Jean-Paul II © L'Osservatore Romano

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« Il ne pourra pas exister d’Europe pacifique sans… »: l’Ukraine, dans la vision de Jean-Paul II

« Merci à toi, Ukraine, qui as défendu l’Europe »

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« Mon souhait est que l’Ukraine puisse s’insérer à plein titre, dans une Europe qui comprenne tout le continent de l’Atlantique à l’Oural »: ces paroles ont été prononcées par Jean-Paul II, le 27 juin 2001, à l’aéroport de Lviv (Ukraine), au terme de son voyage dans le pays.
« Comme je le disais au terme de l’année 1989, a ajouté Jean-Paul II, qui a eu tant d’importance dans l’histoire récente du continent, il ne pourra pas exister « une Europe pacifique faisant rayonner sa civilisation, sans cette osmose et cette communication de valeurs différentes mais complémentaires » qui sont typiques des peuples de l’Est et de l’Ouest (Enseignements de Jean-Paul II, XII/2, 1989, p. 1591.). »
 
Le pape polonais avait des paroles qui ont une résonance spéciale aujourd’hui: « Merci à toi, Ukraine, qui as défendu l’Europe dans ta lutte inlassable et héroïque contre les envahisseurs. »
 
Discours de Jean-Paul II
Monsieur le Président de la République ukrainienne,
Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l’épiscopat,
Mesdames, Messieurs,
Très chers Ukrainiens!
 
1. Le moment du départ est venu. Je vous salue avec émotion, vous qui êtes ici présents, et je salue à travers vous le peuple de l’Ukraine, que j’ai pu mieux connaître au cours de ces journées. Ma pensée s’adresse en particulier aux habitants de la ville de Kiev et de Lviv qui m’ont accueilli, et à ceux qui sont venus d’autres villes et pays pour me rencontrer.
 
A mon arrivée, je me suis senti comme embrassé par l’affection de la ville de Kiev aux coupoles d’or, parsemée de jardins. J’ai ensuite goûté l’hospitalité traditionnelle de Lviv, ville aux nobles monuments si riches de mémoire chrétienne.
 
C’est avec une grande nostalgie que je quitte à présent cette terre, carrefour de peuples et de cultures, au sein de laquelle il y a plus de mille ans l’Evangile a commencé son chemin pour se diffuser et s’enraciner dans le tissu historique et culturel des populations de l’Europe de l’Est. A tous et à chacun de vous je voudrais répéter: merci!
 
2. Merci à toi, Ukraine, qui as défendu l’Europe dans ta lutte inlassable et héroïque contre les envahisseurs.
 
Merci à vous, Autorités civiles et militaires, pour ce que vous accomplissez dans vos domaines respectifs, au service du progrès ordonné du Peuple ukrainien, et merci du généreux dévouement avec lequel vous avez assuré le bon déroulement de mon voyage apostolique.
 
Merci à vous, chers frères et soeurs, qui faites partie de cette communauté chrétienne, « fidèle jusqu’à la mort » (Ap 2, 10). Depuis longtemps je désirais vous manifester mon admiration et ma satisfaction pour le témoignage héroïque que vous avez apporté au cours du long hiver de la persécution au siècle dernier.
 
Merci des prières et de la longue préparation spirituelle avec laquelle vous avez voulu rencontrer le Successeur de Pierre, pour être confirmés par Lui dans la foi et aidés à vivre dans cet amour fraternel qui « excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout » (1 Co 13, 7).
 
Au moment de quitter le sol ukrainien, je désire envoyer un salut respectueux et cordial aux frères et soeurs de la vénérable Eglise orthodoxe et à leurs pasteurs.
 
J’accompagne chacun de ma prière et, comme voeu, j’adresse à tous les paroles de bénédiction de l’Apôtre Paul aux chrétiens de Thessalonique: « Que le Seigneur de la paix vous donne lui-même la paix en tout temps et de toute manière » (2 Th 3, 16).
 
3. Que le Seigneur t’accorde la paix, peuple ukrainien; toi qui, ayant finalement recouvré la liberté avec un dévouement tenace et unanime, as commencé une oeuvre de redécouverte de tes racines les plus authentiques et qui t’es engagé sur un chemin difficile de réformes, pour donner à tous la possibilité de vivre et d’exprimer sa foi, sa culture et ses convictions dans un cadre de liberté et de justice.
 
Voit l’avenir avec confiance, même si les cicatrices des terribles blessures subies au cours des interminables années d’oppression, de dictature et de totalitarisme, lors desquelles les droits des peuples on été niés et piétinés, sont encore douloureuses. C’est le moment propice! C’est le moment de l’espérance et de l’audace!
 
Mon souhait est que l’Ukraine puisse s’insérer à plein titre, dans une Europe qui comprenne tout le continent de l’Atlantique à l’Oural. Comme je le disais au terme de l’année 1989, qui a eu tant d’importance dans l’histoire récente du continent, il ne pourra pas exister « une Europe pacifique faisant rayonner sa civilisation, sans cette osmose et cette communication de valeurs différentes mais complémentaires » qui sont typiques des peuples de l’Est et de l’Ouest (Enseignements de Jean-Paul II, XII/2, 1989, p. 1591.).
 
4. Au cours de cet important changement d’époque l’Eglise, consciente de sa mission, ne manquera pas d’exhorter ses fidèles à coopérer activement avec l’Etat à la promotion du bien commun. Il existe en effet une charité sociale, qui se traduit en « service de la culture, de la politique, de l’économie, de la famille, pour que partout soient respectés les principes fondamentaux dont dépendent les destinés de l’être humain et l’avenir de la civilisation » (Novo millennio ineunte, n. 51).
 
Les chrétiens savent qu’ils font de plein droit partie intégrante de la nation ukrainienne. Ils lui appartiennent en vertu d’une histoire millénaire, qui a commencé avec le baptême de la Rus’ de Kiev, en 988, dans les eaux du fleuve Dniepr; mais ils lui appartiennent surtout aujourd’hui, en vertu du baptême de sang qu’ils ont reçu lors des terribles persécutions du XXème siècle: au cours de ces années les témoins de la foi ont été très nombreux, non seulement des catholiques mais également des orthodoxes et des réformés, qui par amour du Christ ont affronté des privations de tout ordre, allant dans de nombreux cas jusqu’au sacrifice de leur vie.
 
5. L’unité et la concorde! Voilà le secret de la paix et la condition d’un progrès social véritable et stable. C’est grâce à cette synergie d’intentions et d’actions que l’Ukraine, patrie de foi et de dialogue, pourra voir sa dignité reconnue dans le concert des nations.
 
L’avertissement solennel de votre grand poète Taras Shevchenko me revient à l’esprit: « Ce n’est que dans ta maison que tu trouveras la vérité, la force et la liberté ». Ukrainiens, c’est dans le terrain fécond de vos traditions que plongent les racines de votre avenir! Ensemble vous pouvez le construire; ensemble vous pouvez affronter les défis de l’heure présente, animés par les idéaux communs qui constituent le patrimoine éternel de votre histoire passée et récente. La mission est commune; que l’engagement pris par tout le peuple de l’Ukraine soit également commun!
 
Terre d’Ukraine, je te renouvelle mes voeux de prospérité et de paix. Tu laisses dans mon coeur des souvenirs inoubliables! Au revoir, peuple ami, que j’embrasse avec sympathie et affection! Merci de l’accueil cordial et de l’hospitalité que je n’oublierai jamais!
 
Au revoir, Ukraine! Je fais miennes les paroles de ton grand poète et j’invoque de « Dieu fort et juste » toutes ses bénédictions pour les enfants de ta terre, « cent fois ensanglantée, autrefois terre glorieuse ». Très chers frères et soeurs, moi aussi je dis avec votre poète et avec vous: Que Dieu te protège toujours « ô ma sainte patrie! ».
 
Je demande à Dieu tout-puissant de te bénir, ô peuple ukrainien, et de guérir toutes tes blessures. Que son grand amour comble ton coeur et te guide dans le troisième millénaire chrétien vers un nouvel avenir d’espérance. Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit.
 
© Librairie éditrice vaticane
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Rédaction

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