CITE DU VATICAN, Mardi 24 décembre 2002 (ZENIT.org) – Le Bulletin de l’Eglise orthodoxe russe auprès de l’Union européenne, » Europaica » , (http://www.orthodoxeurope.org/newsletter.php) publie cette réflexion sur » L’enseignement des fondements de la culture orthodoxe dans les écoles publiques: pro et contra”. Rappelons que les Orthodoxes fêteront Noël le 7 janvier.
– La culture orthodoxe dans les écoles de l’Etat? –
Au cours des dernières années, le Ministère russe de l’éducation a reçu plusieurs appels écrits de la part de différentes Républiques de la Russie, demandant à examiner la possibilité d’introduire un cours facultatif sur la culture orthodoxe dans le cadre de l’éducation scolaire. En réponse à ces appels, un Conseil commun du Ministère de l’éducation et de l’Église orthodoxe russe a mené une large discussion à ce propos.
Après ces entretiens, le Ministère a envoyé une lettre aux Républiques contenant un programme qui pourrait être utilisé pour l’enseignement de cette discipline. Cette lettre informative, datée du 22.10.2002, a été adressée au personnel des organes directeurs de l’éducation afin de leur fournir une aide méthodologique. Dans ce document il était expliqué comment, en conformité avec les exigences de la Constitution de la Fédération de Russie et de la loi sur l’éducation, la matière “Les fondements de la culture orthodoxe” devait être introduite dans le processus de l’enseignement général. Un mois après que ce document a été envoyé dans les différentes régions du pays, une polémique a vu le jour dans la presse et à la télévision: l’enseignement facultatif de la religion doit-il ou non être autorisé dans les écoles publiques?
Ayant comparé la foi en Dieu avec la “foi dans le communisme”, le vice-président de l’appareil gouvernemental de Russie, Aleksey Volin, dans un discours télévisé a mis en garde la population contre le “danger” d’enseigner une semblable matière religieuse dans un pays pluriethnique. Au dire de Volin, la lettre du Ministère de l’éducation est “d’un esprit obscurantiste et moyenâgeux”.
Estimant que “l’introduction d’un cours facultatif sur l’orthodoxie entraînerait une réaction négative des autres religions”, la vice-présidente de la Douma russe, Irina Hakamada, s’est mise à la tête de l’opposition libérale, représentant ainsi les adversaires de l’enseignement des matières à l’orientation religieuse. Selon Madame Hakamada, “dans une situation de lutte antiterroriste il est défendu d’opposer les religions, par exemple l’islam et l’orthodoxie”. L’argument le plus important contre l’incorporation d’une telle matière dans le programme scolaire mentionne “la contradiction d’une pareille initiative avec le caractère séculier de l’éducation et de l’Etat russe”.
Le métropolite Kirill de Smolensk et de Kaliningrad, président du Département des relations extérieurs du Patriarcat de Moscou, a énoncé la position officielle de l’Église. Il a proposé d’introduire dans les écoles un cours d’initiation aux fondements de la culture orthodoxe, musulmane, bouddhiste ou juive “en fonction du cadre régional, c’est-à-dire selon la concentration territoriale de telle ou telle confession”. Selon le métropolite, “une union correcte” entre les standards de l’éducation publique et les composants religieux régionaux contribuerait au développement de la tolérance chez les jeunes citoyens russes.
En réponse aux adversaires de l’enseignement religieux, le père Vsevolod Chaplin, vice-président du Département des relations extérieures du Patriarcat de Moscou, dans un article publié le 28.11.2002 dans le quotidien “Nezavisimaya Gazeta”, rappelle que “l’enseignement facultatif de la religion est garanti par la loi sur la liberté de conscience et des organisations religieuses, et que la religion est traditionnellement enseignée dans l’école publique d’une majorité de pays européens”. Le père Vsevolod a appelé à renoncer au principe d’une conception radicalement irréligieuse du monde dans les écoles publiques, et à garantir aux enfants croyants la possibilité de suivre leur scolarité en accord avec leurs convictions personnelles.
En expliquant la position du Ministère, le ministre de l’éducation Vladimir Philippov a maintes fois souligné qu’il ne s’agissait pas d’une introduction forcée du catéchisme dans l’école publique. Au dire du ministre, l’enseignement des fondements de la culture orthodoxe proposerait la possibilité d’acquérir des connaissances essentielles sur l’orthodoxie, sans que cela revête un caractère religieux. Exprimant sa propre opinion, le ministre a remarqué: “Nous sommes devenus spirituellement pauvres. Pourtant, la culture orthodoxe est digne que l’école lui prête attention. Quand nous parlons d’une éducation séculière, cela signifie une chose: les futurs cadres religieux ne serons pas élevés dans des départements publiques. Notre but est d’offrir la possibilité d’obtenir des connaissances élémentaires sur la culture orthodoxe”.
Le Ministère de l’éducation a expliqué que l’introduction, “dans le cadre facultatif, c’est-à-dire au libre choix”, de la culture religieuse orthodoxe ne transgresse aucunement le principe séculier de l’éducation en Russie, car, avant tout, le séculier ne signifie pas athée, autrement toute la littérature scolaire devrait être censurée également par le Ministère. Ces sont des professeurs laïques qui, après avoir reçu une formation adéquate, enseigneront cette discipline.
Cette initiative d’enseignement de la religion dans le système scolaire a été soutenue par la plupart des dirigeants régionaux, des politiciens, des hommes de la science et de la culture.
Les représentants des religions traditionnelles en Russie soutiennent également l’introduction d’un cours sur les fondements de la culture orthodoxe dans les écoles. Le vice-président de l’Administration spirituelle des musulmans russes, Farid Salman, a exprimé son appui aux efforts du Ministère de l’éducation afin d’insérer l’apprentissage de la culture orthodoxe dans les écoles: “Le droit d’étudier la culture traditionnelle dans l’école publique ne peut pas être remis en cause, puisqu’il représente les intérêts des citoyens et contribue à l’éducation des écoliers. Cela est particulièrement important de nos jours, dans le contexte de la crise morale qui traverse notre société et face à l’accroissement des extrémismes menaçants, qui trouvent leur origine notamment dans la méconnaissance et la négligence des cultures traditionnelles propres aux différentes ethnies russes”.
Le Congrès des organisations et associations religieuses juives de Russie a adressé au ministre de l’éducation Philippov une lettre, dans laquelle il est souligné que le droit des citoyens de choisir le type d’éducation et de formation pour leurs enfants qui sera en accord avec leurs convictions, est incontestable. “Si nous voulons élever une génération d’enfants vraiment civilisée, il faut nécessairement leur enseigner dans l’école publique les valeurs de leur tradition religieuse maternelle. A notre avis, cela contribuera au déracinement du nationalisme radical et de la haine religieuse”.
En outre, les chefs de l’Administration spirituelle des musulmans russes et du Congrès des organisations et associations religieuses juives ont exprimé leur commune espérance que le Ministère de l’éducation prêtera également l’attention à l’examen de la possibilité d’enseigner dans les écoles publiques les fondements de l’islam et du judaïsme. En guise de réponse, un délégué du Ministère a affirmé que les représentants des religions doivent eux-mêmes prendre l’initiative: “Nous sommes prêts à exam
iner toutes les propositions à ce sujet”.
Durant ces dernières années, l’enseignement facultatif de l’histoire des religions, sous des formes multiples, est mené avec succès dans plusieurs écoles publiques de différentes régions russes. Selon un avis de l’Administration de la région de Moscou, plus d’une centaine d’écoles dans cette région auraient déjà instauré un tel cours, et aucune protestation de la part des parents ou des enfants n’aurait été remarquée. En plus, comme le communique le Ministère de l’éducation: “l’enseignement de la culture chrétienne exerce une bonne influence sur les étudiants”.
Selon les scrutins, la plupart des citoyens russes serait d’accord que leurs enfants étudient une matière telle que les fondements de la culture orthodoxe dans le cadre de leur programme scolaire, estimant qu’ainsi les droits définis par la Convention de l’ONU contre la discrimination dans le domaine de l’éducation soient mis en oeuvre. Dans la Convention il est dit notamment que les parents doivent avoir la possibilité de “garantir à leurs enfants une éducation religieuse et morale, conformément à leurs convictions personnelles”.
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