La résurrection, les femmes au tombeau, Fra Angelico, DP

La résurrection, les femmes au tombeau, Fra Angelico, DP

Le Christ est ressuscité : avec la croix il a ouvert la porte de la mort, avec la résurrection il est avec nous pour toujours, par Mgr Follo

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Méditation sur les lectures du Dimanche de Pâques

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 Dimanche de Pâques – Résurrection du Seigneur – Année A – 9 avril 2023

Ac 10, 34a.37-43 ; Ps 117 ; Col 3, 1-4 ; Jn 20, 1-9

  1. Le christianisme est la religion des vivants

« De tous les jours de l’année, que la liturgie célèbre de diverses manières, il n’y en a pas un qui dépasse en importance la fête de Pâques parce que, dans l’Église de Dieu, elle rend sacrées toutes les autres solennités. Même la naissance du Seigneur est orientée vers ce mystère : le Fils de Dieu n’eut pas d’autre raison de naître que celle d’être cloué à la croix. Dans le sein de la Vierge, en effet, il prit une chair mortelle ; dans cette chair mortelle, fut réalisée entièrement le dessein de la passion ; et ainsi il advint que, par un plan ineffable de la miséricorde de Dieu, celle-ci est devenue pour nous sacrifice rédempteur, abolition du péché et début de résurrection à la vie éternelle » (Saint Léon le Grand, Sermo XLVIII, 1 – P.L. 54, 298 A – 299 A). Il était donc juste et nécessaire que nous nous préparions à Pâques par le chemin (= l’exode) du carême qui nous a rendus encore plus conscients que nous sommes un peuple « constitué par le Christ dans une communion de vie, de charité et de vérité » (Lumen gentium, 9) et pris par lui pour être instrument de la rédemption de toute l’humanité.

Aujourd’hui commence l’exode pascal pour marcher « dans le monde à la recherche de la cité future et permanente (cf. He 13,14) et porter au monde le Christ, auteur du salut et principe d’unité et de paix pour que nous, l’Église, soyons pour tous et pour chacun le sacrement visible de cette unité salvifique » (cf. ibid.).

Qui nous guide sur ce chemin ? Le Christ ressuscité de la mort, une mort à laquelle il avait été condamné de manière absurde, parce qu’il avait dit au monde la vérité et qu’il avait donné l’amour.

Jésus, bon Pasteur, nous guide en utilisant comme crosse, la Croix, sur laquelle il est mort. Sa mort sur la croix parmi les insultes et les mauvais traitements, qu’il a soufferts jusqu’à la mort, fut une mort pour nous, pauvres créatures, pour notre avantage et à notre place. Tandis qu’il subissait la haine des hommes, il prenait sur lui cette haine ; en la leur enlevant et en l’accueillant dans sa miséricorde. Sa mort fut celle de l’amour qui ne meurt pas.

Le Christ, bon Pasteur, non seulement guide ses brebis, mais prend celle qui est perdue sur ses épaules et la ramène à la maison. Serrés contre son corps, nous vivons et en communion avec son Corps, nous atteignons le cœur de Dieu.

Ce cœur infini nous a été révélé par le Christ qui, à travers sa résurrection, révèle que l’amour est plus fort que la mort, plus fort que le mal. La force avec laquelle il nous emporte, serrés sur ses épaules. Unis à son amour, nous montons nous aussi vers la maison du ciel, la demeure de la vie dans l’amour.

Dans le Christ crucifié, la souffrance humaine a un sens parce qu’elle ne vise pas à détruire la vie mais elle sert, pour celui qui sait l’accepter, à la rendre plus intense et plus parfaite : sainte et salvatrice.

La croix n’est pas « scandale » pour les juifs et « folie » pour les Grecs d’il y a deux mille ans ; aujourd’hui aussi, pour beaucoup, elle est « scandale » et « folie ». Mais si nous contemplons avec attention et dévotion le mystère de Pâques, nous comprenons que l’agir « absurde » et « scandaleux » de Dieu a pour raison l’amour gratuit, miséricordieux et tout-puissant de Dieu pour les hommes, qui se manifeste en plénitude et avec puissance sur la croix du Christ. En effet, cette croix a deux faces : l’apparente défaite et la victoire, le Crucifié et le Ressuscité. Dans la croix se révèle toute la méchanceté et la misère de l’homme qui n’hésite pas à condamner le Fils de Dieu innocent, mais se manifestent aussi toute la profondeur et l’efficacité du pardon de Dieu.  

Dans le Christ crucifié et ressuscité, ce n’est pas la haine qui a le dernier mot, mais l’amour. Dans cette charité totale, et non ailleurs, il faut chercher la vraie raison de l’espérance chrétienne, la bonne nouvelle , qui donne du sens et de l’épaisseur à la vie et à l’histoire, en dépit des échecs. Mais c’est une bonne et joyeuse nouvelle qui exige une conversion non seulement à une vie morale bonne mais à la religion de la vraie vie.

Dans cette religion, nous marchons avec le Christ ressuscité qui passe de la mort à la vie et nous passons du sacrifice à la gloire, de l’abnégation à la fécondité, du renoncement à l’amour, de l’amour à la vie. Il n’y a pas d’autre voie qui conduise à la béatitude, à la plénitude complète, à la vie. C’est le chemin tracé par la Résurrection.

2) Le Christ est ressuscité. Il n’est pas ici.

Aux pieuses femmes qui, dès les premières lueurs du jour, étaient allées au tombeau pour embaumer le corps de Jésus, les anges dirent : « Vous cherchez Jésus le Nazaréen, le crucifié. Il est ressuscité, il n’est pas ici ». Ces paroles expriment tout le mystère que nous célébrons aujourd’hui : Jésus le Nazaréen, le crucifié, est ressuscité.

Que veut dire cette affirmation : « Il est ressuscité » ? Cela ne veut pas dire que Jésus mort sur la croix a été réanimé, c’est-à-dire rendu à la vie d’avant, comme par exemple cela s’était produit pour le fils de la veuve de Naïm et pour Lazare, qui furent rappelés de la mort à une vie qui devait ensuite se conclure par une mort définitive. La résurrection de Jésus n’est pas un dépassement de la mort physique que nous connaissons aussi aujourd’hui : dépassement provisoire qui, à un certain moment, se termine par une mort sans retour. Jésus ne revit pas comme un mort réanimé mais, en vertu de la puissance divine, au-delà et en dehors de la zone de ce qui est physiquement et chimiquement mesurable. La puissance de Dieu fait que le corps mort-crucifié de Jésus est rendu participant de la vie divine même : la vie éternelle. Une vie qualitativement différente de celle vécue auparavant.

Pour employer des mots plus concrets (je l’espère, du moins) : le Verbe incarné est introduit, en passant à travers la mort, avec son humanité, dans cette gloire divine dont il jouissait depuis toujours dans sa divinité. Le dernier soir de sa vie terrestre, Jésus avait prié ainsi : « Et maintenant, glorifie-moi auprès de toi, Père, de la gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde existe » (Jn 17,5). Le matin de Pâques, cette prière est exaucée.

  1. Cherchez-le en Galilée, c’est-à-dire parmi les vivants.

Après avoir dit aux pieuses femmes : « Il n’est pas ici, il est ressuscité », les anges ajoutent aussitôt : « Allez en Galilée, là, vous le verrez ». Que veut dire pour nous, aujourd’hui, cette indication d’aller en Galilée. Selon moi, au moins pour nous, « Galilée » n’est pas un lieu géographique, c’est le lieu du cœur, un lieu existentiel.

Nous ne devons pas chercher le Christ dans les tombeaux des défunts, ni parmi les grands personnages poussiéreux du temps que nous appelons l’histoire, encore moins dans les livres et les utopies.

Cherchons-le parmi les vivants, cherchons-le parce que le Christ est le Dieu de la fleur vivante et non des pensées mortes.

Mais pourrait-on me demander : « Comment pouvons-nous être sûrs que les vivants ne nous trompent pas ? » Dans ce cas, je répondrais ceci : « Cherchez-le parmi les vivants dans le Christ, c’est-à-dire dans l’Église ». Cherchons-le parmi ceux qui ont la force et la grâce d’affirmer : « Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons. Oui, la vie s’est manifestée, nous l’avons vue, et nous rendons témoignage : nous vous annonçons la vie éternelle qui était auprès du Père et qui s’est manifestée à nous. Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons à vous aussi, pour que, vous aussi, vous soyez en communion avec nous. Or nous sommes, nous aussi, en communion avec le Père et avec son Fils, Jésus Christ. Et nous écrivons cela, afin que notre joie soit parfaite » (1 Jn 1,1-4).

À la lumière de ce qu’écrit saint Jean, je cherche à donner quelques indications sur où et comment rencontrer Jésus ressuscité.

La première – j’y ai fait allusion ci-dessus – est l’Église, qui devient une expérience concrète dans la communauté chrétienne, où la Parole nous édifie, les sacrements nous sanctifient et nous rendent participants de la vie du Christ.

La seconde est l’usage de la Bible et, en particulier, l’Évangile à comprendre comme le témoignage de qui a rencontré Jésus et qui, par l’action de l’Esprit Saint, a consigné son expérience par écrit dans les quatre Évangiles. L’Évangile est fondamental : il faut le lire, l’étudier, le méditer, le prier, le vivre avec l’aide de l’Esprit Saint et à l’intérieur de l’Église qui, fidèle au long des siècles au témoignage des apôtres, nous le présente dans la liturgie et le met entre nos mains pour qu’il soit notre nourriture de chaque jour.

La troisième façon de rencontrer le Christ, mort et ressuscité, réside dans les sacrements, en particulier l’Eucharistie qui nous met en communion avec le don de Jésus lui-même qui fait de nous son Corps, et la confession grâce à laquelle nous recevons le fruit de la rédemption qui nous vient de la croix du Christ. Ainsi, notre vie se renouvelle avec un cœur purifié et ouvert au Rédempteur et à notre prochain.

La quatrième façon consiste à pratiquer les œuvres de miséricorde matérielle et spirituelle qui nous permettent de percevoir la présence du Christ dans le pauvre, dans le frère qui est dans le besoin. À cet égard, gardons à l’esprit la parabole du jugement final, où Jésus dit : « Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi !”» (Mt 25,35-36). 

4) Témoins de l’amour ressuscité.

Tout chrétien est appelé à être témoin de la résurrection du Christ, surtout dans les environnements humains où l’oubli de Dieu et le désarroi de l’homme sont plus forts, en cultivant dans son cœur l’effort pour demeurer dans l’amour de Dieu, en restant uni à lui et avec les autres . Quelle est alors la spécificité du témoignage des vierges consacrées dans le monde ? Qu’il est possible de vivre exclusivement pour l’amour du Christ. En se donnant complètement à lui, elles vivent aussi un amour d’obéissance au Christ, faisant sa volonté et vivant son amour crucifié. À un certain moment, pour aimer, Jésus est entré dans l’expérience progressive de se vider de lui-même jusqu’à la croix. Si nous voulons aimer en chrétiens, nous devons le savoir et faire comme lui. Cette façon d’aimer met l’Autre avant moi et me fait vivre de son amour de Ressuscité. Oui, l’amour du Christ est un amour ressuscité, un amour qui recommence toujours depuis le début, c’est un amour de Pâques. L’amour du chrétien est lumineux, comme le soleil du matin, c’est un amour qui se reprend, qui ne reste pas tranquille, qui se relève toujours. C’est un amour plein de courage parce que c’est le don ému de soi. L’amour de Jésus est ainsi et il est capable de transformer la tristesse en joie, de rendre le cœur brûlant, de rappeler les Écritures, comme pour les deux disciples d’Emmaüs. L’amour virginal est, d’une manière spéciale, un amour ressuscité. La virginité consacrée témoigne que l’on peut vivre pour Dieu et dans son amour, et annoncer par la parole et par la vie la résurrection du Christ, en témoignant de la communion entre nous et de la charité envers tous, sans exclure personne. De cette façon, les vierges consacrées continuent à répondre positivement à la question que leur pose l’Evêque : « Voulez-vous suivre le Christ selon l’Evangile de telle sorte que votre vie apparaisse comme un témoignage d’amour et le signe du royaume à venir ? »  (cf rituel de consécration des vierges : n°17)

Lecture Patristique

Saint Pierre Chrysologue ( 380 – 450

Sermon 76, 2-3

CCL 24 A, 465-467

L’Ange avait dit aux femmes: Vite, allez dire à ses disciples: Il est ressuscité d’entre les morts; il vous précède en Galilée: c’est là que vous le verrez (Mt 28,7). En disant cela, l’Ange ne s’adressait pas à Marie Madeleine et à l’autre Marie, mais, en ces deux femmes, c’est l’Église qu’il envoyait en mission, c’est l’Épouse que l’Ange envoyait vers l’Époux.

Et tandis qu’elles s’en vont, le Seigneur vient à leur rencontre et les salue en disant: Je vous salue, réjouissez-vous. <> Il avait dit à ses disciples: Ne saluez personne en chemin (Lc 10,4); comment se fait-il que sur le chemin il accoure à la rencontre de ces femmes et les salue si joyeusement? Il n’attend pas d’être reconnu, il ne cherche pas à être identifié, il ne se laisse pas questionner, mais il s’empresse, plein d’élan, vers cette rencontre; il y court avec ardeur et, en les saluant, il abolit lui-même sa propre prescription. Voilà ce que fait la puissance de l’amour: elle est plus forte que tout, elle déborde tout. En saluant l’Église, c’est lui-même que le Christ salue, car il l’a faite sienne, elle est devenue sa chair, elle est devenue son corps, comme l’atteste l’Apôtre: Il est la Tête du Corps, c’est-à-dire l’Église (Col 1,18).

Oui, c’est bien l’Église en sa plénitude que personnifient ces deux femmes; les événements le montrent avec évidence; à ses disciples qui doutent de sa résurrection, le Christ doit apporter des preuves, il doit apaiser leurs craintes, il doit les rappeler à la foi en montrant son côté et les trous des clous, puis en prenant avec eux de la nourriture. Et c’est à juste titre qu’il nomme «enfants» ceux qui étaient si petits dans la foi, lorsqu’il leur demande: Les enfants, auriez-vous quelque chose à manger (Jn 21,5)?

Mais ces femmes, il les trouve déjà parvenues à la maturité de la foi; elles ont dominé leurs faiblesses et elles se hâtent vers le mystère, elles cherchent le Seigneur avec toute la ferveur de leur foi. Aussi méritent-elles qu’il se donne à elles, lorsqu’il va à leur rencontre et leur dit: Je vous salue, réjouissez-vous. Il les laisse non seulement le toucher, mais le saisir à la mesure de leur amour. Comme nous venons de l’entendre dans la proclamation de l’Évangile: Elles s’approchèrent et, lui saisissant les pieds, elles se prosternèrent devant lui (Mt 28,9). Oui, elles saisissent ses pieds, ces femmes qui, dans l’Église, sont les modèles des messagers de la Bonne Nouvelle. Elles ont mérité cette grâce par l’élan de leur course; elles touchent avec tant de foi les pieds du Sauveur qu’il leur est donné d’embrasser la gloire divine.

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Mgr Francesco Follo

Mgr Francesco Follo est ordonné prêtre le 28 juin 1970 puis nommé vicaire de San Marco Evangelista à Casirate d’Adda de 1970 à 1976. Il obtient un doctorat en Philosophie à l’Université pontificale grégorienne en 1984. De 1976 à 1984, il travaille comme journaliste au magazine Letture du Centre San Fedele de la Compagnie de Jésus (jésuites) à Milan. Il devient membre de l’Ordre des journalistes en 1978. En 1982, il occupera le poste de directeur-adjoint de l’hebdomadaire La Vita Cattolica. De 1978 à 1983, il est professeur d’Anthropologie culturelle et de Philosophie à l’Université catholique du Sacré Cœur et à l’Institut Supérieur des Assistant Educateurs à Milan. Entre 1984 à 2002, il travaille au sein de la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège, au Vatican. Pendant cette période il sera professeur d’Histoire de la Philosophie grecque à l’Université pontificale Regina Apostolorum à Rome (1988-1989). En 2002, Mgr Francesco Follo est nommé Observateur permanent du Saint Siège auprès de l’UNESCO et de l’Union Latine et Délégué auprès de l’ICOMOS (Conseil international des Monuments et des Sites). Depuis 2004, Mgr Francesco Follo est également membre du Comité scientifique du magazine Oasis (magazine spécialisé dans le dialogue interculturel et interreligieux). Mgr Francesco Follo est Prélat d’Honneur de Sa Sainteté depuis le 27 mai 2000.

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