Dans la matinée du samedi 16 novembre, le pape François a reçu en audience dans la Salle du Consistoire les séminaristes des séminaires de Pampelune, de Saint-Sébastien et de Redemptoris Mater. Les séminaristes étaient accompagnés des évêques de Pampelune et de Saint-Sébastien. Il s’agit d’une des rencontres exclusives que le pape a voulu organiser avec les séminaristes espagnols.
Le pape a commencé par lire une partie du discours, profitant de l’image de la prison et de la rédemption, car l’un des évêques présents est un religieux mercédaire et, dans le passé, l’Ordre se consacrait à la libération des captifs. Après avoir atteint une partie du discours, le pape l’a interrompu et a préféré donner la parole aux séminaristes pour qu’ils posent des questions.
Dans un passé récent, le pape a suivi cette même dynamique lors de ses rencontres successives avec les étudiants des séminaires des principaux diocèses espagnols. Nous vous proposons ci-dessous le texte du discours prononcé par le pape ainsi que la partie qu’il n’a pas prononcée mais qu’il a remise : ***.
Chers évêques,
Chère sœur – c’est la seule -,
Chers frères,
Bonjour, je vous souhaite la bienvenue à vous, séminaristes de Pampelune et de Saint-Sébastien. Votre archevêque était très enthousiaste à l’idée de cette audience et il m’a dit que vous faisiez appel à l’affection que j’ai pour les prisons, afin que je vous accorde également cette audience. Le séminaire n’est pas une prison, c’est un lieu où l’on apprend qu’un prêtre est un homme, un être humain qui veut racheter, comme votre archevêque mercédaire, un rédempteur de captifs ; car un prêtre ne peut être autre chose qu’une image vivante de Jésus, le Rédempteur avec une majuscule.
Cela signifie beaucoup de choses, dont l’une très précise est que nous devons descendre dans les prisons ; les prisons gouvernementales, bien sûr, pour offrir à ceux qui s’y trouvent l’huile de la consolation et le vin de l’espérance, mais aussi toutes ces prisons qui enferment des hommes et des femmes de notre société : les prisons idéologiques, les prisons morales, celles qui créent l’exploitation, le découragement, l’ignorance et l’oubli de Dieu.
Je reviens aux prisons, s’il vous plaît allez dans les prisons, allez, engagez-vous. Depuis que je suis évêque, le jeudi saint, je lave les pieds dans une prison. Ce sont eux qui ont le plus besoin qu’on leur lave les pieds, comme pour leur dire : « regardez, je vous lave les pieds parce que je suis pire que vous, mais j’ai eu la chance de ne pas être pris ».
Je me souviens, dans une salle de lavement des pieds – c’était une prison pour femmes – je l’avais les pieds d’une femme et quand j’allais passer à l’autre, elle m’a pris la main, s’est approchée de mon oreille et m’a dit : « père, j’ai tué mon fils » : les drames intérieurs dans la conscience de ceux qui vivent en prison. Quand vous serez prêtres, allez dans les prisons, c’est une priorité. Et nous pouvons tous dire ce que je ressens : pourquoi eux et pas moi ?
Vous allez recevoir l’onction sacerdotale et c’est pour libérer les captifs, ceux qui sont enchaînés sans s’en rendre compte (cf. Lc 4,18). Enchaînés par tant de choses : par la culture, par la société, par les vices, par les péchés cachés.
Eh bien, vous allez avoir cet écrit. Je le laisse à l’évêque, pour qu’il vous le fasse connaître. Ainsi, je ne perds pas mon temps avec quelque chose que, dans un moment, vous n’écouterez plus. Il vaut mieux poser des questions.
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Deuxième partie du discours remis à l’archevêque
Dans le quatrième chapitre de son Évangile, saint Luc fait une bonne méditation pour la préparation des futurs prêtres, que je vous propose : il nous parle de docilité à l’Esprit, de faire le désert pour trouver Dieu, en nous vidant de tant de choses que nous portons comme des fardeaux. Il nous encourage à ne pas avoir peur d’affronter la tentation d’un ministère idolâtre où nous sommes au centre, en quête de pouvoir matériel ou d’applaudissements.
Le chapitre se poursuit en disant que Jésus s’est rendu à Nazareth, sa patrie, conscient qu’aux yeux du monde, il n’était rien de plus que le fils de Joseph, un homme comme nous. N’oubliez jamais ces racines, n’oubliez pas que vous êtes des enfants du Peuple. Ce texte de Luc nous enseigne également que dans notre apostolat, nous ne pouvons pas faire de distinction entre les personnes, même si elles sont étrangères ou même ennemies, parce que pour Dieu, nous sommes tous ses enfants. Lorsque nous regardons notre frère, reconnaissons en lui sa disponibilité à recevoir la grâce que le Seigneur lui offre.
Dans un autre passage, le Seigneur se plaint avec indignation de la dureté de cœur de ses contemporains qui ne comprennent pas le souci de Jésus de libérer une femme liée par un esprit mauvais depuis de nombreuses années (cf. Lc 13, 16). Vous, au contraire, soyez toujours prêts à bénir, à libérer, et quand vous sentez paralysées les mains qu’Il a ointes, tendez-les avec confiance comme l’infirme de l’Évangile de Marc (cf. 3, 5). C’est ce que Jésus a fait sur la Croix, en gravant notre blessure dans son Cœur et sur son bras, en détruisant par son amour notre mort et en franchissant par sa Passion l’abîme qui nous séparait de Dieu (cf. Cantique des Cantiques 8,6).
Soyez donc courageux, altruistes et infatigables pour apporter la divine miséricorde que le Seigneur a si généreusement répandue sur vous en vous choisissant pour ce ministère. Qu’Il vous bénisse et que la Sainte Vierge veille sur vous.