Le pape François invite les baptisés à se « laisser provoquer par Dieu », et ainsi à être « prophétiques ».
Dans un billet spirituel sous forme de tweet posté sur son compte @Pontifex_fr, le pape François écrit en effet: « La prophétie naît lorsqu’on se laisse provoquer par Dieu ».
Il ajoute immédiatement cet avertissement anti-zone-de-confort: et « non pas quand on gère sa tranquillité et qu’on contrôle tout. »
Secoué de l’intérieur
C’est un passage de son homélie pour la fête des saints apôtres Pierre et Paul, le 29 juin dernier. Le pape confiait: « Ça me fait mal lorsque j’entends proclamer : “Nous voulons une Eglise prophétique”. Bien. Que fais-tu, pour que l’Eglise soit prophétique ? Il faut des vies qui manifestent le miracle de l’amour de Dieu. Non de puissance, mais de cohérence. Non de paroles, mais de prière. Non de proclamations, mais de service… Non de théories, mais de témoignage. »
Il donnait l’exemple de Pierre et de Paul: « Nos Apôtres ont été provoqué par Jésus. Pierre s’est entendu demander : « Toi, qui dis-tu que je suis » (cf. Mt 16, 15). A ce moment il a compris que les opinions générales n’intéressent pas le Seigneur, mais le choix personnel de le suivre. De même la vie de Paul a changé après une provocation de Jésus : « Saul, Saul, pourquoi me persécuter ? » (Ac 9, 4). »
Plus encore « provoquer », pour le pape, c’est « secouer de l’intérieur »: « Le Seigneur l’a secoué du dedans : plus que de le faire tomber à terre sur le chemin de Damas, il a fait tomber sa présomption d’homme religieux et respectable. Ainsi le Saul fier est devenu Paul : Paul qui signifie « petit ». Après ces provocations, après ces retournements de vie suivent les prophéties : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise » (Mt 16, 18) ; et à Paul : « Cet homme est l’instrument que j’ai choisi pour faire parvenir mon nom auprès des nations » (Ac 9, 15). »
L’Evangile renverse les certitudes
Et voici le passage que le pape reprend dans le tweet de ce 23 juillet: « Donc, la prophétie naît lorsqu’on se laisse provoquer par Dieu : non pas quand on gère sa tranquillité et qu’on contrôle tout. Elle ne naît pas de mes pensées, elle ne naît pas de mon cœur fermé. Elle naît si nous nous laissons provoquer par Dieu. Quand l’Evangile renverse les certitudes, la prophétie jaillit. »
Le pape invitait à « s’ouvrir » à ce Dieu qui « provoque »: « Seul, celui qui s’ouvre aux surprises de Dieu devient prophète. Et les voilà Pierre et Paul, des prophètes qui voient plus loin : Pierre qui le premier proclame que Jésus est « le Christ, le Fils du Dieu vivant ! » (Mt 16, 16) ; Paul anticipe la fin de sa vie : « Je n’ai plus qu’à recevoir la couronne de la justice : le Seigneur, le juste juge, me la remettra » (2 Tm 4,8). »
« Aujourd’hui nous avons besoin de prophétie, mais de vraie prophétie : non de beaux parleurs qui promettent l’impossible, mais de témoignages que l’Evangile est possible », a insisté le pape.
Des amoureux de Dieu
Il ne s’agit pas de chercher à être « bien avec tout le monde »: « Nous n’avons pas besoin d’être riches, mais d’aimer les pauvres ; non de gagner pour nous-même, mais de nous dépenser pour les autres ; non du consentement du monde, se sentir bien avec tout le monde – chez nous on dit : “se sentir bien avec Dieu et avec le diable”, se sentir bien avec tout le monde – ; non, ce n’est pas une prophétie. »
Et cette « prophétie » vécue est source de joie intérieure: « Mais nous avons besoin de la joie pour le monde à venir ; non de ces projets pastoraux qui semblent avoir en soi leur efficacité, comme si c’étaient des sacrements, des projets pastoraux efficaces, non, mais nous avons besoin de pasteurs qui offrent leur vie : des amoureux de Dieu. »
3Amoureux » c’est le terme que le pape emploie aussi pour la mission de Pierre et Paul: « Ainsi, Pierre et Paul ont annoncé Jésus, en amoureux. Pierre, avant d’être mis en croix, ne pense pas à lui-même mais à son Seigneur et, se considérant indigne de mourir comme lui, demande d’être crucifié la tête en bas. Paul, avant d’être décapité, pense seulement à donner sa vie et écrit qu’il veut être « offert en sacrifice » (2 Tm 4, 6). »
Changer l’histoire
Voilà pour le pape ce qui est « prophétie »: « Non des paroles. Voilà la prophétie, la prophétie qui change l’histoire. »
Le pape lui-même a terminé son homélie par une provocation: « Il y a toujours ceux qui détruisent l’unité et éteignent la prophétie, mais le Seigneur croit en nous et il te demande : « Toi, tu veux-tu être bâtisseur d’unité ? Veux-tu être prophète de mon ciel sur la terre ? ». Frères et sœurs, laissons-nous provoquer par Jésus et trouvons le courage de lui dire : « Oui, je le veux ! ». »
En 2016 déjà, par exemple, dans un message pour la Journée mondiale de prière pour les vocations 2017, le pape parlait des jeunes et de la façon dont la parole de Jésus-Christ les « provoque »: « Face à la sensation répandue d’une foi fatiguée ou réduite à de purs ‘‘devoirs à accomplir’’, nos jeunes ont le désir de découvrir l’attrait toujours actuel de la figure de Jésus, de se laisser interroger et provoquer par ses paroles et par ses gestes et, enfin, de rêver, grâce à lui, d’une vie pleinement humaine, joyeuse de se consacrer à l’amour. »