En temps de conflit armé, les enfants et les jeunes sont les premières victimes, a souligné une fois encore Mgr Bernardito Auza. Dénonçant leur participation forcée dans la guerre et le travail des enfants dans les mines, lié à « la ruée vers les minéraux et autres ressources précieuses dans certaines régions d’Afrique », il a invité à « examiner les causes profondes » de cette situation, notamment « les désavantages socio-économiques et l’absence de perspectives » pour les jeunes.
Mgr Auza, nonce apostolique et observateur permanent du Saint-Siège, est intervenu lors du débat public du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés, à New York, le 2 août 2019. « L’éducation à la paix dans la famille et à l’école et le rôle crucial des femmes en tant qu’ “enseignantes de la paix” sont indispensables pour faire face à ces causes profondes », a-t-il déclaré.
Le représentant du Saint-Siège s’est félicité des initiatives des États Membres visant en particulier à « œuvrer à la ratification et à l’application universelles du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés ». Il a enfin souhaité que la communauté internationale n’oublie pas ces enfants souvent « invisibles », « y compris les enfants conçus et mis au monde à la suite de violences sexuelles liées aux conflits », qui « n’ont pas moins de dignité et doivent également être protégés de la violence et de la mort ».
Voici notre traduction intégrale du discours de Mgr Auza.
HG
Discours de Mgr Bernardito Auza
Je voudrais remercier la présidence polonaise d’avoir organisé le débat public de ce jour sur les enfants et les conflits armés.
Monsieur le Président,
Le thème de notre débat d’aujourd’hui devrait nous amener à nous arrêter et à réfléchir : la juxtaposition des enfants et des conflits armés est profondément incongrue mais, comme nous l’entendons à nouveau dans cette Assemblée, c’est la triste réalité pour tant de garçons et de filles dans notre monde dont les jeunes vies sont malheureusement interrompues par des conflits violents. Les enfants qui devraient être libres d’apprendre et de jouer, à mesure qu’ils grandissent dans la connaissance d’eux-mêmes et du monde qui les entoure, sont au contraire victimes de graves violations qui non seulement les privent des joies uniques et irremplaçables de l’enfance, mais qui risquent aussi de causer des dommages physiques, émotionnels, psychologiques et sociaux durables, dont les effets sur leur famille et sur la communauté élargie sont évidents.
Comme le montre de manière dramatique le dernier rapport du Secrétaire général, « en temps de conflit armé, dans le monde entier, des millions de personnes, les enfants en premier, n’ont pas suffisamment accès ou se voient refuser une assistance essentielle à leur survie et à leur bien-être » (1). Il suffit de penser à la ruée vers les minéraux et autres ressources précieuses dans certaines régions d’Afrique, où tant d’enfants et de jeunes abandonnent leurs études pour travailler dans les mines. C’est encore pire lorsque les enfants sont forcés de participer à des guerres qui ne sont pas de leur fait, ou recrutés sous prétexte de pouvoir subvenir aux besoins de leurs familles appauvries. Il est nécessaire d’examiner les causes profondes de cette situation, en particulier comment les désavantages socio-économiques et l’absence de perspectives font trop souvent des conflits armés une alternative pour nos jeunes. Il est également profondément préoccupant que, dans certains cas, la radicalisation et les idéologies extrémistes aient motivé la décision des jeunes d’embrasser des causes néfastes, devenant ainsi eux-mêmes la cause de la destruction et du désespoir dans la vie de tant d’autres. L’éducation à la paix dans la famille et à l’école et le rôle crucial des femmes en tant qu’ « enseignantes de la paix » sont indispensables pour faire face à ces causes profondes.
Monsieur le Président,
Les conflits longs et prolongés, souvent menés en milieu urbain, font souvent des écoles, des centres médicaux et des abris la cible de tirs, ce qui entraîne la destruction partielle ou totale de bâtiments essentiels à la santé, à l’instruction et au bien-être des enfants. Ces attaques aveugles ou disproportionnées sont contraires au droit international et au droit humanitaire international et elles doivent cesser. A cet égard, le pape François a récemment exprimé sa profonde préoccupation pour la vie des enfants victimes des bombardements dans la province d’Idlib en Syrie.
Monsieur le Président,
Le Saint-Siège prend note de l’évolution des Opérations de maintien de la paix des Nations Unies, pour inclure la protection des enfants et la sensibilisation des groupes armés, pour informer et éduquer la population élargie et pour créer une culture de la paix. De nouvelles initiatives témoignent également de la volonté des États Membres de mettre fin aux graves violations commises contre les enfants touchés par les conflits armés et de les prévenir. Il est particulièrement encourageant de constater que ces initiatives visent notamment à œuvrer à la ratification et à l’application universelles du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.
Monsieur le Président,
Ce débat public doit contribuer à éveiller la conscience collective de la communauté internationale pour faire en sorte que ces enfants souvent « invisibles » ne soient pas oubliés, que des efforts accrus soient faits pour la libération des enfants soldats et que les jeunes victimes d’autres violations graves reçoivent le soutien nécessaire à leur réinsertion. Cet appui doit inclure les plus vulnérables, y compris les enfants conçus et mis au monde à la suite de violences sexuelles liées aux conflits. Dans ces circonstances, les enfants n’ont pas moins de dignité et doivent également être protégés de la violence et de la mort.
Je vous remercie de votre aimable attention.
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- S/2019/509, 26 juillet 2019.
Traduction de Zenit, Hélène Ginabat