« Nous devons prendre un point de départ positif en redécouvrant et en annonçant l’Évangile de la famille dans toute sa beauté »: c’est la recommandation du cardinal Kaspoer au seuil du consistoire extraordinaire des 20 et 21 février.
L’exposé du cardinal Kasper sur la famille, à l’occasion de ce consistoire ne sera pas rendu public, mais le P. Lombardi en a proposé une synthèse pour la presse accréditée: surtout il a insisté sur l’introduction aux travaux faite par le pape François.
Le directeur de la salle de presse du Vatican, le P. Federico Lombardi, a tenu un point presse en fin de matinée, ce 20 février, sur la première matinée du consistoire convoqué par le pape François sur le thème de la famille en préparation au synode d’octobre prochain.
Les paroles du pape François
Le P. Lombardi a invité à méditer avec « une grande attention » les paroles brèves du pape François : « les méditer et les analyser, les lire avec une grande attention parce qu’elles ont été longtemps réfléchies par le pape, prononcées avec précision et elles disent une organisation, une orientation, une attente du pape pour le travail de ces journées ».
Le pape, at-il souligné, a défini la famille comme la « cellule fondamentale de la société humaine », pensée « dès l’origine » par le Créateur et donc la famille représente dans le monde comme le reflet de Dieu. « Nous chercherons à approfondir la théologie de la famille et la pastorale que nous devons mettre en œuvre dans les conditions actuelles », a encore dit le pape, avant d’ajouter: « Faisons-le avec profondeur et sans tomber dans la casuistique, qui rabaisserait inévitablement le niveau de notre travail »
« C’est précisément, a expliqué le P. Lombardi, une indication précise que le pape a voulu donner : il veut souvent utiliser des mots précis et aussi des formules très fortes. Il invite à une réflexion profonde qui ne se perde pas dans la casuistique, en étant conscient que, aujourd’hui, la famille est dans une situation difficile : « méprisée, maltraitée » mais nous devons reconnaître ce qui est beau, vrai et bon dans ce qui forme la famille et dans ce qu’est la famille, aujourd’hui. Cela, a ensuite ajouté le pape, est indispensable pour la vie du monde et pour l’avenir de l’humanité : « Mettre en évidence le plan lumineux de Dieu sur la famille et aider les époux à le vivre avec joie dans leur existence, avec une pastorale intelligente, courageuse et pleine d’amour ». Je dirais, que c’est un texte où chaque mot a une véritable signification, et c’est pour cela que je me suis permis de vous en proposer la lecture, avec toute la capacité d’approfondissement qui est la vôtre, mais chaque mot est pensé et voulu par le Saint-Père pour orienter le sens de ces journées ».
Ne pas se focaliser sur les problèmes
Presque toute la matinée a été consacré à la lecture en salle du discours du cardinal Kasper, sauf deux interventions, dans les 10 dernières minutes : les interventions n’ont pas encore décollé même si, formellement, les demandes de prises de parole sont déjà enregistrées.
« La publication du discours du cardinal Kasper n’est pas prévue, a souligné le porte-parole du Saint-Siège, non pas parce qu’il y aurait des secrets extraordinaires, mais par correction, parce que c’est un discours qui s’adresse aux Pères, qui est fait pour eux et pour le travail de ce consistoire ».
Mais le P. Lombardi a proposé une synthèse du rapport du cardinal Kasper, un rapport « en grande harmonie avec ce qu’a dit le pape dans son mot d’introduction : il y a vraiment eu une organisation de son discours très cohérente avec la perspective donnée par le pape. Il s’agit de regarder avec réalisme la réalité de la famille, avec un grand désir de voir avec profondeur son insertion dans la réalité, dans le plan de Dieu et tout ce qu’il y a de beau dans la famille et qui est aussi annoncé dans l’Évangile, pour le bien de toutes les personnes et de l’humanité. Une perspective, donc, très positive, très ample, théologiquement fondée, profonde, et qui arrive à voir quels sont les problèmes de la pastorale d’aujourd’hui, mais sans être focalisée, limitée à ces problèmes ».
La conclusion du card. Kasper et le plan de son exposé
Le P. Lombardi a lu la conclusion du card. Kasper : « Nous devons prendre un point de départ positif en redécouvrant et en annonçant l’Évangile de la famille dans toute sa beauté. La vérité convainc par sa beauté. Nous devons contribuer par les paroles et les faits à faire en sorte que les personnes trouvent le bonheur dans la famille et qu’elles puissent ainsi donner aux autres familles le témoignage de leur joie. Nous devons comprendre de manière nouvelle la famille en tant qu’église domestique, en faire la voie privilégiée de la nouvelle évangélisation, du renouveau de l’Église, une Église qui est en chemin auprès des gens et avec les gens. En famille, les personnes sont chez elles, ou au moins elles cherchent une maison dans la famille. Dans les familles, l’Église rencontre la réalité de la vie ; c’est pour cela que les familles sont le banc d’essai de la pastorale et l’urgence de la nouvelle évangélisation. La famille est l’avenir : pour l’Église aussi elle constitue la voie du futur ».
Le P. Lombardi a indiqué également le plan de l’exposé du cardinal Kasper:
Introduction: « La redécouverte de l’Évangile de la famille »
Première partie: « La famille dans l’ordre de la création »; « La vision de la famille dans la perspective biblique de la Genèse et du plan de Dieu » (à partir du récit biblique: « Et Dieu créa l’homme à son image, homme et femme il les créa, les bénit et leur dit : ‘soyez féconds, multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez-la’ », c’est-à-dire a réalité de la famille dans l’ordre de la création.
Deuxième partie : « Les structures de péché dans la vie de la famille » – c’est-à-dire les problèmes, les tensions, les aliénations : l’aliénation du rapport entre l’homme et la femme, entre le corps et l’esprit, entre l’homme et la nature ; les disputes et les tensions en famille, les souffrances et les difficultés des femmes et des mères, l’aliénation la plus importante qui est la mort. Ensuite l’aspect de la présence du péché et des tensions, et des difficultés aussi dans la réalité familiale.
Troisième partie: « La famille dans l’ordre chrétien de la Rédemption » : le card. Kasper a repris les paroles de l’Évangile et du Nouveau Testament relatifs à la famille, les paroles de Jésus et aussi les paroles de la Lettre aux Éphésiens et d’autres références néotestamentaires, jusqu’à ce que l’on aborde le mariage comme sacrement, sacrement qui est aussi instrument de guérison et instrument de la grâce sanctifiante.
La famille, Eglise domestique
Ici, a indiqué le P. Lombardi, « il y a un passage très beau dans la partie néotestamentaire, sur l’ordre chrétien de la Rédemption, sur la loi de gradualité qui dit : « … continuer à grandir de manière toujours nouvelle et plus profonde dans le mystère du Christ. Cette loi de gradualité est quelque chose d’extrêmement important pour la vie et pour la pastorale matrimoniale et familiale ; cela n’est pas la gradualité de la loi, mais la gradualité, c’est-à-dire la croissance dans la compréhension et dans la réalisation de la loi de l’Évangile qui est une loi de liberté ». Les fidèles, a-t-il précisé, dans des situations souvent devenues difficiles, ont besoin de temps et
d’accompagnateurs patients sur leur chemin. Ici, il me semble que c’est aussi l’esprit du pape François, la manière dont on parle d’accompagner, l’Église qui accompagne, cela revient très clairement. Il a fait aussi quelques allusions aux mots « s’il te plaît, merci, excuse-moi » dans la vie quotidienne de la famille en chemin, dans l’esprit de l’Évangile. »
Quatrième partie : ensuite, a continué le P. Lombardi, « il y a une partie qui me semble très importante dans la perspective du cardinal Kasper, sur la famille comme Eglise domestique. Il me semble que dans sa proposition d’une vision pastorale de la famille, aujourd’hui, et dans la situation dans la vie de l’Église, il insiste beaucoup sur ce thème, et qu’une vision de l’Église domestique, avec une certaine largeur de vue n’est pas seulement la famille nucléaire qui vit.. mais c’est aussi la famille qui s’élargit, la famille qui est accueillante, la famille comme lieu de rencontre, de spiritualité familiale, de groupes de prière etc. Il évoque aussi les petites communautés, les communautés de base etc. Ensuite, autour de l’idée de l’église domestique, comme point central de vitalité et d’expérience de l’Église dans la vie concrète quotidienne, il me semble qu’il développe bien le thème du rôle de la famille et de la place de la famille dans la vie de l’Église et dans la nouvelle évangélisation. »
Cinquième partie: une section du discours du cardinal Kasper a été consacrée au problème des divorcés remariés, pour approfondir explicitement ce thème, a poursuivi le P. Lombardi. Le cardinal Kasper l’aborde de manière large, et aussi différente, en redisant qu’il s’agit de tenir ensemble le binôme inséparable de la fidélité aux paroles de Jésus et de la miséricorde, de la compréhension de la miséricorde de Dieu, dans la vie des personnes et donc dans l’action pastorale de l’Église. C’est donc le binôme à partir duquel on cherche une voie. Il a aussi parlé des thèmes à approfondir, par rapport à la validité du mariage, en évoquant par exemple le discours du pape François du 24 janvier de cette année aux officiels du Tribunal de la Rote, où il parlait de la dimension juridique et de la dimension pastorale, qui ne sont pas opposées : tenir ensemble ces deux dimensions aussi pour ce qui concerne la problématique de la validité du mariage et le jugement qui peut être prononcé. »
La contribution du pape Benoît XVI
Le P. Lombardi a signalé de nombreuses références au pape Benoît et au cardinal Ratzinger, à ses contributions sur ce type de problématiques: « une thématique qui aille au-delà du rigorisme et du laxisme, une réflexion pour savoir si la voie de la pénitence et du sacrement de pénitence sont un chemin pour trouver des solutions aux situations difficiles que nous pouvons rencontrer, surtout pour la situation des divorcés remariés. Il y a un très beau passage ici, où il invite à la sagesse, à la sagesse pastorale et à la « discretio », au discernement spirituel, sagesse, sagesse pastorale, à l’exemple de saint Alphonse de Liguori, et il dit : « J’espère que sur cette voie de la discrétion, au cours du procès synodal, nous parviendrons à trouver une réponse commune pour témoigner de manière crédible de la Parole de Dieu dans les situations humaines difficiles, en tant que message de fidélité mais aussi de miséricorde ». Donc, le thème qui va au-delà du rigorisme et du laxisme : réussir à conjuguer de manière crédible la fidélité et la miséricorde. Et sur ce point, la sagesse pastorale est très importante et là, il me semble que la cohérence de cette approche avec celle du pape François est très claire. »
Sur le rapport entre ce consistoire extraordinaire qui rassemble plus de 180 cardinaux et le synode d’octobre prochain, le P. Lombardi a posé la question : « Quel est le lien entre le consistoire et le chemin synodal ? ». Et de répondre: « Ce discours ne peut pas aborder toutes les questions et n’a pas l’intention d’anticiper les résultats du synode, qui est le chemin commun de toute l’Église, le chemin d’une écoute attentive réciproque, de l’échange et de la prière. Il se veut plutôt comme une sorte d’ouverture qui conduit vers le thème, dans l’espérance qu’à la fin nous soit donnée une symphonie, c’est-à-dire un ensemble harmonique de toutes les voix de l’Église, y compris de celles qui sont peut-être dissonantes : pratiquement, ce discours est une contribution à la réflexion des cardinaux qui se situe dans le cheminement plus ample de toute l’Église en marche vers les prochains synodes, pour chercher des réponses harmoniques et crédibles sur ces sujets de la pastorale de la famille dans le monde d’aujourd’hui.»
Le cardinal nommé Capovilla, applaudi
Le P. Lombardi a mentionné le cardinal nommé de 98 ans, Mgr Loris Capovilla, ancien secrétaire du bienheureux Jean XXIII: « il y a eu aussi une belle pensée pour Mgr Capovilla qui, malheureusement, n’est pas présent et qui est le plus âgé et dont le nom n’est pas indiqué sur la liste des « visites de courtoisie » parce qu’il ne viendra pas. Toutefois, il est très présent dans l’esprit du consistoire et nous l’aimons tous beaucoup. Et donc, on a cité Capovilla et il a été très applaudi par l’assemblée.»