Cardinal Parolin © capture de Zenit / Vatican News

Cardinal Parolin © capture de Zenit / ASB / Vatican News

Rapport McCarrick: « Les blessures que l’affaire a causées aux victimes », par le card. Parolin

Une « reconstitution des processus décisionnels »

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« C’est avec douleur que nous publions ce Rapport en raison des blessures que l’affaire a causées aux victimes, à leurs familles, à l’Église des États-Unis, à l’Église universelle », écrit le cardinal secrétaire d’Etat Pietro Parolin, dans une lettre accompagnant la publication, ce mardi 10 novembre 2020, du « Rapport McCarrick » de 460 pages sur les étapes de l’ascension et de la destitution de l’ancien archevêque de Washington, privé de sa dignité d’archevêque et de cardinal par le pape François en 2018 et renvoyé de l’état clérical en 2019. Une synthèse de 14 pages a été publiée en anglais et en italien.

Le cardinal Parolin cite le pape François: « « Considérant le passé, ce que l’on peut faire pour demander pardon et réparation du dommage causé ne sera jamais suffisant », a écrit le Saint-Père dans sa Lettre au Peuple de Dieu, en ajoutant: « Considérant l’avenir, rien ne doit être négligé pour promouvoir une culture capable non seulement de faire en sorte que de telles situations ne se reproduisent pas mais encore que celles-ci ne puissent trouver de terrains propices pour être dissimulées et perpétuées. La douleur des victimes et de leurs familles est aussi notre douleur ; pour cette raison, il est urgent de réaffirmer une fois encore notre engagement pour garantir la protection des mineurs et des adultes vulnérables ». »

Faute d’un témoignage crédible, Theodor McCarrick n’avait pas été poursuivi et même l’enquête demandée sous le pontificat de Benoît XVI au nonce Carlo Maria Vigano’ n’a pas été faite, indique le Rapport.

Le cardinal Parolin rend hommage au témoignage des victimes: « Les témoignages des victimes contenus dans les Acta sur lesquels se fonde le Rapport et qui sont déposés dans les archives du Saint-Siège. Leur contribution a été fondamentale. »

Auparavant, McCarrick avait réussi à berner pendant des décennies les sommets de la hiérarchie de l’Eglise catholique et les rouages internes du Saint-Siège. Autant de failles révélées par l’affaire et prises en compte dans la réforme du pape François, souligne le secrétaire d’Etat. Le Rapport offre en effet un historique des « processus décisionnels ».

Et le cardinal Parolin signale les réformes déjà mises en oeuvre par le pape François.

La publication du rapport vise aussi à rendre « tous les acteurs de ces choix plus conscients du poids de leurs décisions ou des omissions », souligne-t-il.

Voici la traduction rapide, de travail, de la lettre du cardinal Parolin.

AB

Lettre du cardinal Parolin

C’est aujourd’hui qu’est publié le Rapport sur la connaissance institutionnelle et le processus décisionnel du Saint-Siège concernant l’ancien cardinal Théodore Edgar McCarrick, que la Secrétairerie d’État a élaboré sur mandat du Pape.

Il s’agit d’un texte dense, qui a nécessité un examen minutieux de toute la documentation pertinente des archives du Saint-Siège, de la nonciature à Washington et des diocèses des États-Unis impliqués à différents titres.

A l’enquête complexe ont été également intégrées les informations obtenues lors des entretiens avec des témoins et des personnes informées des faits, afin d’obtenir un tableau aussi complet que possible ainsi qu’une connaissance plus détaillée et plus précise des informations importantes.

C’est avec douleur que nous publions ce Rapport en raison des blessures que l’affaire a causées aux victimes, à leurs familles, à l’Église des États-Unis, à l’Église universelle. Tout comme le Pape, j’ai pu consulter moi aussi les témoignages des victimes contenus dans les Acta sur lesquels se fonde le Rapport et qui sont déposés dans les archives du Saint-Siège. Leur contribution a été fondamentale.

Dans sa Lettre au Peuple de Dieu d’août 2018, le Saint Père François écrivait, au sujet des abus sur mineurs : « Avec honte et repentir, en tant que communauté ecclésiale, nous reconnaissons que nous n’avons pas su être là où nous le devions, que nous n’avons pas agi en temps voulu en reconnaissant l’ampleur et la gravité du dommage qui était infligé à tant de vies. »

Comme le montre la taille du rapport, la quantité de documents et d’informations qu’il contient, la recherche de la vérité a été poursuivie en offrant des éléments utiles pour répondre aux questions soulevées par l’affaire. L’enquête, comme nous le savons, a nécessité deux ans de travail et maintenant que le texte est du domaine public, on comprendra pourquoi ce délai a été aussi long.

L’invitation que j’ose adresser à quiconque cherche des réponses est de lire le document dans son intégralité et de ne pas imaginer qu’il pourrait trouver la vérité dans une partie plutôt que dans une autre. Ce n’est qu’à partir de la vision globale et de la connaissance, dans leur intégralité, de ce qui a été reconstitué des processus décisionnels qui ont concerné l’ancien cardinal McCarrick, qu’il sera possible de comprendre ce qui s’est passé.

Au cours des deux dernières années, pendant qu’était en cours l’enquête qui a abouti à ce rapport, nous avons fait des avancées significatives pour assurer une plus grande attention à la protection des mineurs et des interventions plus efficaces pour éviter que certains choix faits par le passé puissent se répéter. La norme canonique a été enrichie par le Motu proprio Vos estis lux mundi, qui prévoit la création de mécanismes stables pour recevoir des signalements d’abus et établit une procédure claire pour examiner les plaintes contre des évêques qui ont commis des crimes ou qui ont protégé les responsables des crimes.

Et au Motu proprio s’ajoutent les instruments créés suite à la Rencontre de février 2019 sur la protection des mineurs. Je pense, par exemple, à l’intervention, en décembre dernier, sur le secret pontifical en relation aux plaintes, aux procès et aux décisions concernant les cas d’abus de mineurs et de personnes vulnérables ; et sur les cas de non dénonciation ou de dissimulation des abuseurs. Et je pense aussi à la publication du Vademecum sur les procédures de traitement des cas d’abus sur mineurs, publié en juillet dernier par la Congrégation pour la doctrine de la foi.

« Considérant le passé, ce que l’on peut faire pour demander pardon et réparation du dommage causé ne sera jamais suffisant », a écrit le Saint-Père dans sa Lettre au Peuple de Dieu, en ajoutant: « Considérant l’avenir, rien ne doit être négligé pour promouvoir une culture capable non seulement de faire en sorte que de telles situations ne se reproduisent pas mais encore que celles-ci ne puissent trouver de terrains propices pour être dissimulées et perpétuées. La douleur des victimes et de leurs familles est aussi notre douleur ; pour cette raison, il est urgent de réaffirmer une fois encore notre engagement pour garantir la protection des mineurs et des adultes vulnérables ».

À la lecture du document, il apparaîtra que toutes les procédures, y compris la nomination des évêques, dépendent de l’engagement et de l’honnêteté des personnes concernées. Aucune procédure, même la plus perfectionnée, n’est exempte d’erreur car elle fait appel aux consciences et aux décisions des hommes et des femmes. Mais le Rapport aura là aussi des effets : en rendant tous les acteurs de ces choix plus conscients du poids de leurs décisions ou des omissions. Ce sont des pages qui nous poussent vers une réflexion profonde et à nous demander ce que nous pouvons faire de plus à l’avenir, en tirant les leçons des expériences douloureuses du passé.

Je voudrais conclure en disant que la douleur s’accompagne d’un regard d’espérance. Afin que ces phénomènes ne se répètent pas, à côté de normes plus efficaces, nous avons besoin d’une conversion des cœurs. Nous avons besoin de pasteurs crédibles, hérauts de l’Évangile, et nous devons tous être bien conscients que cela n’est possible qu’avec la grâce de l’Esprit Saint, confiants dans les paroles de Jésus : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire ».

Traduction de travail du Saint-Siège 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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