S. Jean-Marie Vianney par Emilien Cabuchet (1867) @ wikimedia commons / Andreas König

S. Jean-Marie Vianney par Emilien Cabuchet (1867) @ wikimedia commons / Andreas König

Le chapelet avec le curé d’Ars, par le fr Rivero O.P.

Le 4 août 2019, lettre du pape François aux prêtres

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L’an dernier, le 4 août 2019, le pape François avait envoyé une « Lettre aux prêtres à l’occasion des 160 ans de la mort de saint Jean-Marie Vianney, le curé d’Ars ». Très beau message où le Saint-Père partage les souffrances et les joies apostoliques des prêtres du monde entier.

Le pape François pointe la tentation subtile qui menace ceux qui ont décidé de mener le combat spirituel pour Jésus : l’acédie, « douce tristesse », attitude de découragement et de lassitude, « le plus apprécié des élixirs du démon »[1] selon l’expression de l’écrivain catholique Georges Bernanos. Le « bof », « je n’ai pas envie », « ça ne me dit rien », « une autre fois ». C’est ainsi que la prière et le service sont renvoyés à plus tard.

Le curé d’Ars appelait le diable ou Satan : le « Grappin », instrument utilisé par les paysans pour arracher les pommes de terre. Le diable cherche à arracher les âmes au Christ Jésus par la tentation du découragement.

La Vierge Marie, Immaculée Conception, a occupé une grande place dans la vie, la prière et la prédication du saint curé d’Ars, patron des curés du monde entier, que l’Église célèbre dans sa liturgie le 4 août.

Nous allons prier les mystères lumineux du Rosaire à la lumière de la vie et du ministère de saint Jean-Marie Vianney, connu comme le saint curé d’Ars.

Né le 8 mai 1786 à Dardilly, le saint curé est parti vers le Père le 4 août 1859 à l’âge de 73 ans. Lors de son arrivée à Ars, village de 230 habitants, le saint curé s’était exclamé : « Que c’est petit ! » Maintenant, Ars reçoit chaque année des centaines de milliers de pèlerins.

Au garçon, Antoine Givre, qui l’avait orienté sur sa route, près d’Ars, le saint curé avait dit : « Tu m’as montré le chemin d’Ars, je te montrerai le chemin du Ciel ». Un monument commémore aujourd’hui cette rencontre devenue un symbole de la Providence.

Le père Jean-Marie Vianney aimait le rosaire. Dans sa ferveur apostolique, il avait fondé plusieurs Confréries du Rosaire, persuadé dans la lumière de la foi que la prière des membres de la Confrérie contribuait au salut de chacun.

Plusieurs événements le relient à la vie dominicaine. Le père Lacordaire, grand prédicateur de Notre-Dame de Paris, s’était rendu à Ars pour écouter, au bas de la chaire, la prédication de ce prêtre qui avait souffert de ses limites intellectuelles au séminaire. En effet, Jean-Marie Vianney avait eu du mal à faire des études de philosophie et de latin. Ayant pris du retard dans sa formation scolaire pour des raisons étrangères à sa volonté, il faillit être écarté de la prêtrise, mais le discernement spirituel des responsables de l’Église le sauva de cette menace.

Par ailleurs, Élisabeth Falsan, épouse Lagrange, la maman du futur père Marie-Joseph Lagrange, fondateur de l’École biblique de Jérusalem, amena son fils alors qu’il était bébé et malade au curé d’Ars qui le bénit. Par la suite, le frère dominicain Marie-Joseph Lagrange se rendit, au cours de ses études théologiques, à Ars pour rencontrer le saint curé. À l’occasion de la pose de la première pierre de l’École biblique de Jérusalem, le père Lagrange choisit d’enfouir un fragment de la soutane du curé d’Ars dans ses fondations, signe de la vocation de l’École à servir la formation des prêtres et le salut des âmes.

Commençons notre prière en récitant le Credo, le Notre Père et trois Ave Maria.

Faisons maintenant le signe de la croix qui est le signe de l’amour de
Dieu pour nous :

Tous : Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen.

Premier mystère lumineux :

le baptême de Jésus dans les eaux du Jourdain

Commencement de l’Évangile selon saint Marc : « Jean le Baptiste fut dans le désert, proclamant un baptême de repentir pour la rémission des péchés. Et s’en allaient vers lui tout le pays de Judée et tous les habitants de Jérusalem, et ils se faisaient baptiser par lui dans les eaux du Jourdain, en confessant leurs péchés.

Jean était vêtu d’une peau de chameau et mangeait des sauterelles et du miel sauvage. Et il proclamait : « Vient derrière moi celui qui est plus fort que moi, dont je ne suis pas digne, en me courbant, de délier la courroie de ses sandales. Moi, je vous ai baptisés avec de l’eau, mais lui vous baptisera avec l’Esprit Saint. »

Le baptême chrétien est donné pour la rémission des péchés. Il ne s’agit pas d’un simple rite mais du don de l’Esprit Saint, amour du Père et du Fils, qui lave l’âme des baptisés et la comble de la gloire de Dieu.

Le saint curé d’Ars a voué sa vie à la réconciliation des pécheurs avec le Christ. Le pardon accordé dans la confession des péchés fait briller la lumière du baptême. Véritable recréation de l’homme à l’image de Dieu.

Le père Jean-Marie Vianney passait des journées entières au confessionnal. Des pèlerins, par milliers, en ressortaient libérés de leurs fardeaux : « Le bon Dieu au moment de l’absolution jette nos péchés par derrière ses épaules, c’est-à-dire il les oublie, il les anéantit : ils ne reparaîtront plus jamais. » ; « Il ne sera plus question des péchés pardonnés. Ils ont été effacés, ils n’existent plus ! », disait-il.

À l’exemple de Jésus, le saint curé d’Ars aimait les pécheurs et il combattait le péché, l’orgueil et la haine de Dieu. Lors du synode sur l’Europe, les évêques faisaient remarquer que « le défi n’est pas tant de baptiser les nouveaux convertis que de conduire les baptisés à se convertir au Christ et à son Évangile. »[2]

Cet amour envers sa paroisse et ses paroissiens apparaît dans le baiser de sa nouvelle terre de mission. Les prêtres ne se donnent pas les missions ; ils les reçoivent. Le saint curé d’Ars a embrassé la terre d’Ars et sa mission dans un village tout petit. Le saint pape Jean-Paul II, qui a visité Ars en pèlerin, se plaisait à rappeler que jeune vicaire de paroisse imitait le saint curé en s’agenouillant pour embrasser la terre de sa mission ; ensuite, il se rendait devant le Saint-Sacrement et il se présentait au curé. »

Il est impossible d’évangéliser sans aimer. Pour évangéliser et convertir il s’avère nécessaire de prier et d’aimer les personnes comme Jésus les aime.

Le saint curé a reçu sa paroisse des mains de Dieu. « Mon Dieu, convertissez ma paroisse ! », priait-il sachant que seule la grâce de Dieu peut accomplir des merveilles dans une âme. Tout est grâce ! Dieu seul convertit.

Prions pour ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur âme.

Prions pour la conversion pastorale des paroisses, qu’elles deviennent de plus en plus des paroisses missionnaires !

Prions pour les paroisses, communautés de communautés, qu’elles soient sacrement de la rencontre du Christ avec son Église et avec l’humanité.

Notre Père. Avec Maria. Gloria.

Deuxième mystère lumineux :

les noces de Cana

De l’Évangile selon saint Jean : « Le troisième jour, il y eut des noces à Cana de Galilée, et la mère de Jésus y était. Jésus aussi fut invité à ces noces, ainsi que ses disciples. Or, il n’y avait plus de vin, car le vin des noces était épuisé. La mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. »

Le saint curé d’Ars ne se lassait pas de prier la Vierge Marie en reprenant le « Je vous salue Marie ». La prière du rosaire évoque les couronnes de roses. Le père Jean-Marie Vianney comparait la prière mariale au parfum qui embaume tout ce qu’il touche. La prière parfume du saint parfum du Christ ceux qui se tournent vers la mère de Jésus.

Deux images bien parlantes illustrent sa prédication sur la Vierge Marie. Marie, invoquée dans les litanies comme la porte du Ciel, est présentée comme « la portière du Ciel », le Christ Jésus étant la porte qui nous introduit dans la demeure du Père.

La mère de Jésus est vue aussi comme « celle qui tient l’échelle pour  monter au Paradis ». Seul Jésus conduit au Père : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14,6). Le Fils de Dieu est descendu du Ciel pour que nous montions par lui à la gloire du Père. L’échelle, c’est lui ! Et à l’heure de la mort, Marie intercède pour les pécheurs et les accueille à la Porte du Ciel.

Le saint curé d’Ars montre ainsi son sens théologique juste et innovant.

« Chef-d’œuvre de Dieu », « la plus belle des créatures », Marie intercédait sur les besoins de la paroisse d’Ars comme aux noces de Cana. Le saint curé consacra sa paroisse à Marie, conçue sans péché, Immaculée Conception, si aimée des Lyonnais, le 1er mai 1836.

Confions à l’intercession les besoins de l’Église et de l’humanité : « Ils n’ont pas de santé ! » ; « ils n’ont pas de liberté religieuse ! » ; « ils n’ont pas de travail ! » ; « ils n’ont pas d’amour ! ».

Rendons grâce à Dieu pour les merveilles qu’Il accomplit à travers le ministère des prêtres.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.

Troisième mystère lumineux :

Jésus dans la synagogue de Nazareth

De l’Évangile selon saint Luc : « Jésus vint à Nazareth où il avait été élevé, entra, selon sa coutume le jour du sabbat, dans la synagogue, et se leva pour faire la lecture. On lui remit le livre du prophète Isaïe et, déroulant le livre, il trouva le passage où il était écrit : « L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a consacré par l’onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur. »

Jésus replia le livre, le rendit au servant et s’assit. Tous dans la synagogue tenaient les yeux fixés sur lui. Alors il se mit à leur dire : « Aujourd’hui s’accomplit à vos oreilles ce passage de l’Écriture. »

Aumônier de la prison de Domenjod (Saint-Denis/La Réunion), j’ai évoqué un jour en prédication l’acédie qui peut tenailler et anéantir le moral des personnes détenues. Un jeune m’a demandé des éclaircissements à la fin de la messe : « Si j’ai bien compris « acédie » est le contraire d’ « assidu ». Oui, admirable comparaison que j’ai admiré dans l’analyse spirituelle de ce jeune condamné qui n’avait pas fait d’études en théologie.

Pour avancer dans le service du Seigneur il faut durer, rester assidus à la prière et aux rassemblements communautaires dont la messe.

Le saint curé d’Ars constatait que « plus on prie, plus on veut prier ». Comme à table, l’appétit vient en mangeant. C’est en priant que le goût de la prière revient après des temps de sécheresse.

Le témoignage évangélique et la catéchèse nourrissent la contemplation et la foi. Le saint pape Jean-Paul II enseignait que « la foi grandit quand on la partage ». Les baptisés et les prêtres se nourrissent de la connaissance de Dieu en annonçant la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.

Il arrive que des personnes me disent avec compassion : « Les gens ne croient plus. Votre mission de prêtre doit être difficile. » Je réponds que les financiers aimeraient avoir le même retour sur l’investissement que je découvre dans l’annonce de l’Évangile. C’est en transmettant et en expliquant le mystère de Dieu, révélé dans la Bible, que les laïcs et les prêtres font leurs les paroles de Jésus dans la synagogue de Nazareth : « Aujourd’hui s’accomplit cette parole. » L’apostolat ne va pas sans fatigue, mais il apporte aussi la joie de contempler les merveilles de Dieu qui fait briller le visage de la lumière du Christ. La contemplation ne se trouve pas uniquement dans la solitude. Les chrétiens voient Dieu en toute chose et ils contemplent toute chose dans la lumière de Dieu.

Le ministère des prêtres ne représentent pas une déperdition de l’énergie divine reçue dans la prière et l’étude des saintes Écritures. Tout au contraire, c’est en transmettant la Parole de Dieu que le prêtre assiste aux merveilles accomplies dans les sacrements où Jésus vivant rencontre et sauve les hommes.

Prions pour les prêtres généreux et créatifs, prions aussi pour les prêtres fatigués, déçus et malades.

Prions pour le renouveau de l’évangélisation. Que les prêtres soient remplis du courage et de la force de l’Esprit Saint !

Notre Père. Ave Maria. Gloria.

Quatrième mystère lumineux :

la transfiguration de Jésus

De l’Évangile selon saint Luc : « Or il advint, environ huit jours après ces paroles, que, prenant avec lui Pierre, Jean et Jacques, il gravit la montagne pour prier. Et il advint, comme il priait, que l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement d’une blancheur fulgurante. »

Saint Luc est le seul évangéliste à préciser que Jésus s’est manifesté transfiguré, lumineux, tandis qu’il priait. La prière transfigure, illumine.

Pour le curé d’Ars, « la prière n’est pas autre chose qu’une union avec Dieu » ; « la prière est une douce amitié, une familiarité étonnante … C’est un doux entretien d’un enfant avec son Père. »

Le curé d’Ars priait de manière personnalisée pour ses paroissiens. Il avait fait marquer sur un ruban les noms de tous ses paroissiens. Et il avait suspendu ce ruban à la statue de la Vierge Marie, sur son cœur.

Il parlait de Dieu aux hommes, mais surtout, et avant tout, il parlait à Dieu de tous ceux qu’il rencontrait.

Louons le Seigneur pour les prêtres, les catéchistes et les parents qui initient à la prière.

Louons le Seigneur pour les enfants qui ont le bonheur de découvrir la prière dans la Bible et surtout la prière de Jésus dans l’Évangile.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.

Cinquième mystère lumineux :

la Cène

De l’Évangile selon saint Matthieu : « Jésus prit du pain, le bénit, le rompit et le donna aux disciples en disant : « Prenez, mangez, ceci est mon corps. »

« Il n’y a rien de si grand que l’Eucharistie », s’exclamait le curé d’Ars. Le Corps du Christ n’est pas une récompense pour les purs. C’est pourquoi le père Jean-Marie Vianney prêchait : « Ne dites pas que vous n’en êtes pas digne. C’est vrai : vous n’en êtes pas digne, mais vous en avez besoin. »

Les prêtres continuent l’œuvre de la Rédemption : c’est le Christ qui parle et qui baptise par eux, c’est le Christ qui consacre le pain et le vin à travers leurs paroles …

« Sans le prêtre, la mort et la passion de Notre Seigneur Jésus-Christ ne serviraient de rien »[3], déclarait le saint curé d’Ars.

Au mois de juin dernier, lors de la messe de fin d’année à l’école du Sacré-Cœur, deux enfants sont venus à ma rencontre dans la cour pour me saluer. Une petite fille de 7 ans me dit : « Tu viens à la place de Jésus. » Belle théologie du sacerdoce où le prêtre agit « in persona Christi capitis », c’est-à-dire « dans la personne du Christ, Tête de l’Église ». Le prêtre représente le Christ, il le « rend-présent ». Lieutenant du Christ, le prêtre « tient-lieu » du Christ. C’est le Christ qui consacre comme l’explicite la prière eucharistique : « C’est pourquoi nous te supplions de consacrer toi-même les offrandes que nous apportons. Sanctifie-les par ton Esprit … ».

En 1990, le cardinal Ratzinger, le futur pape Benoît XVI, avait enseigné lors du symposium de Philadelphie sur la mission et la formation des prêtres : « La charge effrayante de l’Eucharistie réside en ce que le prêtre a le droit de parler avec le « Je » du Christ. Devenir prêtre et être prêtre implique un constant mouvement vers une telle identification. »

Prions le Père d’envoyer des vocations presbytérales à son Église.

Prions pour les séminaristes et pour les formateurs dans les séminaires.

Confions au Saint-Esprit les prêtres qui se sentent seuls ou isolés afin qu’ils retrouvent auprès de leur évêque et des fidèles soutien et  réconfort.

Prions pour l’amitié entre les prêtres, source de joie et de dynamisme missionnaire.

Notre Père. Ave Maria. Gloria.

*****

Prière attribuée au curé d’Ars

Acte d’amour 

« Je vous aime, ô mon Dieu, et mon seul désir est de vous aimer jusqu’au dernier soupir de ma vie.

Je vous aime, ô Dieu infiniment aimable, et j’aime mieux mourir en vous aimant que de vivre un seul instant sans vous aimer.

Je vous aime, ô mon Dieu, et je ne désire le ciel que pour avoir le
bonheur de vous aimer parfaitement.

Je vous aime, ô mon Dieu, et je n’appréhende l’enfer que parce qu’on n’y aura jamais la douce consolation de vous aimer.

Ô mon Dieu, si ma langue ne peut dire à tout moment que je vous aime, du moins je veux que mon cœur vous le répète autant de fois que je respire.

Ah ! Faites-moi la grâce de souffrir en vous aimant, et de vous aimer en souffrant, et d’expirer un jour en vous aimant et en sentant que je vous aime.

Et plus j’approche de ma fin, plus je vous conjure d’accroître mon amour et de le perfectionner. Ainsi soit-il. »

Bénédiction : Que le Seigneur nous bénisse et nous garde, au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Amen.

Saint-Denis (La Réunion), le 30 juillet 2020.

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Fr. Manuel Rivero, O.P.

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