« Un formidable défi », c’est le titre de l’intervention du cardinal Kevin Farrell à Dublin (Irlande), pour la Rencontre mondiale des familles, publiée dans L’Osservatore Romano du 25 août 2018. Cet événement, souligne-t-il, concerne tout le monde : « les familles croyantes et les familles non croyantes, celles qui sont unies et celles qui sont divisées, celles qui sont heureuses et celles qui sont dans la souffrance ».
Le préfet du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, s’est réjoui de l’arrivée du pape François le lendemain, car « le pape est un témoin authentique de combien l’Église, ou plutôt Dieu lui-même, a à cœur la famille ».
Il s’est arrêté spécialement sur « le véritable amour conjugal et familial », « l’amour entendu comme l’engagement pour le bien de l’autre, l’amitié totalisante qui inclut l’affection, la tendresse, le désir, la passion, le plaisir donné et reçu », qui « a besoin de mûrir, au niveau humain et chrétien, dans un cheminement prolongé dans le temps ». Il s’agit, a-t-il expliqué, de soigner « l’éducation de l’intelligence, de la volonté, des désirs, des affections, de la sexualité, en cherchant à acquérir des convictions et des attitudes conformes au vrai bien, aux normes éthiques qui en expriment les exigences, à la grâce sacramentelle du mariage ».
« Pour l’Église, a poursuivi le préfet, tout cela représente un formidable défi parce qu’il s’agit de donner vie à une pastorale de l’accompagnement, patient, persévérant, centrée sur les relations et la proximité personnelle, tournée vers la formation des consciences, attentive à proposer d’une part la beauté et les valeurs du don et, d’autre part, les normes et les devoirs. »
Voici notre traduction de son intervention.
AK
Intervention du cardinal Farrell
La rencontre de Dublin est « mondiale » parce que les participants, les délégations officielles des presque 140 nations et les très nombreuses familles viennent des cinq continents ; elle est « mondiale » parce qu’elles représentent toutes les familles du monde, les portent dans leur cœur, dans leur pensée, dans leur prière. Toutes : les familles croyantes et les familles non croyantes, celles qui sont unies et celles qui sont divisées, celles qui sont heureuses et celles qui sont dans la souffrance.
Le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie est profondément reconnaissant envers toute l’Église irlandaise d’avoir accepté le poids de la préparation et de l’organisation de ce rendez-vous au service de toute l’Église. Et il veut adresser des salutations aux cardinaux, aux évêques, aux délégations officielles des différents pays, aux prêtres, aux familles, aux intervenants et à tous les participants, surtout à ceux qui viennent de loin. Nous voulons remercier en outre les institutions civiles qui, de diverses manières, ont offert leur collaboration pour cet événement ecclésial.
« L’Évangile de la famille : joie pour le monde » est le thème choisi par le pape pour cette rencontre, comme la suite idéale de l’exhortation Amoris laetitia, un document qui dessine une formidable responsabilité pastorale. Le ton dominant veut être celui de la joie parce que, malgré les dangers et les crises qui menacent aujourd’hui la famille, l’Évangile offre un message d’espérance et de joie. Nous voulons dire un grand merci à François, parce qu’il vient annoncer cet « Évangile de la famille » et faire la fête avec de nombreuses familles ici à Dublin et avec les familles du monde entier. Puisse sa présence attirer l’attention des médias et des institutions sur la famille ; surtout, qu’elle donne confiance et courage, parce que le pape est un témoin authentique de combien l’Église, ou plutôt Dieu lui-même, a à cœur la famille.
L’attention du pape, dans Amoris laetitia, l’exhortation apostolique sur laquelle a été conçue toute la rencontre de Dublin – le congrès et la fête des familles – se concentre surtout sur le thème du véritable amour conjugal et familial à la lumière de l’Évangile, de l’expérience et de la réflexion rationnelle ; l’amour entendu comme l’engagement pour le bien de l’autre, l’amitié totalisante qui inclut l’affection, la tendresse, le désir, la passion, le plaisir donné et reçu. Cet amour a besoin de mûrir, au niveau humain et chrétien, dans un cheminement prolongé dans le temps, en soignant l’éducation de l’intelligence, de la volonté, des désirs, des affections, de la sexualité, en cherchant à acquérir des convictions et des attitudes conformes au vrai bien, aux normes éthiques qui en expriment les exigences, à la grâce sacramentelle du mariage. Pour l’Église, tout cela représente un formidable défi parce qu’il s’agit de donner vie à une pastorale de l’accompagnement, patient, persévérant, centrée sur les relations et la proximité personnelle, tournée vers la formation des consciences, attentive à proposer d’une part la beauté et les valeurs du don et, d’autre part, les normes et les devoirs. Enfin, mais c’est l’élément décisif, il y a la nécessité de responsabiliser les familles chrétiennes en tant que sujets principaux de l’évangélisation afin que, dans les paroisses, les groupes et les associations, puisse se réaliser une pastorale de l’accompagnement capable de rejoindre des personnes de tous les âges et de toutes les conditions : enfants, jeunes, fiancés, couples mariés, situations de crise, selon l’expression efficace employée par le pape François dans un discours au tribunal de la Rote romaine (21 janvier 2017), lorsqu’il souhaitait la réalisation « dans une synergie opportune entre les prêtres et les couples mariés », d’efficaces « itinéraires de préparation au sacrement du mariage », comme « un nouveau catéchuménat ».
Nous sommes conscients que la famille est une expérience universelle dans l’histoire du genre humain, avec une structure permanente, constituée de la relation entre un homme et une femme et du rapport entre les deux générations, les parents et les enfants. Aujourd’hui encore, les enquêtes statistiques disent que la famille, constituée d’un couple stable avec ses enfants, est à la première place dans les aspirations des jeunes. Le congrès théologico-pastoral de ces jours-ci a déjà permis d’entrer, avec toutes les interventions, les tables rondes, les expériences et les débats, dans le vécu concret des gens et d’écouter les voix du monde entier. La fête des témoignages montrera aussi, avec tout autant d’efficacité, même à travers les souffrances et les préoccupations, les joies et les espérances des familles.
Je suis Irlandais de naissance et je sais combien est fort l’enracinement de la foi chrétienne dans la vie de tous les jours. Beaucoup connaissent l’expression du cardinal Tomás Ó Fiaich (1923-1990), qui comparait les fidèles laïcs à un « géant endormi » qui doit se réveiller. Je le pense et je le vois dans l’avenir des familles, en Irlande et dans l’Église universelle. Avec tous les catholiques irlandais et au nom de toutes les familles venues à Dublin, représentant celles du monde entier, souhaitons la bienvenue au pape François : Céad Míle Fáilte.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat