ROME, Vendredi 27 octobre 2006 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile de ce dimanche, proposé par le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.
Evangile de Jésus Christ selon saint Marc 10, 46-52
Jésus et ses disciples arrivent à Jéricho. Et tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, un mendiant aveugle, Bartimée, le fils de Timée, était assis au bord de la route. Apprenant que c’était Jésus de Nazareth, il se mit à crier : « Jésus, fils de David, aie pitié de moi ! » Beaucoup de gens l’interpellaient vivement pour le faire taire, mais il criait de plus belle : « Fils de David, aie pitié de moi ! » Jésus s’arrête et dit : « Appelez-le. » On appelle donc l’aveugle, et on lui dit : « Confiance, lève-toi ; il t’appelle. » L’aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus. Jésus lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? — Rabbouni, que je voie. » Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t’a sauvé. » Aussitôt l’homme se mit à voir, et il suivait Jésus sur la route.
© AELF
Pris parmi les hommes, et chargé d’intervenir en faveur des hommes
L’Evangile raconte la guérison de l’aveugle de Jéricho, Bartimée. Bartimée ne laisse pas perdre l’occasion. Il a entendu que Jésus passait. Il a compris que c’était l’occasion de sa vie et a agi avec promptitude. La réaction des personnes présentes (qui « l’interpellaient vivement pour le faire taire ») souligne la prétention inavouée des « personnes aisées » de tous les temps que la misère reste cachée, qu’elle ne se montre pas, qu’elle ne dérange pas la vue et le sommeil de ceux qui vont bien.
Le terme « aveugle » s’est chargé de tant de sens négatifs qu’il est juste de le réserver, comme on tend aujourd’hui à le faire, à la cécité morale de l’ignorance et de l’insensibilité. Bartimée n’est pas aveugle, il est seulement non-voyant. Avec le cœur, il voit mieux que de nombreuses personnes autour de lui, car il a la foi et l’espérance. C’est d’ailleurs cette vision intérieure de la foi qui l’aide à retrouver également la vision extérieure des choses. « Ta foi t’a sauvé », lui dit Jésus.
Je m’arrête là dans l’explication de l’Evangile car je souhaiterais développer un thème présent dans la deuxième lecture de ce dimanche, concernant la figure et le rôle du prêtre. On dit tout d’abord du prêtre qu’il est « pris parmi les hommes ». Il ne s’agit donc pas d’un être déraciné ou tombé du ciel, mais d’un être humain qui a derrière lui une famille et une histoire comme tous les autres. « Pris parmi les hommes » signifie également que le prêtre est fait de la même pâte que toute autre créature humaine : avec les désirs, les liens d’affection, les combats, les hésitations et les faiblesses de tous. L’Ecriture voit là un avantage pour les autres hommes et non un motif de scandale. Il sera ainsi en effet mieux préparé pour éprouver de la compassion, étant lui-même revêtu de faiblesse.
« Pris parmi les hommes », le prêtre est ensuite « chargé d’intervenir en faveur des hommes », c’est-à-dire redonné aux hommes, mis à leur service. Un service qui touche la dimension la plus profonde de l’homme, son destin éternel. Saint Paul résume le ministère sacerdotal par une phrase : « Il faut donc que l’on nous regarde seulement comme les serviteurs du Christ et les intendants des mystères de Dieu » (1 Co 4, 1). Cela ne signifie pas que le prêtre ne s’intéresse pas aux nécessités également humaines des personnes, mais qu’il s’occupe de ces nécessités, avec un esprit différent de celui des sociologues et des personnes engagées en politique. La paroisse est souvent le point de rencontre le plus important, social également, dans la vie d’un pays ou d’un quartier.
Nous venons de tracer une vision positive de la figure du prêtre. Nous savons qu’il n’en est pas toujours ainsi. De temps à autre les médias nous rappellent qu’il existe une autre réalité, faite de faiblesse et d’infidélité… L’Eglise ne peut que demander pardon pour cela. Il faut cependant rappeler une vérité, qui réconfortera au moins en partie les personnes. En tant qu’homme, le prêtre peut faire des erreurs, mais les gestes qu’il accomplit en tant que prêtre, à l’autel ou dans le confessionnal, ne sont pas pour cela invalides ou inefficaces. Le peuple n’est pas privé de la grâce de Dieu à cause de l’indignité du prêtre. C’est le Christ en effet qui baptise, célèbre, pardonne ; lui est seulement l’instrument.
J’aimerais rappeler à ce sujet, les paroles que prononce le « Curé de campagne » de Bernanos, avant de mourir : « Tout est grâce ». La misère de son alcoolisme lui apparaît également comme une grâce, car elle l’a rendu plus miséricordieux envers les personnes. Dieu ne tient pas tant à ce que ses représentants sur la terre soient parfaits, mais il tient à ce qu’ils soient miséricordieux.