Pérou: Donner un élan à une pastorale sociale concrète

CITE DU VATICAN, Lundi 22 juillet 2002 (ZENIT.org) – « Donner un élan à une pastorale sociale concrète », telle est l’invitation lancée par Jean-Paul II aux évêques du Pérou en visite quinquennale ad limina le mardi 2 juillet.

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« Jean-Paul II souligne la vigueur et la créativité de l’action que l’Eglise du Pérou accomplit en faveur des plus démunis ».

Au cours de la rencontre, le Saint-Père leur a adressé le discours suivant, dans la traduction de L’Osservatore Romano en français du 16 juillet (cf. vatican.va).

Chers frères dans l’épiscopat,

1. Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue à l’occasion de cette rencontre avec vous, pasteurs de l’Eglise du Christ au Pérou, qui accomplissez la visite « ad limina » au Siège de Pierre, l’Apôtre qui reçut le mandat de « confirmer ses frères dans la foi » (cf. Lc 22, 32) et qui, à Rome, mena à bien son témoignage d’amour et de fidélité au Seigneur, en versant son sang pour Lui.

Je remercie Mgr Luis Armando Bambarén Gasteluzmendi, Evêque de Chimbote et Président de la Conférence épiscopale, des paroles cordiales qu’il m’a adressées, avec lesquelles il a souligné le « lien de l’unité, de la charité et de la paix » qui vous unit à l’Evêque de Rome (Lumen gentium, n. 22), ainsi que les principales aspirations qui animent votre mission apostolique dans les diverses Eglises particulières qui vous ont été confiées. Inspiré par ma sollicitude de Pasteur de l’Eglise universelle, je me sens proche de vos préoccupations et je vous encourage à vous dévouer avec générosité et grandeur d’âme, en donnant un nouvel élan à la tâche passionnante du renouveau pastoral en ce début de nouveau millénaire.

2. L’un des défis cruciaux de notre temps, comme je l’ai indiqué dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, est précisément l’esprit de communion qui doit régner dans l’Eglise et présider tous les aspects et les domaines de l’activité pastorale (cf. nn. 43-45).

En effet, la communion, comme spiritualité enracinée dans la Trinité, comme principe éducatif et attitude chrétienne dont on doit rendre un clair témoignage, est non seulement une exigence impérieuse du message du Christ (cf. Ecclesia in America, n. 33) mais également une réponse « aux attentes profondes du monde » (Novo millennio ineunte, n. 43).

Grâce à votre profonde expérience pastorale, vous connaissez bien le paradoxe de ce moment historique, dans lequel la capacité presque incommensurable des relations interpersonnelles coexiste avec un fréquent sentiment d’isolement, qui provoque un éclatement et même des conflits dans diverses parties de la famille humaine.

Face à cela, l’Eglise doit se rappeler et revivre sans cesse l’expérience incomparable de la Pentecôte, lorsque « tous ensemble les disciples louaient Dieu dans toutes les langues, l’Esprit ayant conduit à l’unité les peuples lointains et offert au Père les prémisses de toutes les nations » (Saint Irénée, Adv. haer. 3, 17, 2). Vous aussi, frères dans l’épiscopat, vous êtes appelés à représenter un exemple de communion dans l’affection collégiale, sans que cela ait lieu au détriment de la responsabilité que chacun d’entre vous possède dans son Eglise locale, dans laquelle à votre tour, vous êtes « le principe visible et le fondement de l’unité » (Lumen gentium, n. 23).

3. Si le manque de moyens, les incompréhensions, la diversité d’opinion ou d’origine au sein de votre population, ou d’autres difficultés encore, peuvent conduire au découragement, Jésus nous réconforte toujours en nous faisant voir que « même les vents et la mer lui obéissent » (Mt 8, 27). Il est donc nécessaire de se reposer sur Lui, en faisant croître chez tous les croyants un authentique désir de sainteté, à laquelle nous sommes tous appelés et dans laquelle culminent les aspirations les plus profondes de l’être humain.

Le Pérou, qui a été béni de Dieu par d’abondants fruits de sainteté, présente de nombreux exemples qui peuvent éclairer et ouvrir de grandes perspectives aux générations actuelles.

On ne doit pas oublier les figures comme saint Turibio de Mogrovejo, sainte Rose de Lima, saint Martín de Porres, saint Francisco Solano ou saint Juan Macías, parmi tant d’autres. Elles constituent un modèle pour les pasteurs, qui doivent s’identifier avec le style personnel de Jésus-Christ, fait de simplicité, de pauvreté, de proximité, de renoncement aux avantages personnels et d’une confiance totale dans la force de l’Esprit, au-delà des moyens humains (cf. Ecclesia in America, n. 28). Elles le sont également pour les autres croyants, qui ont trouvé chez les saints la preuve vivante des merveilles que Dieu accomplit dans un coeur bien disposé, quelle que soit la condition sociale ou la situation de vie dans laquelle il accueille sa grâce.

Votre pays doit se sentir privilégié pour ses nombreux fruits de sainteté, dans la mesure où ils soulignent le profond enracinement chrétien de son peuple, qui a contribué de façon décisive à forger son identité et qui, loin d’être ignoré, doit être sauvegardé en tant que valeur incontournable.

4. Dans ce contexte, il est particulièrement important de susciter, en particulier parmi les jeunes, la passion pour les grands idéaux de l’Evangile, de façon à ce qu’un nombre croissant d’entre eux se sente poussé à consacrer entièrement sa vie à proclamer et à rendre témoignage du fait que « où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Co 3, 17).

C’est pourquoi l’évangélisation des nouvelles générations doit être accompagnée, presque de manière spontanée, par une pastorale des vocations, chaque jour plus urgente, ouvrant de nouveaux horizons d’espérance dans les Eglises locales.
Il est également important de prêter une grande attention à la formation dispensée dans les séminaires.

Outre à cultiver la maturité humaine des candidats afin qu’ils se mettent complètement à la disposition de Dieu et de l’Eglise, de façon pleinement consciente et responsable, on doit sagement les guider vers une profonde vie spirituelle qui les rende propres à assumer de façon effective et affective leur futur ministère et toutes ses exigences. Il est nécessaire de présenter et d’affronter de façon claire et complète les qualités permettant une sequela Christi inconditionnée dans le ministère ou dans la vie consacrée, car celui qui aime vraiment Jésus répétera dans son coeur devant chaque difficulté les paroles de Pierre: « Seigneur, à qui irons-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6, 68).

Votre pays a besoin de prêtres et d’évangélisateurs, saints, savants et fidèles à leur vocation, et on ne peut y renoncer en raison de leur petit nombre ou d’autres circonstances sociales et culturelles. Il s’agit d’une tâche dans laquelle l’Evêque doit se révéler particulièrement proche de ses séminaristes, comme père et maître, en comptant sur la collaboration inconditionnée et transparente des éducateurs.

Il faut, en outre, mettre l’accent sur l’esprit de collaboration entre les divers diocèses afin d’offrir des moyens personnels et matériels à leurs candidats au sacerdoce, ce qui peut donner de très bons résultats et qui manifeste une solidarité concrète avec les Eglises particulières dont les ressources sont les plus faibles.

5. Vous avez également exprimé votre préoccupation pour les problèmes qui concernent le mariage et la famille, que ce soit en raison de certains facteurs culturels ou d’un climat déterminé, parfois « militant », contre la signification authentique de ces institutions (cf. Novo millennio ineunte, n. 47). C’est pourquoi il est important que le projet chrétien de sainteté imprègne également l’amour humain et la coexistence familiale, car l’on doit respecter de façon intégrale le dessein de Dieu pour tout le genre humain et sa dignité éminente de signe de l’amour qui unit le Christ à son Eglise (cf. Ep 5, 32).

La complexité des aspects impliqués dans ce domaine requiert également une action pastorale pluridisciplinaire, dans laquelle
l’initiative catéchétique des pasteurs soit complétée par l’action éducative d’autres fidèles laïcs, par l’aide réciproque entre les familles elles-mêmes et par la promotion de conditions qui favorisent la croissance de l’amour des conjoints et la stabilité familiale.

En effet, il est nécessaire que les jeunes connaissent la véritable beauté de l’amour, « puisque l’amour est de Dieu » (1 Jn 4, 7), qu’ils mûrissent dans celui-ci une attitude de don de soi et non d’égoïsme, qu’ils s’initient à la coexistence avec un esprit limpide et pur, en incluant dans celle-ci également la richesse de l’expérience d’une foi partagée, et qu’ils affrontent leur avenir comme une vocation authentique à laquelle Dieu les appelle pour collaborer à la tâche ineffable d’être des dispensateurs de la vie.

La pastorale de la famille doit également considérer ces aspects qui peuvent conditionner un développement adapté des devoirs propres à cette institution fondamentale, en promouvant un meilleur soutien économique aux nouvelles cellules familiales qui se forment, de plus grandes possibilités d’obtenir des logements décents, qui évitent la désagrégation de la famille, et la possibilité effective d’éduquer les enfants selon sa propre foi et son sens éthique de la vie. C’est pourquoi les pasteurs doivent faire entendre leur voix, pour souligner l’importance de la famille comme cellule de base fondamentale de la société et sa contribution irremplaçable au bien commun de tous les citoyens. Cela devient particulièrement urgent lorsque, pour des raisons plus ou moins opportunistes, on présente des projets de politiques antinatalistes, on étouffe le désir de fidélité dans le mariage et l’on fait obstacle par d’autres moyens au déroulement normal de la vie familiale.

6. Je constate avec satisfaction la vigueur et la créativité de l’action que l’Eglise qui est au Pérou accomplit en faveur des plus démunis, et qui est encore davantage nécessaire à un moment où la situation économique difficile de la région fait réapparaître avec une plus grande violence les multiples formes, anciennes et nouvelles, de pauvreté. Lorsque les fils de Dieu qui vivent dans des conditions inhumaines sont aussi nombreux, il faut donner un élan à une pastorale sociale concrète, tangible et organisée, qui réponde rapidement aux besoins les plus urgents et qui jette les bases d’un développement harmonieux et durable, fondé sur l’esprit de solidarité fraternelle.

A ce propos, j’exprime mes plus sincères remerciements aux nombreuses institutions ecclésiales qui, avec un grand dynamisme et dévouement, font parvenir la lumière de l’Evangile et l’assistance fraternelle dans les lieux les plus reculés de la terre péruvienne, de la forêt amazonienne, de la cordillère des Andes ou des plaines côtières.

Il est satisfaisant de constater comment dans ce domaine les efforts s’unissent, les différences disparaissent et les frontières sont abolies.

C’est en cela que se distinguent les Instituts de vie consacrée, qui peuvent être considérés « comme une exégèse vivante de la parole de Jésus: « Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40) » (Vita consecrata, n. 82). Il revient aux pasteurs de faire de ces nombreuses initiatives un signe clair de la sollicitude de l’Eglise, car aucun de ses membres, pasteurs ou fidèles, ne doit rester indifférent face au besoin spirituel et matériel, qu’il s’agisse de nécessités quotidiennes, de la dignité personnelle ou de l’opportunité effective de participer au bien commun de son peuple.

7. Au terme de cette rencontre fraternelle, je vous encourage à nouveau à poursuivre l’oeuvre de guider et d’éclairer la vie de vos Eglises particulières, en la confiant à la douce protection de la Très Sainte Vierge Marie, Etoile de la Nouvelle Evangélisation. Je vous demande de transmettre le salut et l’affection du Pape à vos prêtres et séminaristes, aux missionnaires, aux communautés religieuses, aux catéchistes, aux éducateurs et aux laïcs engagés, ainsi qu’aux personnes âgées et aux malades, qui sont à vos côtés et qui vous aident dans la tâche passionnante de semer l’Evangile, source d’espérance et de paix, dans le coeur des Péruviens.

Alors que je vous accompagne toujours de mes prières et de mon affection, je vous donne de tout coeur la Bénédiction apostolique.

©L’Osservatore Romano – 16 juillet 2002

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ZENIT Staff

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