« Il faut vaincre l’indifférence et rejeter la pensée selon laquelle les migrants seraient le problème des autres », a affirmé le pape François dans son long discours prononcé devant le corps diplomatique ce lundi 10 janvier 2022. Il a souligné la nécessité « de créer un système cohérent et complet de gestion des politiques d’immigration et d’asile ».
Le pape a présenté ses vœux pour la nouvelle année aux 183 ambassadeurs réunis dans la salle des Bénédictions. La question des migrations a été un des thèmes centraux de son intervention.
Dans son discours, le pape « remercie » ceux qui « œuvrent pour garantir un accueil et une protection aux migrants ». Il dit être « conscient des difficultés que rencontrent certains États face à des flux humains considérables ». « On ne peut demander à personne l’impossible, mais il y a une nette différence entre accueillir, même de façon limitée, et repousser totalement », souligne le pape François.
En évoquant son voyage à Lesbos, le 5 décembre 2021, il se souvient des « visages des nombreux enfants et des adultes des centres d’accueil ». Il a vu « dans leurs yeux la fatigue du voyage, la peur d’un avenir incertain, la douleur pour les êtres chers qu’ils ont laissés derrière eux et la nostalgie de la patrie qu’ils ont été contraints d’abandonner ». « Devant ces visages, nous ne pouvons pas rester indifférents, déclare le pape, et nous ne pouvons pas nous retrancher derrière des murs et des fils barbelés sous prétexte de défendre la sécurité ou un mode de vie. Nous ne le pouvons pas. »
Le pape souligne que l’approche indifférente aux problèmes des migrations entraîne « la déshumanisation même des migrants concentrés dans des ‘hotspots’, où ils finissent par être des proies faciles de la criminalité et des trafiquants d’êtres humains ». Il faut « également relever, poursuit le pape, que les migrants eux-mêmes sont souvent transformés en arme de chantage politique, en une sorte de “marchandise de négociation” qui prive les personnes de leur dignité ».
En parlant des migrants et des réfugiés, le pape souhaite « renouveler » sa « gratitude aux Autorités italiennes, grâce auxquelles quelques personnes ont pu venir à Rome » avec lui depuis Chypre et la Grèce. « Ce fut un geste simple, mais significatif, souligne le pape François. Je souhaite au peuple italien, qui a beaucoup souffert au début de la pandémie, mais qui a également montré des signes encourageants de reprise, de maintenir toujours cet esprit d’ouverture généreuse et de solidarité qui le caractérise. »
En s’adressant à l’Union européenne, le pape désire qu’elle « trouve sa cohésion interne dans la gestion des migrations, comme elle a su la trouver face aux conséquences de la pandémie ». « La capacité de négocier et de trouver des solutions communes est l’une des forces de l’Union européenne », souligne-t-il.
Cependant, « les migrations ne concernent pas seulement l’Europe », rappelle le pape François. Il évoque « l’exode des réfugiés syriens », des réfugiés afghans et haïtiens, ainsi que « les exodes massifs qui touchent le continent américain et se pressent à la frontière entre le Mexique et les États-Unis d’Amérique ».
« La question migratoire, ainsi que la pandémie et le changement climatique, montrent clairement que personne ne peut se sauver tout seul, c’est-à-dire que les grands défis de notre époque sont toujours mondiaux », souligne le pape. Rejetant « les solutions » « fragmentées » à ces problèmes, il appelle à « retrouver le sens de notre identité commune en tant qu’unique famille humaine ». « Toute autre alternative, explique le pape, ne serait qu’un isolement croissant, marqué de verrouillages et de fermetures réciproques qui saperaient encore davantage le multilatéralisme, qui est pourtant le style diplomatique qui a caractérisé les relations internationales depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. »