Dès son élection, le pape François a mis l’accent sur la sauvegarde de la planète et la protection des plus faibles : ses discours aux Nations unies, à Nairobi ou à New York, ses très nombreux appels ainsi que la publication de l’encyclique Laudato Si’ (2015) en est l’illustration. Mais la doctrine écologique du Saint-Siège remonte à bien plus tôt et trouve ses racines dans le Concile Vatican II, rappelle Vatican News du 30 octobre 2021 publiant un article sur les étapes de la formation de la vision écologique de l’Église.
Le p. Thomas Michelet, auteur de l’ouvrage Les Papes et l’écologie, souligne que l’encyclique Laudato Si’ du pape François développe un magistère exposé depuis plusieurs décennies.
La constitution pastorale Gaudium et Spes, dans le contexte du Concile Vatican II, traitait déjà des questions écologiques dans un monde qui sortait de la Seconde Guerre mondiale et le pape Jean XXIII invitait déjà l’éducation catholique « à savoir préparer le chrétien à toute sorte de responsabilité dans la société », note Tebaldo Vinciguerra, spécialiste des dossiers environnementaux au Dicastère pour le service du développement humain intégral.
Le pape Paul VI : une « vision intégrale remarquable »
La première mention dans les écrits pontificaux d’une «catastrophe écologique» apparaît dans le discours du pape Paul VI à la FAO (l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), en 1970, rappelle P. Michelet: «Déjà nous voyons se vicier l’air que nous respirons, se dégrader l’eau que nous buvons, se polluer les rivières, les lacs, voire les océans, jusqu’à faire craindre une véritable ‘’mort biologique’’ dans un avenir rapproché, si des mesures énergiques ne sont sans retard courageusement adoptées et sévèrement mises en œuvre.» (Revue FAO, vol. 3, n. 3, mai-juin 1970: Environnement: les raisons de l’alarme).
Durant ses 15 années de pontificat, poursuit P. Michelet, le pape Paul VI a développé une « vision intégrale remarquable, qui rappelle qu’un développement authentique est un développement de toute la personne humaine, de toutes ses facettes, de toute l’humanité, et non uniquement une question économique ».
Dans un de ses discours les plus marquants – devant les participants de la conférence des Nations-Unies sur l’environnement, à Stockholm en 1972 – le pape Paul VI utilise, selon P. Michelet, des concepts typiquement écologique et moderne pour l’époque, tels que l’inséparabilité de l’homme et de son milieu: «Aujourd’hui, en effet, émerge la conscience de ce que l’homme et son environnement sont plus que jamais inséparables, a dit le pape: le milieu conditionne essentiellement la vie et le développement de l’homme; celui-ci, à son tour, perfectionne et ennoblit son milieu par sa présence, son travail, sa contemplation. Mais la capacité créatrice humaine ne portera de fruits vrais et durables que dans la mesure où l’homme respectera les lois qui régissent l’élan vital et la capacité de régénération de la nature: l’un et l’autre sont donc solidaires et partagent un avenir temporel commun. »
Dans les vingt années qui ont suivi ce discours, commente Tebaldo Vinciguerra, un désengagement relatif du Saint-Siège sur les questions écologiques a été démontré : «En étudiant les articles de la presse catholique de l’époque, cela peut être expliqué par une déception causée par les propositions de style néomalthusien, des propositions démographiques incompatibles avec la doctrine catholique », écrit le spécialiste des dossiers environnementaux au Dicastère pour le service du développement humain intégral.
Des années 1990 : la Création, un sujet essentiel pour le Saint-Siège
À partir des années 1990, la défense de la Création devient un sujet essentiel pour le Saint-Siège. Le retour de l’écologie au centre du magistère pontifical est certainement dû au message du pape Jean-Paul II pour la Journée mondiale de la Paix le 1er janvier 1990. Ce texte est considéré aujourd’hui comme le premier texte d’un pape consacré de façon globale à l’écologie. « La société actuelle ne trouvera pas de solution au problème écologique si elle ne révise sérieusement son style de vie » et «la gravité de la situation écologique révèle la profondeur de la crise morale de l’homme », a déclaré le pape polonais.
Le pape Benoit XVI a également parlé, durant son pontificat, de « l’alliance entre l’être humain et l’environnement, qui doit être le miroir de l’amour créateur de Dieu ». Dans l’encyclique Caritas in veritate (2009), il a souligné qu’« aujourd’hui, les questions liées à la protection et à la sauvegarde de l’environnement doivent prendre en juste considération les problématiques énergétiques ». « L’accaparement des ressources énergétiques non renouvelables par certains États, groupes de pouvoir ou entreprises, constitue, en effet, un grave obstacle au développement des pays pauvres », a affirmé le pape Benoit XVI.
C’est également Benoît XVI, rappelle Tebaldo Vinciguerra, qui est à l’origine de l’installation de panneaux photovoltaïques sur le toit de l’auditorium du Vatican.
Il y a quelques jours, à la 26e conférence des Nations unies sur les changements climatiques (la COP26 de Glasgow), une doctrine écologique de l’Église a été exposée par le secrétaire d’État du Saint-Siège, le cardinal Pietro Parolin, ce mardi 2 novembre.
Sur les ondes de la radio britannique BBC, deux jours avant l’ouverture de la COP26, le pape François a déclaré que la lutte contre le réchauffement climatique « est un défi de civilisation en faveur du bien commun et un changement de perspective, d’esprit et de regard, qui doit placer la dignité de tous les êtres humains d’aujourd’hui et de demain au centre de toutes nos actions ».
En amont de la COP26, 72 institutions religieuses sur six continents, représentant plus de 4 milliards d’actifs sous gestion, ont annoncé leur désinvestissement des énergies fossiles.