Le Saint-Siège encourage le recrutement des femmes dans le personnel diplomatique international, non pas pour être « politiquement correct » mais par nécessité.
Mgr Bernardito Auza, nonce apostolique et observateur permanent du Saint-Siège auprès du Conseil de sécurité des Nations unies, est en effet intervenu lors du « Débat ouvert sur l’Examen de haut niveau de la Résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité ».
« Le rôle des femmes pour la paix et la sécurité » est une « contribution essentielle » pour « épargner à notre monde de nouveaux fléaux de guerre et de violence », a déclaré Mgr Auza.
Voici notre traduction intégrale de l’intervention de Mgr Bernardito Auza à New York.
A.B.
Déclaration de Mgr Bernardito Auza
Monsieur le Président,
Ma délégation tient à féliciter l’Espagne pour sa présidence au Conseil de sécurité ce mois-ci et pour avoir organisé ce Débat ouvert et cet Examen de haut niveau de la Résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, qui sont particulièrement importants.
La Résolution 1325 du Conseil de sécurité est historique car, pour la première fois, elle établit un lien entre les femmes, les conflits armés, la paix et la sécurité. Elle reconnaît aussi que les femmes et les enfants sont touchés par les conflits armés différemment mais plus durement, et que les femmes jouent un rôle irremplaçable dans le maintien et la promotion de la paix et de la sécurité.
Compte tenu du nombre, de l’intensité et de la nature changeante des conflits actuels, l’Examen de haut niveau et l’Étude mondiale sont extrêmement pertinents. En moins d’une décennie, le nombre de grands conflits violents a presque triplé. Les liens entre désastres naturels, crises humanitaires et conflits sont de plus en plus visibles. L’extrémisme et le terrorisme violents dans de nombreuses parties du monde, en particulier au Moyen-Orient et dans certaines parties de l’Afrique, ont amené la violence à de nouveaux niveaux de sauvagerie contre les civils et contre le patrimoine culturel et religieux.
Des femmes et des filles sont prises dans ces situations de conflits et sont soumises aux viols, aux agressions sexuelles, à la torture, aux trafics humains, aux mariages forcés et aux conversions religieuses forcées ; elles sont achetées et vendues, ou même données en cadeau ou comme trophées aux combattants terroristes.
Ma délégation est particulièrement consternée par les actes de violence sexuelle utilisés comme stratégie de guerre, visant à déshumaniser et démoraliser les femmes, les filles et leurs familles. Ces attaques ont des effets traumatisants à long terme, et même à vie, à la fois physiquement et psychologiquement et, dans de nombreux cas, les victimes de violences sexuelles sont exclues de leurs propres famille et communauté, ou lourdement stigmatisées. En outre, ces crimes font aussi du tort aux plus jeunes générations car les femmes sont le plus souvent les premiers éducateurs, soignants et soutiens de famille.
De telles réalités sont accablantes. Comme l’a dit le pape François dans son discours à l’Assemblée générale, elles « doivent constituer un sérieux appel à un examen de conscience de la part de ceux qui sont en charge de la conduite des affaires internationales » (ONU, New York, 25 septembre 2015).
Pour sa part, l’Église est présente et anime un réseau d’institutions dans la plupart des zones de conflits. Des organisations et des agences catholiques répondent rapidement et efficacement aux besoins créés par la violence sur les femmes et les filles, en leur fournissant les soins de santé essentiels et un soutien. Elles organisent des programmes visant à prévenir ces violences et à assurer la dignité des femmes et leur rôle effectif dans la société, en promouvant la pacification et la réconciliation tout en affrontant les causes plus profondes de la violence contre les femmes et les filles. Elles gèrent des programmes spéciaux destinés à lutter contre la stigmatisation des victimes de la violence sexuelle et à les réintégrer dans leur famille et leur communauté locale. À la fois comme un moyen de prévenir les conflits et d’assurer la paix, elles encouragent les parents à envoyer leurs filles à l’école, formant les femmes à prendre des responsabilités dans leur communauté et à assumer des rôles décisionnels.
À propos des efforts de mise en œuvre de la Résolution 1325, ma délégation est fermement opposée à l’idée émise selon laquelle le rétablissement et la réhabilitation incluent l’avortement, une approche qui, une fois encore, néglige d’aborder certaines des causes réelles de la violence tout en faisant payer le prix fort aux plus démunis.
Il n’y a pas de doute que beaucoup reste encore à faire pour répondre aux immenses besoins de manière satisfaisante. Nous devons donc faire davantage et agir plus rapidement parce qu’il n’est plus possible de ne pas entendre, de ne pas voir, d’ignorer les crimes contre les femmes et les filles – nos mères, nos sœurs, et nos filles – ni de les considérer comme une conséquence inévitable dans l’horrible réalité du confit armé.
Monsieur le Président,
Ma délégation encourage les Nations unies et les États membres à recruter davantage de femmes pour la diplomatie préventive, les efforts de médiation, les missions de maintien de la paix et les processus de construction de la paix. Les femmes apportent des contributions décisives spécifiques et opportunes, nécessaires dans des domaines aussi critiques, aidant à favoriser de bonnes relations avec les communautés locales et à bâtir la confiance parmi les parties en conflit, des éléments qui sont essentiels aux succès de tout effort diplomatique ou résolution de conflit.
Le rôle des femmes pour la paix et la sécurité ne devrait pas être considéré comme une réflexion après coup ni simplement comme quelque chose de politiquement correct ; c’est une contribution essentielle à tous nos efforts pour épargner à notre monde de nouveaux fléaux de guerre et de violence.
Monsieur le Président, je vous remercie.
© Traduction de Zenit, Constance Roques