CITE DU VATICAN, Jeudi 16 décembre 2004 (ZENIT.org) – Jean-Paul II ré-affirme le droit de tout homme à la citoyenneté mondiale, dans son « Message pour la Journée mondiale de la Paix », le 1er janvier 2005, sur le thème : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien » . Le pape a en effet choisi cette exhortation de saint Paul dans la Lettre aux Romains (ch. 12). Un message en date du 8 décembre 2004 dont voici quelques extraits (texte intégral ci-dessous, Documents).
La paix est un bien à promouvoir par le bien
« La perspective définie par le grand Apôtre met en évidence une vérité fondamentale: la paix est le résultat d’une longue et exigeante bataille, qui est gagnée quand le mal est vaincu par le bien. Face aux scénarios dramatiques d’affrontements fratricides et violents qui se déroulent en plusieurs parties du monde, face aux souffrances indicibles et aux injustices qui en résultent, le seul choix vraiment constructif est de fuir le mal avec horreur et de s’attacher au bien, comme le suggère encore saint Paul », explique d’emblée Jean-Paul II.
Le mal a toujours un visage et un nom
« La paix est un bien à promouvoir par le bien », insiste le pape. Inversement, il affirme la responsabilité humaine dans le mal en disant : « Le mal n’est pas une force anonyme qui agit dans le monde en vertu de mécanismes déterministes et impersonnels. Le mal passe par la liberté humaine ».
le pape précise : « Le mal a toujours un visage et un nom: le visage et le nom des hommes et des femmes qui le choisissent librement ». Il ajoute : « Chacun de ces choix porte en lui une connotation morale essentielle ».
Allant à la racine, le pape déclare : « Le mal est, en définitive, un renoncement tragique aux exigences de l’amour. A l’inverse, le bien moral naît de l’amour, il se manifeste comme amour et il est tourné vers l’amour ».
L’amour des ennemis
Pour Jean-Paul II, le chrétien a une responsabilité précise dans ce sens : « Ce propos est particulièrement clair pour le chrétien, qui sait que la participation à l’unique Corps mystique du Christ le situe dans un rapport particulier non seulement avec le Seigneur, mais aussi avec ses frères. Si l’on en tire toutes les conséquences, la logique de l’amour chrétien, qui dans l’Évangile constitue le cœur en action du bien moral, va jusqu’à l’amour des ennemis: « Si ton ennemi a faim, donne-lui à manger: s’il a soif, donne-lui à boire » (Rm 12,20) ».
Le pape déplore : « Regardant la situation actuelle du monde, on ne peut que constater un déferlement impressionnant de multiples manifestations sociales et politiques du mal: du désordre social à l’anarchie et à la guerre, de l’injustice à la violence contre autrui et à sa suppression ».
La « grammaire morale » universelle
Mais il indique un remède,c e qu’il a appelé une « grammaire morale universelle » : « Pour trouver son chemin entre les appels opposés du bien et du mal, il est nécessaire et urgent pour la famille humaine de mettre à profit le patrimoine commun des valeurs morales, reçu comme un don de Dieu lui-même ».
Et de préciser : « Cette grammaire commune de la loi morale nous impose de nous engager toujours et de manière responsable pour faire en sorte que la vie des personnes et des peuples soit respectée et promue ».
« Inspirant des valeurs et des principes communs, cette loi unit les hommes entre eux, même dans la diversité de leurs cultures, et elle est immuable: « Elle subsiste sous le flux des idées et des mœurs et en soutient le progrès. Même si l’on renie jusqu’à ses principes, on ne peut pas la détruire ni l’enlever du cœur de l’homme. Toujours elle resurgit dans la vie des individus et des sociétés », précise Jean-Paul II.
Et pour promouvoir cette « grammaire universelle », le pape préconise l’éducation des consciences :« Il est donc indispensable, écrit-il, de promouvoir une grande opération d’éducation des consciences, qui enseigne le bien à tous, surtout aux nouvelles générations, leur ouvrant l’horizon de l’humanisme intégral et solidaire, que l’Église indique et souhaite ».
Parmi les « maux de caractère social et politique qui affligent le monde », et « provoqués par les explosions de la violence », le pape cite le « cher Continent africain », la « dangereuse situation de la Terre de Jésus », le « phénomène tragique de la violence terroriste » et « le drame irakien se prolonge malheureusement dans des situations d’incertitude et d’insécurité pour tous ».
Le bien de la paix et le bien commun
Inversement, affirme le pape, « pour promouvoir la paix, en étant vainqueur du mal par le bien, il faut s’attacher avec une particulière attention au bien commun et à ses manifestations sociales et politiques », car, lorsqu’à « tous les niveaux, on cultive le bien commun, on cultive la paix ».
Il précise : « Le bien commun (…) revêt aussi une dimension transcendante, parce que Dieu est la fin ultime de ses créatures ».
Le bien commun exige donc, continue le pape, « le respect et la promotion de la personne et de ses droits fondamentaux, de même que, dans une perspective universelle, le respect et la promotion des droits des peuples ».
Une « citoyenneté mondiale » de l’enfant conçu
De plus, « le bien de la paix est étroitement lié au développement de tous les peuples, il est donc nécessaire, affirme Jean-Paul II, de tenir compte des implications éthiques de l’usage des biens de la terre ».
« L’appartenance à la famille humaine confère à toute personne une sorte de citoyenneté mondiale, lui donnant des droits et des devoirs, les hommes étant unis par une communauté d’origine et de destinée suprême ».
« Il suffit qu’un enfant soit conçu, affirme le pape, pour qu’il soit titulaire de droits, qu’il mérite attention et soins, et que chacun ait le devoir d’y veiller ».
« La condamnation du racisme, la protection des minorités, l’assistance aux réfugiés, la mobilisation de la solidarité internationale envers les plus nécessiteux, ne sont que des applications cohérentes du principe de la citoyenneté mondiale », fait observer Jean-Paul II.
Amour préférentiel pour les pauvres
Pour ce qui est de la lutte contre la pauvreté, corollaire du choix pôur la paix du monde, le pape rappelle que « le principe de la destination universelle des biens permet, en outre, d’affronter de manière appropriée le défi de la pauvreté » et que « ce drame reste étroitement lié à la question de la dette extérieure des pays pauvres », un cheval de bataille de Jean-Paul II pour le Jubilé.
« La communauté internationale doit répondre à de tels intérêts par un réseau toujours plus élargi d’accords juridiques, capable de réglementer la jouissance des biens publics, s’inspirant des principes universels de l’équité et de la solidarité », recommande le pape.
Il rappelle la déclaration de Medellin : « L’Église soutient et encourage un tel engagement, et elle invite ceux qui croient au Christ à manifester, de manière concrète et en tout lieu, un amour préférentiel pour les pauvres ».
C’est pourquoi le pape appelle à une « mobilisation morale et économique », rendue « particulièrement nécessaire » de façon à « donner un nouvel élan à l’aide publique au développement, et d’explorer, malgré les difficultés que ce parcours peut présenter, les propositions de nouvelles formes de financement du développement ».
Le pape rappelle que dans sa lettre apostolique pour le IIe millénaire, « Novo Millennio Ineunte », il a évoqué l’urgence d’une « nouvelle imagination de la charité ».
Les peuples africains, protagonistes de leur destinée
Jean-Paul II exprime sa particulière préoccupation pour
l’Afrique: « Cela est particulièrement vrai, écrit-il, lorsque nous nous approchons des nombreux et délicats problèmes qui entravent le développement du continent africain : pensons aux nombreux conflits armés, aux pandémies rendues plus dangereuses par les conditions de misère, à l’instabilité politique à laquelle est associée une insécurité sociale diffuse ».
« Puissent les peuples africains devenir les protagonistes de leur destinée », déclarait le pape qui ajoutait cet autre vœu : « Que l’Afrique cesse d’être seulement objet d’assistance, pour devenir sujet responsable d’échanges convaincus et productifs ! »
Universalité du mal et espérance chrétienne
Enfin, le pape affirme cet optimisme chrétien : « S’appuyant sur la certitude que le mal ne prévaudra pas, le chrétien nourrit une invincible espérance, qui le soutient dans la promotion de la justice et de la paix ».
Il affirme la responsabilité de chacun en disant : « Aucun homme ni aucune femme de bonne volonté ne peut se soustraire à l’engagement de lutter pour vaincre le mal par le bien. C’est un combat qui ne se mène valablement qu’avec les armes de l’amour. Quand le bien l’emporte sur le mal, l’amour règne; et, où règne l’amour, règne aussi la paix ».
Le pape conclut que les chrétiens sont appelés à « manifester par leur vie que l’amour est l’unique force capable de conduire à la perfection personnelle et sociale, l’unique dynamisme en mesure de faire avancer l’histoire vers le bien et vers la paix! »
L’Eucharistie et les valeurs de la justice, de la liberté et de la paix
Enfin, le pape mentionne l’année de l’Eucharistie en disant : « En cette année consacrée à l’Eucharistie, les fils de l’Église trouveront dans le Saint-Sacrement de l’amour la source de toute communion: de la communion avec Jésus Rédempteur et, en lui, avec tout être humain. C’est en vertu de la mort et de la résurrection du Christ, rendues sacramentellement présentes en toute célébration eucharistique, que nous sommes sauvés du mal et rendus capables de faire le bien. C’est en vertu de la vie nouvelle dont il nous a fait le don, que nous pouvons nous reconnaître frères, au-delà de toute différence de langue, de nationalité, de culture. En un mot, c’est en vertu de la participation au même Pain et à la même Coupe que nous pouvons nous reconnaître « famille de Dieu » et apporter ensemble une contribution spécifique et efficace à l’édification d’un monde fondé sur les valeurs de la justice, de la liberté et de la paix ».