« Il y a de la religiosité dans tout acte artistique », explique Macha Méril, d’origine russe et orthodoxe: l’actrice en témoigne ici.
Macha Méril a été marraine, avec Michael Lonsdale, du Festival Sacré de la Beauté à Cannes.
Dans cette nouvelle série des « témoins » de la Diaconie de la beauté, nous avons auparavant publié les témoignages de Michael Lonsdale et de Anne Facérias.
En recevant des membres de la « Diaconie » en 2018, le pape François les avait notamment invité à créer des « oasis de beauté » dans les villes.
La quête de la Beauté
par Macha Méril
Je suis russe d’origine, et orthodoxe. Quand Michel Legrand a souhaité que nous nous marions à l’Eglise, je lui ai présenté notre archevêque de l’époque, Job de Telmessos, à la cathédrale Alexandre Nevski de Paris, rue Daru.
Celui-ci ne lui a posé qu’une seule question, avant de consentir à l’accueillir dans l’orthodoxie :
– Quelle est votre relation avec Dieu ?
Michel a réfléchi, puis il a répondu avec ferveur :
– Je le connais mal mais Il est présent en moi.
L’archevêque a pris sa main et lui a dit :
– Bien sûr, car vous les artistes, les créateurs, vous êtes une parcelle de Dieu. Il est en vous, Il favorise votre inspiration, même à votre insu, Il compte sur vous pour transmettre Son amour.
Michel a été bouleversé par cette réponse qui l’a convaincu d’entrer dans notre Eglise avec un consentement éclairé.
Je pense en effet qu’il y a de la religiosité dans tout acte artistique. Nous ne nous exprimons pas pour nous, mais pour tenter de nous élever au-dessus de la plate condition humaine, la vie matérielle. Ce besoin, cette nécessité est rejointe par ceux qui nous écoutent, nous lisent et nous regardent.
Quand j’ai écrit mon roman « Vania, Vassia et la fille de Vassia » au chevet de mon mari qui nous quittait peu à peu, j’ai éprouvé l’étrange sensation que ma hâte d’écrire ne provenait pas seulement du désir qu’il puisse me lire avant de s’envoler vers un autre monde (il a réussi à en lire les cent premières pages), mais que je n’écrivais pas seule, une force divine me tenait la main, m’encourageait, me guidait. Bien sûr ce livre est la
somme de toutes mes expériences, de tous les évènements de ma vie, voulus ou pas.
« Vania, Vassia et la fille de Vassia » @ lianalevi.fr
Mais je me suis aperçue, avec la distance de mes quatre-vingt ans, qu’un fil reliait toutes mes actions, mes décisions et mes refus : celui de l’amour de la beauté.
La recherche de la Beauté a gouverné mon existence, dans mon travail, dans mes amours, mes amitiés et dans le rapport à la nature, qui tient une grande place dans ma vie. Mais comme le dit Marguerite Duras dans l’un des textes qui composent mon prochain spectacle « Sorcière » au Théâtre de Poche, Marguerite la païenne, la laïque dit : l’amour et la beauté sont une seule et même chose, la beauté est partout, il suffit de la voir.
Plus le temps passe, plus je me resserre auprès des personnes qui partagent cette évidence, sans perdre de temps à des occupations futiles, dictées par un projet de société qui nous éloigne de ce qui procure le réel bonheur : la quête de la beauté.
Macha Méril
Propos recueillis par Anne Facérias