Églises qui ne sont pas dans la pleine communion avec Rome.
Parmi les différents sens de cette rencontre, il vaut la peine d’en souligner quelques-uns en raison de la portée qu’ils ont pour ceux qui croient dans le Christ et pour toute la famille humaine : l’affirmation implicite que le christianisme ne s’identifie pas avec l’Occident ; la possibilité pour le primat de l’évêque de Rome, exercé dans le respect de la dignité des Églises d’Orient, d’être accueilli par tous les chrétiens comme l’expression d’une vision commune sur les grandes questions de l’humanité, outre que comme signe et instrument d’une unité vécue sur le modèle de la « synodalité » existant entre les Églises du premier millénaire ; le témoignage efficace du fait que la foi dans le Dieu fait homme n’est pas un spiritualisme désincarné.
Le fait que le christianisme ne s’identifie pas avec l’Occident et que la catholicité ne peut pas se passer du patrimoine de foi et de pensée qui a été mûri par les Églises d’Orient est une donnée décisive, sur laquelle a insisté Jean-Paul II, le pape slave, profondément sensible à la dignité des croyants de l’Europe de l’Est. Dans l’encyclique Orientale lumen, publiée en 1995, le pape polonais souligne combien tout l’écoumène chrétien doit aux Églises d’Orient une contribution extraordinaire, reconnaissable dans son sens profond et son soin de la tradition apostolique, dans la centralité de sa liturgie, dans la forte attention à l’œuvre de l’Esprit-Saint, dans le témoignage spirituel du monachisme et dans l’attitude apophatique de la réflexion et de la pratique de la foi. Ces constantes ont caractérisé la vie des Églises orthodoxes, y compris dans les processus de renouveau qu’elles ont vécus au XXème siècle, à commencer par leur participation importante au mouvement œcuménique. C’est grâce à ces processus que l’on a pu parvenir en 2015 au fameux « Document de Chieti », souscrit par les représentants catholiques et de toutes les Églises orthodoxes, qui reconnaît dans la communion synodale de l’Église antique un modèle dont s’inspirer pour l’unité à laquelle tend le chemin œcuménique : « Pendant tout le premier millénaire, l’Église en Orient et en Occident fut unie dans la préservation de la foi apostolique, le maintien de la succession apostolique des évêques, le développement de structures de synodalité indissociablement unies au primat et dans la compréhension de l’autorité comme service d’amour. Bien que l’unité entre l’Orient et l’Occident ait parfois été compliquée, les évêques d’Orient et d’Occident étaient conscients qu’ils appartenaient à l’Église une » (n.20).
De cette communion possible autour du ministère de l’évêque de Rome, la journée de Bari a été un signe éloquent et, si le mérite revient au pape François pour l’avoir proposée, le mérite des Églises orthodoxes qui ont accueilli l’invitation n’est pas moindre : la présence de leurs représentants aux niveaux les plus élevés autour de l’évêque de Rome, à commencer par celle du patriarche œcuménique Bartholomée, a dit au monde que le chemin de l’unité avance et que ce qui semblait jusqu’hier impossible est en train de devenir réalité sous l’action de l’Esprit et dans l’engagement commun au service de la paix, de la justice et de la sauvegarde de la création.
Il émerge aussi de la rencontre que le message selon lequel la foi des chrétiens n’est pas un spiritualisme désincarné, mais la clé pour lire les événements de l’histoire et y intervenir avec des jugements et des actes inspirés de l’Évangile pour la paix et la vie de tous. Avec des paroles fortes, le pape François résume le message qui parvient de Bari aux croyants et au monde entier : « Nous nous sommes aidés à redécouvrir notre présence de chrétiens dans le Moyen-Orient, comme frères. Celle-ci sera d’autant plus prophétique qu’elle témoignera davantage de Jésus Prince de la paix. Il n’empoigne pas l’épée, mais il demande à ses proches de la remettre dans son fourreau. Nous aussi, dans l’Église, nous sommes tentés par les logiques du monde, logiques de pouvoir et de gain, logiques expéditives et de commodité…Nous sentons que nous devons nous convertir encore une fois à l’Évangile, garantie d’une liberté authentique, et que nous devons maintenant le faire immédiatement, dans la nuit du Moyen-Orient en agonie. Comme pendant la nuit angoissée de Gethsémani, ce ne sera ni la fugue ni l’épée qui devanceront l’aube radieuse de Pâques, mais le don de soi à l’imitation du Seigneur… Puisse l’art de la rencontre prévaloir sur les stratégies de l’affrontement, qu’à l’ostentation de signes de pouvoir menaçants succède le pouvoir des signes d’espérance : des hommes de bonne volonté et de croyances différentes qui n’ont pas peur de se parler, d’accueillir les raisons de l’autre et de s’occuper les uns des autres. C’est seulement ainsi, en veillant à ce que personne ne manque de pain et de travail, de dignité et d’espérance, que les cris de guerre se changeront en chants de paix ».
Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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