La Prière Eucharistique (11)

« Avec la puissance de l’Esprit Saint »

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La Prière Eucharistique (11)

« avec la puissance de l’Esprit Saint »

Comme toutes les autres, la Prière Eucharistique III s’adresse au Père. Mais, parce que c’est une prière chrétienne, elle est forcément trinitaire. Cette dimension est plus ou moins mise en valeur selon les Prières. Elle l’est toujours, au minimum, dans la doxologie finale : « Par lui (le Fils), à Toi (le Père), dans l’unité du Saint-Esprit… »

Dans la Prière III, l’Esprit est nommé à trois reprises. La première fois quand la Prière dit que toutes choses ont été « sanctifiées par Jésus-Christ, notre Seigneur, avec la puissance de l’Esprit Saint ».

L’Esprit Saint à l’œuvre dans la Création

Au tout début du livre de la Genèse, il est dit que « le souffle de Dieu planait au-dessus des eaux ». « Souffle » ou « esprit », c’est le même mot aussi bien en hébreu qu’en grec. Quand est composé le chapitre 1 du livre de la Genèse, il n’est évidemment pas question de l’Esprit Saint, troisième Personne de la Trinité. Mais quand celui-ci a été révélé et promis par le Christ, les Pères de l’Eglise n’ont pas hésité à voir dans le verset de la Genèse une annonce lointaine de cette révélation.

Les Pères n’avaient pas tort : le Père, le Fils et l’Esprit étant inséparables, ce dernier ne peut être absent de l’œuvre de Création. Il est continûment présent à la Création du monde, comme, depuis la Pentecôte, il est présent à la vie de l’Eglise, sacrement du monde nouveau.

La mention de l’Esprit Saint à ce moment de la Prière Eucharistique est une invitation à ne pas séparer Création et Salut, comme si la première était l’œuvre du Père, seul, ou, pire encore, d’un Dieu impersonnel. L’unité entre la Création et le Salut était un des thèmes chers au pape Benoît XVI. Sur cette unité s’appuie la possibilité d’un dialogue entre la raison et la foi.

L’Esprit du Christ

L’Esprit Saint est mentionné après le « Fils, Jésus Christ, notre Seigneur ». Cet ordre est normal, puisque c’est le Christ qui révèle et transmet l’Esprit. Mais, plus qu’une succession, il faut voir la « complicité » qui les unit. Le mot « complicité » a pris une couleur criminelle. Mais il est beau de l’entendre dans son sens primitif : le Christ et l’Esprit sont unis dans la même œuvre.

Le prophète Isaïe avait promis que l’Esprit du Seigneur reposerait sur le Messie, le Christ (11, 2 ; 61, 1). Effectivement, lors du Baptême, l’Esprit se manifeste sous la forme d’une colombe : une colombe, comme après le déluge, quand Dieu confirme sa volonté créatrice. Immédiatement après, dit saint Marc, l’Esprit emmène Jésus au désert pour l’épreuve de la Tentation. Un chant de Carême nous le rappelle :  

Seigneur, avec toi, nous irons au désert,
poussés comme toi par l’Esprit.

Après sa victoire sur le Tentateur, « Jésus retourna en Galilée, avec la puissance de l’Esprit » (Luc 4, 14) et, dans saint Matthieu, Jésus lui-même rétorque aux sceptiques : « C’est par l’Esprit de Dieu que j’expulse les démons » (12, 28).

Une remarque au passage : dans le récit parallèle de saint Luc (11, 20), Jésus dit que c’est « par le doigt de Dieu » qu’il expulse les démons. C’est ainsi que, dans le Veni Creator, l’Esprit Saint est appelé le « doigt de la droite du Père », digitus paternae dexterae.

Dans saint Jean aussi, l’Esprit et le Christ sont intimement liés. A son Envoyé (c’est un des noms de Jésus dans saint Jean), « Dieu donne l’Esprit sans mesure » (3, 34) ; il le marque de son sceau (6, 27).

Les quatre évangélistes, chacun à sa façon, associent étroitement Jésus et l’Esprit Saint. Saint Paul, dans l’épître aux Romains, nous permet d’aller plus loin, si l’on peut dire, en se référant à la résurrection. Dans l’exorde solennelle de l’épître, il parle du « descendant de David », qui, « selon l’Esprit de sainteté, a été établi dans sa puissance de Fils de Dieu, par sa résurrection d’entre les morts, lui, Jésus Christ, notre Seigneur » (1, 3-4). Le lien entre la Seigneurie du Christ, la résurrection d’entre les morts et l’Esprit Saint se retrouve en Romains 8, 10-11, 39.

Il n’est donc pas étonnant que la Prière III nomme l’Esprit Saint après avoir décliné le titre complet de Jésus comme « Christ » et comme « Seigneur ». C’est la finale du discours de Pierre à la Pentecôte : « Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous aviez crucifié » (Actes 2, 36).

La puissance de l’Esprit

Ordinairement, la puissance est attribuée au Père « Tout-Puissant ». Il faut un peu de culture biblique pour comprendre que, dès l’Ancien Testament, la toute-puissance n’est pas à confondre avec la tyrannie et l’arbitraire. Dieu manifeste sa puissance en libérant son Peuple de l’esclavage, en le sauvant. La collecte du 26ème dimanche du Temps ordinaire est profondément biblique en disant que Dieu « donne la preuve suprême de sa puissance lorsqu’il patiente et prend pitié ».

Dans le texte de Luc 4, 14, déjà cité, la puissance est attribuée à l’Esprit. De même, si Jésus est capable d’expulser les démons par l’Esprit de Dieu, c’est bien parce que l’Esprit est puissant : le contexte de Matthieu 12, 28 est celui d’une épreuve de force.

Dans les évangiles, les paroles sur l’Esprit Saint ne sont pas innombrables. Mais, quand Jésus promet sa venue, c’est toujours dans la perspective des combats que ses disciples auront à mener jusqu’à la fin des temps. L’Esprit Saint est le Paraclet, le Défenseur. Parmi ses dons, figure la force (Isaïe 11, 2).

La résurrection du Christ, œuvre trinitaire et donc œuvre de l’Esprit Saint, est le signe précurseur et prometteur de la résurrection finale : Dieu y mettra en œuvre toute sa puissance. L’Eucharistie est le gage de cette victoire définitive.

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Jacques Perrier

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