Le Carême est un temps pour « libérer notre existence de ce qui l’encombre, ce trop plein de choses, utiles et inutiles, ces informations vraies ou fausses, ces habitudes et ces dépendances qui nous enchaînent », a souligné Mgr Bruno-Marie Duffé en présentant le message du pape François pour ce temps liturgique, publié ce 12 février 2021.
Il s’agit de faire de la place pour « ouvrir la porte de notre cœur et de notre intelligence à Celui qui vient partager notre condition humaine jusqu’à la mort : Jésus, le Fils du Dieu vivant », a ajouté le secrétaire du Dicastère pour le service du développement humain intégral, en citant le pape.
« Le Carême est un temps pour donner, a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse au Bureau de presse du Saint-Siège : ce que nous avons, ce que nous savons, ce que nous sommes. » Et d’assurer : « le peu que nous partageons avec amour devient beaucoup et ne s’épuise jamais : il devient une réserve de vie et de joie simple ».
AKM
Présentation de Mgr Duffé
Le message du Saint Père pour le temps du Carême rappelle à tous les chrétiens que cette période particulière de l’année est un temps de ressourcement et de conversion, centré sur la mémoire de la Passion, de la Mort et de la Résurrection du Christ dans lesquelles nous sommes plongés. C’est la raison pour laquelle nous sommes invités, pendant ces quarante jours, à suivre le chemin du Christ pour être en capacité, le soir de Pâques, de renouveler la promesse de notre baptême.
Nous lisons, au chapitre 20 de l’Evangile selon St Matthieu, cette parole du Christ : « Voici que nous montons à Jérusalem »: cette ville qui concentre en elle-même la mémoire de l’Alliance, les blessures d’une histoire humaine complexe et l’attente d’un accomplissement du message des prophètes.
Voici que nous-mêmes, aujourd’hui, nous sommes appelés à faire le chemin, avec le Christ, vers une vie nouvelle et un monde nouveau, vers une nouvelle confiance en Dieu et en l’avenir, dans un contexte marqué par l’inquiétude, le doute et parfois même le désespoir. La crise sanitaire du Covid-19 entraîne, nous le savons, une crise sociale dans laquelle nombreux sont celles et ceux qui traversent un temps de Passion et de mort.
Comment vivre ce temps du Carême, sur les pas du Christ, en nous renouvelant dans la foi, dans l’espérance et dans l’amour fraternel ? Comment vivre avec le Christ et avec les souffrants, cette « traversée de la mort » et cette « résurrection » qui nous associent à la vie même du Christ et à l’amour de Dieu-Père ?
« L’appel à vivre le jeûne, la prière et l’aumône, tels que Jésus les présente dans sa prédication, dit le Message du Saint Père, sont les conditions et les expressions de notre conversion. Le chemin de la pauvreté et du manque (le jeûne), le dialogue filial avec le Père (la prière), le regard et les gestes d’amour envers l’homme blessé (l’aumône) nous permettent d’incarner une foi sincère, une vivante espérance et une charité active. » (Introduction du Message).
Le jeûne ouvre notre esprit, notre corps et notre être tout entier au don de Dieu. En rompant avec un mode de vie égocentrique et une consommation excessive, voire compulsive, nous consentons à vivre une pauvreté qui est une ouverture à l’autre et à Dieu. Et nous recevons un amour qui nous vient du Père et du Christ.
Le Carême est « un temps pour croire », c’est-à-dire pour se laisser toucher par Dieu et le laisser « établir en nous sa demeure » (Cf. Jn 14,23).
Jeûner consiste donc à libérer notre existence de ce qui l’encombre, ce trop plein de choses, utiles et inutiles, ces informations vraies ou fausses, ces habitudes et ces dépendances qui nous enchaînent, pour ouvrir la porte de notre cœur et de notre intelligence à Celui qui vient partager notre condition humaine jusqu’à la mort : Jésus, le Fils du Dieu vivant.
Dans le recueillement et la prière silencieuse, l’espérance nous est donnée comme une lumière intérieure, pour éclairer les choix que nous sommes appelés à faire, la mission et les responsabilités qui nous sont confiées.
La prière est une respiration par laquelle nous laissons l’Esprit remplir notre vie intérieur et la dynamiser, avec les deux mouvements du recevoir et du donner.
Le Carême est un temps pour prier, en nommant simplement ceux et celles que la vie place sur notre chemin et en espérant avec eux. Grâce à cette expérience d’une prière personnelle – mais toujours ouverte à l’Autre et aux autres – nous sont données l’inspiration pour réconforter, consoler, encourager, offrir à nos proches la sollicitude et le pardon. Et cela s’étend à ceux qui sont au loin ou dans la solitude.
L’aumône est l’acte par lequel nous exprimons notre compassion et notre charité. La charité est en effet l’élan du cœur qui nous fait sortir de nous-mêmes, pour nous rendre proche de la personne blessée, méprisée, sans abri, dans le besoin…
Ainsi que l’exprime clairement le Saint Père dans l’Encyclique « Fratelli tutti »: « La charité, par son dynamisme universel, peut construire un monde nouveau, parce qu’elle n’est pas un sentiment stérile mais la meilleure manière d’atteindre des chemins efficaces de développement pour tous » (F.T. n°183).
Le Carême est un temps pour donner : ce que nous avons, ce que nous savons, ce que nous sommes. Grâce à l’expérience du don, nous considérons celui est dans le manque comme un membre de notre propre famille, comme un frère, comme un ami que nous aimons. Le peu que nous partageons avec amour devient beaucoup et ne s’épuise jamais : il devient une réserve de vie et de joie simple.
Le Carême nous ouvre donc un chemin de conversion, sur les pas du Seigneur Jésus luimême, lui qui a vécu jusqu’au bout sa mission de Fils et que Dieu a relevé au matin de Pâques.
Telle est notre foi : elle est une espérance offerte à tout vivant, au -delà de la souffrance et de la mort. Il a dans ses mains et sur son corps les traces de nos injustices et de nos douleurs mais il est debout, devant nous et nous appelle à une vie nouvelle.
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