MM. Antonio Zanardi Landi et Alexandre Avdeïev, juin 2017 © L'Osservatore Romano

MM. Antonio Zanardi Landi et Alexandre Avdeïev, juin 2017 © L'Osservatore Romano

Le pape François à l’ambassade de la Fédération de Russie près le Saint-Siège

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Une démarche diplomatique et pastorale inédite

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Le pape François s’est rendu, malgré une « gonalgie aiguë, à l’ambassade la Fédération de Russie près le Saint-Siège, ce vendredi matin, 25 février 2022, confirme le Saint-Siège: une démarche inédite et humble pour un pape – chef d’Etat – de se rendre à une ambassade, c’est dire l’urgence ressentie par François. La nouvelle fait la Une de L’Osservatore Romano en italien du 26 février, avec une photo de la guerre.

Le pape est resté un peu plus d’une demi heure au numéro 10 de la rue de la Conciliation, où il est arrivé en FIAT 500L blanche. L’ambassade est au premier étage – avec ascenseur -. Le pape s’est entretenu avec l’ambassadeur, M. Alexandre Alexeïevitch Avdeïev: selon le Saint-Siège, « le Pape a voulu exprimer sa préoccupation concernant la guerre en Ukraine », après l’arrivée des troupes russes en Ukraine à l’aube, hier, jeudi, 24 février.

M. Avdeïev, 75 ans, est ambassadeur près le Saint-Siège depuis le 11 janvier 2013: il connaît bien le pape François, élu en mars 2013. Il a aussi été ambassadeur en France entre 2002 et 2008 et Ministre de la culture (2008-2012).

L’ambassadeur a ensuite confié à l’agence Ria Novosti que « le pape François s’est dit très préoccupé par la situation de toute la population, tant dans le Donbass … que dans d’autres régions, il a exhorté à prendre soin des enfants, à prendre soin des malades et des souffrants, à prendre soin des gens. Selon lui, c’est le principal objectif chrétien ». Mais il a démenti, à l’agence Télam (Argentine) – qui a filmé la voiture du pape devant l’ambassade -, que le pape se soit proposé en médiateur: pour une médiation, les deux parties en présence doivent être d’accord.

Le pape François s’est, par exemple, impliqué, en 2015, dans le processus de dégel entre Cuba et les États-Unis, ou pour la paix au Soudan du Sud, en avril 2019.

L’archevêque majeur des gréco-catholiques ukrainiens, Sviatoslav Shevchuk, ami de Bergoglio depuis l’époque de Buenos Aires, a pour sa part réagi « favorablement » à la visite du pape à l’ambassade russe, à deux pas du Vatican, et il a confié espérer qu’elle permettrait « un élan pour que le dialogue l’emporte sur la force ». Il a trouvé refuge dans la crypte de la cathédrale de la Résurrection de Kiev, a confié à l’agence SIR son secrétaire, le p. Andriy Soletskyy, qui participe à la rencontre de Florence sur la paix en Méditerranée.

Le pape vient lui-même de renoncer à son voyage à Florence, et à présider les célébrations du Mercredi des Cendres, du fait de sa difficulté à marcher, persistante depuis le mois de janvier. Il vient de donner une catéchèse sur la fragilité de la vieillesse et les totalitarismes du XXe siècle.

La voiture du pape François à l'ambassade de Russie près le Saint-Siège, 25 fév. 2022 © capture de Zenit / Agencia Télama

La voiture du pape François à l’ambassade de Russie près le Saint-Siège, 25 fév. 2022 © capture de Zenit / Agencia Télam

A son retour au Vatican, le pape a twitté sur le synode et l’humilité de l’écoute, ce quine passe pas inaperçu après sa tentative diplomatique, hors protocole: « Dans le parcours synodal, seule l’humilité peut nous mettre en condition de nous rencontrer et d’écouter, pour dialoguer et discerner. #Synod« 

Pour sa part, le cardinal Secrétaire d’Etat, Pietro Parolin, avait lancé un appel affirmant qu’il y avait encore un espace pur la diplomatie et la négociation.

L'Osservatore Romano, 26 fév. 2022 © capture / L'Osservatore Romano

L’Osservatore Romano, 25 fév. 2022 © capture / L’Osservatore Romano

L'Osservatore Romano, 25 fév. 2022 © capture / L'Osservatore Romano

L’Osservatore Romano, 25 fév. 2022 © capture / L’Osservatore Romano

Appel du 23 février

Le pape a multiplié les appels à la paix en Ukraine depuis 2014 et il a déclaré le mercredi des Cendres, mercredi prochain, 2 mars, comme Journée de prière et de jeûne pour la paix, dans un appel lancé mercredi dernier, 23 février à l’audience générale dans la Salle Paul VI du Vatican, quelques heures avant l’offensive russe.

« J’éprouve une grande douleur dans mon coeur du fait de l’aggravation de la situation en Ukraine, a dit le pape. En dépit des efforts diplomatiques de ces dernières semaines, des scénarios toujours plus alarmants s’ouvrent. Comme moi, de nombreuses personnes, dans le monde entier, éprouvent angoisse et préoccupation. Encore une fois, la paix de tous est menacée par des intérêts partisans. »

Il a invité les responsables politiques à un « examen de conscience devant Dieu »: « Je voudrais en appeler à ceux qui ont des responsabilités politiques pour qu’ils fassent un examen de conscience sérieux devant Dieu, qui est le Dieu de la paix et non de la guerre, a insisté le pape. Qui est le Père de tous et pas seulement de quelqu’un. Qui nous veut frères et pas ennemis. Je prie toutes les parties impliquées de s’abstenir de toute action qui provoquerait encore plus de souffrance des populations, en déstabilisant la coexistence entre les nations et en discréditant le droit international. »

Le pape François a aussi invité tous les « croyants et non-croyants » à une journée de prière et de « jeûne pour la  paix » le 2 mars 2022: « Et maintenant je voudrais en appeler à tous, croyants et non-croyants. Jésus nous a enseigné qu’à l’absurdité diabolique de la violence, on répond par les armes de Dieu, par la prière et par le jeûne. J’invite tout le monde à faire, le 2 mars prochain, Mercredi des Cendres, une journée de jeûne pour la paix. J’encourage spécialement les croyants pour que ce jour-là ils se consacrent intensément à la prière et au jeûne. Que la Reine de la paix préserve le monde de la folie de la guerre. »

Le pape François a ensuite repris cet appel dans un tweet posté sur son compte @Pontifex_fr: « J’invite tout le monde à faire du 2 mars prochain, mercredi des Cendres, une journée de jeûne pour la #paix : les croyants doivent se consacrer intensément à la prière et au jeûne. Que la Reine de la Paix préserve le monde de la folie de la guerre. »

Intensification des messages depuis décembre 2021

Le 12 décembre 2021 après l’angélus, entre autres, il avait souhaité « que ce Noël du Seigneur porte la paix en Ukraine ».

Dès le début de l’année 2022, dans son discours au Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, le 10 janvier 2022, il a appelé à « trouver des solutions acceptables et durables en Ukraine et dans le Caucase méridional ».

A l’angélus du 24 janvier, il a proposé que le mercredi 27 janvier soit une journée de prière pour la paix. Confiant son « inquiétude » pour l’Ukraine, il avait adressé « un appel pressant à toutes les personnes de bonne volonté pour qu’elles élèvent des prières à Dieu tout-puissant, afin que toutes les actions et initiatives politiques soient au service de la fraternité humaine, plutôt que des intérêts partisans ».

Le 9 février, à l’issue de l’audience générale, il a supplié « le Dieu de la paix pour que les menaces de guerre soient surmontées par un dialogue sérieux et que les pourparlers du « Format Normandie » puissent y contribuer ». « La guerre est une folie », a-t-il ajouté.

Le pape avait invité à prier pour la paix en Ukraine: après la prière de l’angélus, dimanche 13 février dernier, de la fenêtre du bureau du palais apostolique du Vatican, il a proposé à la foule rassemblée sur la Place Saint-Pierre de prier en silence pour la paix dans le pays.

« Je confie à l’intercession de la Vierge Marie et à la conscience des responsables politiques tous les efforts en faveur de la paix. Prions en silence », avait invité le pape.

Le pape François a multiplié les mises en garde contre l’utilisation des armes et les appels en faveur d’un processus diplomatique de paix en Ukraine.

Le 21 janvier, c’était la présidence du Conseil des Conférences épiscopales d’Europe (CCEE) qui avait publié un communiqué invitant la communauté internationale à « soutenir le pays face au danger d’une offensive militaire russe ».

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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