Les Journées mondiales de la jeunesse offrent aux jeunes des moments forts pour expérimenter et approfondir la piété et la dévotion chrétienne. Les cérémonies du Chemin de croix ont toujours lieu le vendredi soir de la semaine des JMJ et sont retransmises à la télévision dans le monde entier. Les représentations des stations de la croix à Toronto (2002), Sydney (2008) et Madrid (2011) ont été un spectacle pour le monde et ont offert un témoignage provocateur de l’histoire chrétienne au cœur de trois grandes villes mondiales.
Histoire de cette dévotion
Jérusalem est la ville de la Via Dolorosa (Chemin de douleur). Seule Jérusalem a ce grand et tragique privilège. La Via dolorosa est définie par la foi, pas par l’histoire. Au Moyen-âge, les pèlerins de retour de Jérusalem voulurent « reproduire » les lieux saints dans les villes où ils habitaient, permettant ainsi à beaucoup de partager les mêmes expériences spirituelles que celles qu’ils avaient vécues dans la Cité sainte.
La Via Crucis (le Chemin de croix), telle que nous la connaissons aujourd’hui, remonte à la période médiévale : elle est associée à Saint Bernard de Clairvaux (1153), Saint François d’Assise (1226) et Saint Bonaventure de Bagnoregio (1274). En 1233, l’ordre des Frères mineurs (franciscains) s’établit en Terre Sainte et ils devinrent les « Custodes des lieux saints ».
À la fin du XIIIème siècle, la Via Crucis est mentionnée, non pas comme un pieux exercice, mais comme le chemin que Jésus a emprunté pour monter au Calvaire. Plusieurs « stations » furent identifiées sur ce chemin. Autour de 1294, un frère dominicain, Rinaldo di Monte Crucis, écrivit dans son « Liber peregrinationis » qu’il était « monté au Saint Sépulcre de la même manière que l’avait fait Jésus, en portant sa croix ». Il décrivait les différentes stations le long du chemin : le palais d’Hérode, le Lithostrotos (où Jésus fut condamné à mort), le lieu où Jésus rencontra les femmes de Jérusalem et le lieu où Simon de Cyrène prit sur ses épaules la croix de Jésus.
Le Chemin de croix tel que nous le connaissons est une fusion de trois dévotions différentes qui étaient répandues depuis le début du XVème siècle, en particulier en Allemagne et aux Pays-Bas.
une dévotion à toutes les chûtes de Jésus sous le poids de la croix. Il y avait 7 « chûtes » ;
une dévotion au « chemin de douleurs du Christ », qui consistait d’abord en des processions d’une église à une autre (parfois jusqu’à 7 ou 9 églises différentes), pour commémorer le chemin de douleurs. Ces processions marquaient les diverses « processions » de Jésus pendant le récit de la passion : de Gethsémani à la maison d’Anne (Jn, 18,13), de la maison d’Anne à la résidence de Caïphe (Jn 18,24 ; Mt 26,56), la marche jusqu’au prétoire de Pilate (Jn 18,28 ; Mt 27,2), la marche jusqu’au palais d’Hérode (Lc 23,7), etc. ;
une dévotion aux « stations du Christ », c’est-à-dire à ces moments où il s’est arrêté sur son chemin vers le Calvaire, à cause du poids du fardeau qu’il portait, en raison de son épuisement ou, ému de compassion et d’amour, pour parler aux femmes et aux hommes qui participaient à sa passion le long du chemin. Chacune de ces stations était souvent marquée par un pilier ou une croix qui sont devenus des objets de méditation et de vénération.
Le Chemin de Croix, avec les 14 stations, est d’abord attesté en Espagne dans la première moitié du XVIIème siècle, en particulier là où les franciscains étaient présents. Il s’est ensuite propagé en Sardaigne (à l’époque sous la domination espagnole), puis du sud au nord de la péninsule italienne.
Les 14 stations du Chemin de croix sont les suivantes :
1 Jésus est condamné à mort
2 Jésus prend sa croix
3 Jésus tombe pour la première fois
4 Jésus rencontre sa mère, la bienheureuse Vierge Marie
5 Simon de Cyrène porte la croix
6 Véronique essuie le visage de Jésus
7 Jésus tombe à nouveau
8 Jésus rencontre les femmes de Jérusalem
9 Jésus tombe pour la troisième fois
10 Jésus est dépouillé de ses vêtements
11 Jésus est crucifié
12 Jésus meurt sur la croix
13 Le corps de Jésus est descendu de la croix
14 Le corps de Jésus est déposé dans la tombe
Les stations de la Croix à Rio
Les stations de la Croix de Rio parlent des souffrances de Jésus telles qu’elles sont exprimées dans la jeunesse actuelle. La route empruntée par Jésus dans la ville de Jérusalem sera recréée dans les stations de la croix, le 26 juillet, dans le cadre de Rio de Janeiro, dans des lieux comme le Rocher de l’Arpoador et l’Escalier de Selaron à Lapa. Il y aura 14 stations, dont 13 le long des 900 mètres du terre-plein de l’avenue de l’Atlantique, et la dernière sur le site central, où sera le pape François. 280 volontaires joueront les stations pendant la procession qui durera environ une heure et quart.
Chaque station sera liée à une des questions auxquelles sont confrontés les jeunes dans le monde moderne : la jeunesse missionnaire, les jeunes convertis, les jeunes qui se reconstruisent dans des communautés, les jeunes qui parlent au nom des mères, les séminaristes, les religieux qui se battent pour la vie, les couples, les jeunes qui parlent au nom des femmes qui souffrent, les étudiants, les jeunes des réseaux sociaux, les jeunes en prison et le ministère auprès des détenus, les jeunes malades en phase terminale, les jeunes sourds, les jeunes d’Afrique, d’Amérique du nord, d’Amérique latine et des Caraïbes, d’Europe, d’Asie et d’Océanie.
Les stations de la croix sont conçues pour parler aux jeunes, de même que l’histoire du chemin de douleurs du Christ parlent des difficultés auxquelles les jeunes sont confrontés aujourd’hui. Elles sont porteuses d’un message de solidarité. Il ne s’agit pas simplement de parler de ces questions mais de faire appel à l’esprit des jeunes pour qu’ils agissent ensemble dans le Christ, explique le directeur artistique, Ravel Cabral. La retransmission sur de grands écrans permettra à tous les participants de suivre les événements.
Le pape François présidera sur la scène principale. La mise en scène des 13 autres station sera reproduite sur le site central afin que le pape puisse participer en temps réel à ce qui se passe dans chacune des stations, explique le directeur général Ulysses Cruz.
L’actrice brésilienne Cassia Kiss jouera le rôle de Marie. D’autres acteurs brésiliens participeront aussi et liront à chaque station des passages de la Bible qui précèderont les méditations.
Réflexion sur le Chemin de croix
Les stations soulignent les interactions tragiques entre les personnes, le combat de la lumière et des ténèbres, de la vérité et du mensonge. Le long du chemin de croix, les évangélistes Luc et Jean nous offrent des modèles qui nous enseignent comment vivre dans notre vie quotidienne la passion de Jésus, comme un chemin vers la résurrection. Par exemple, Simon de Cyrène, qui « rentrait des champs »… on mit la croix sur ses épaules et on la lui fit porter « derrière » Jésus. Le simple fait de porter la croix n’est pas le plus important. Tant de personnes souffrent de manière dramatique dans notre monde : tous les peuples, toutes les familles ont leurs peines et leurs fardeaux à porter. Ce qui donne une plénitude de sens à la croix, c’est le fait de la porter derrière Jésus, non pas sur un chemin de solitude et d’angoisse, d’errance désespérée ou de rébellion, mais dans une marche soutenue et nourrie par la présence du Seigneur.
Enfin, les stations de la Croix et la Via Dolorosa< /em> nous invitent à entrer dans le mystère de la passion du Christ et à nous positionner pour ou contre Jésus. Chacun de nous a été marqué par le signe de la croix, et le mot de « croix » demeure en chacun de nous, nous libérant d’un monde de ténèbres, d’aliénation, de haine et de mort et nous accueillant dans une communion de lumière, de vie et de paix. Le Christ crucifié est la parole dont le message a atteint les profondeurs du péché de l’homme et a sauvé toute l’humanité de l’autodestruction. La croix est le triomphe de l’amour de Dieu sur le péché le plus profond, la mort la plus noire, le mal ultime.
La croix révèle aussi jusqu’où Dieu ira par amour pour nous. Ceux qui s’identifient à la Via Dolorosa et à la Croix de Jésus acceptent de s’identifier aussi au refus de détruire et de crucifier. La question n’est pas de savoir QUI a tué Jésus, mais CE QUI l’a tué… et quels sont les cercles vicieux de la violence qui continuent à faire marcher le Seigneur de la vie sur le chemin des douleurs, à travers les femmes et les hommes d’aujourd’hui, et quels sont les systèmes qui le crucifient aujourd’hui dans ses frères et sœurs en humanité.
Traduction Hélène Ginabat