Ils étaient masqués, ils restaient à distance les uns des autres, mais ils étaient bien présents malgré les restrictions sanitaires imposées par la pandémie : des leaders religieux du christianisme, du judaïsme, de l’islam, du bouddhisme, du sikhisme, ont entouré le pape François lors d’une rencontre pour la paix, ce 20 octobre 2020, sur la Place du Capitole à Rome.
Cet événement – qui avait pour thème « Personne ne se sauve seul, paix et fraternité » – s’inscrivait dans l’esprit de la Rencontre de prière et de dialogue pour la paix entre croyants de diverses religions convoquée par Jean-Paul II à Assise en 1986 : la Communauté de Sant’Egidio perpétue cette tradition annuellement, de ville en ville.
A l’arrivée du pape un peu après 16h, a eu lieu d’abord une prière pour la paix, chaque religion dans un lieu dédié. Les chrétiens se sont rassemblés dans la basilique Santa Maria in Aracoeli, derrière le monument à Victor-Emmanuel II, où le pape François et le patriarche œcuménique de Constantinople Bartholomée Ier sont entrés côte à côte.
Au début de la célébration, l’évêque luthérien allemand Heinrich Bedford-Strohm a souligné le paradoxe de la pandémie, où « les signes physiques » qui étaient « expressions d’amour » – comme serrer les mains ou se parler face à face – sont devenus « l’ennemi de l’amour, une menace pour l’autre, une source potentielle de souffrance ». Et d’inviter : « Apportons devant Dieu nos douleurs, nos échecs, nos questions sans réponse, notre espérance. Et écoutons Dieu. »
Dans sa méditation, le pape François a invité à choisir « entre l’homme qui accuse et Dieu qui excuse » et a souligné que le « manque d’amour » était « la cause profonde de nos maux personnels, sociaux, internationaux, environnementaux ». A suivi une longue prière égrenant tous les conflits du monde, tandis que des cierges étaient allumés un à un pour les pays déchirés. Les représentants des confessions chrétiennes ont prié ensemble le Notre Père et se sont inclinés les uns devant les autres en gage de geste de paix.
La rencontre s’est poursuivie sur la Place du Capitole, avec les autres leaders religieux et le président italien Sergio Mattarella ainsi que la maire de Rome Virginia Raggi. Andrea Riccardi, fondateur de Sant’Egidio, a salué leur présence comme « un arc-en-ciel de paix ».
Le patriarche Bartholomée Ier a plaidé particulièrement pour l’environnement : « Le temps de la mode écologique, de son idéalisation, ou pire, de son idéologisation, est terminé. Le temps de l’action commence, a-t-il insisté. (…) Nous ne devrions pas parler de l’écologie comme l’un des plus grands phénomènes ou thèmes du moment, mais comme si elle était l’air que l’on respire. »
Depuis le podium habillé de bleu, les représentants juif – le grand rabbin de France Haïm Korsia – musulman, bouddhiste, sikh, ont également pris la parole. Tandis que le jour déclinait sur la Ville éternelle, le pape a quant à lui encouragé les croyants « à prier avec insistance pour la paix, à ne jamais se résigner à la guerre, à agir avec la douce force de la foi pour mettre fin aux conflits ». Et de lancer : « Il y a un besoin de paix ! Plus de paix ! (…) ça suffit avec les épées, les armes, la violence, la guerre ! »
Après une minute de silence en mémoire des victimes de la pandémie et des guerres, a été lu un « Appel à la paix », affirmant que « les injustices du monde et de l’histoire se soignent non pas par la haine et la vengeance, mais par le dialogue et le pardon ». Le texte a été remis par des enfants aux autorités et aux ambassadeurs présents sur la Place. A la suite du pape François, chacun des leaders religieux l’a signé, allumant tour à tour un cierge sur un candélabre, jusqu’à former un brasier flamboyant dans la nuit.