« Relaxe du cardinal Barbarin lors de son procès en appel », titre Vatican News ce jeudi 30 janvier 2020 à la mi-journée.
Réaction du Saint-Siège
Pour sa part le directeur de la Salle de presse du Saint-Siège publie, ce jeudi soir, une déclaration, en italien et en français, par laquelle le Saint-Siège prend acte du jugement et de la décision du cardinal de présenter sa démission à nouveau: « Le Saint-Siège a pris connaissance du jugement rendu par la Cour d’Appel de Lyon à l’encontre du Cardinal Philippe Barbarin ainsi que de sa décision de remettre une nouvelle fois sa charge entre les mains du Pape François. »
Il redit la sollicitude de l’Eglise pour les victimes: « Avec la Conférence des Évêques de France, le Saint-Siège redit sa proximité à toutes les victimes d’abus dont elle mesure la souffrance, à leurs familles et à la communauté tout entière. »
Et s’adresse au diocèse: « Il est aux côtés de l’Église de Lyon durement éprouvée. »
Mais le pape annoncera sa décision plus tard: « Le Saint-Père, qui continue à suivre de près le déroulement de ces évènements douloureux, fera connaître sa décision en temps voulu. »
Déclaration du cardinal Barbarin
Radio Vatican rappelle que « l’archevêque de Lyon était jugé en appel pour non-dénonciation d’abus sexuels sur mineurs, dans le cadre des accusations visant l’ancien prêtre Bernard Preynat » : le ministère public avait demandé la relaxe à l’issue du procès en appel.
Le cardinal Barbarin a annoncé en fin d’après midi, lors d’un communiqué oral d’environ une minute trente, qu’il allait à nouveau présenter sa démission au pape François pour sa charge d’archevêque de Lyon: « Avec sérénité ce midi j’ai pris acte de l’arrêt de la Cour d’appel de Lyon qui a déclaré que je ne suis pas coupable de ce dont on m’accusait. Cette décision permet de tourner une page et pour l’Eglise de Lyon c’est l’occasion d’ouvrir un nouveau chapitre. C’est pourquoi de nouveau je vais remettre ma charge l’archevêque de Lyon entre les mains du Pape François. Naturellement, si le Saint-Père souhaite me voir, je me rendrai à Rome. En mars dernier il avait refusé ma démission, en acceptant que je me mette en retrait pendant la durée de la procédure judiciaire. Maintenant, je peux paisiblement lui renouveler ma demande. »
Le cardinal Barbarin a dit sa pensée continuelle pour les victimes d’abus: « Mes pensées vont aujourd’hui, toujours, vers les victimes. Avec bien d’autres frères et soeurs, je continue et continuerai de prier pour elles et pour leurs familles, quotidiennement. »
Il a demandé, avant de remercier les journalistes présents, la prière: « Priez pour moi, pour le diocèse de Lyon que j’aime tant, pour chacun des habitants de cette région, pour que, comme le demande le Seigneur, tous soient un. »
Il a laissé ses avocats répondre ensuite aux questions de la presse.
Dans un autre message vidéo de 2’48, le pape s’adresse au diocèse de Lyon. Il rend un hommage appuyé aux victimes.
Le jugement en appel
« La Cour d’appel du Tribunal correctionnel de Lyon a rendu sa décision ce jeudi 30 janvier 2020. Le cardinal Philippe Barbarin, condamné en première instance à six mois de prison avec sursis, est finalement relaxé à l’issue de son procès en appel, conformément aux réquisitions de l’avocat général formulées au terme des audiences tenues en novembre dernier », explique Vatican News.
La même source rappelle aussi que « François Devaux, président de l’association La Parole Libérée, s’était dit prêt à se pourvoir en cassation si la cour suivait les réquisitions de l’avocat général » : les parties civiles ont 5 jours pour le faire.
Le cardinal Barbarin, déjà en retrait
Concernant les faits antérieurs au 26 février 2013, les juges ont considéré que le cardinal Philippe Barbarin « aurait dû dénoncer les faits rapportés, notamment après son rendez-vous avec Bernard Preynat en 2010 où le prêtre lui a tout avoué, mais que les faits sont prescrits », précise Lyon Capitale. Les juges estiment que « l’obligation de dénoncer n’existe que si la personne sur laquelle cette obligation pèse la connaissance d’informations précises sur des faits de mauvais traitement de mineurs ». Ce que contestent les parties civiles.
Lyon Capitale cite aussi un avocat du cardinal Barbarin, Me Soulier: « On ne peut inventer l’imprescriptibilité d’un délit. Si un procès doit être fait à l’Eglise, c’est le choix de chacun, mais il ne faut pas désigner une victime expiatoire. Il faut être plus lucide. Cela fait plus de 60 ans que je suis avocat. J’ai connu les guerres, les conséquences de la Shoah. On ne peut pas dire tout et n’importe quoi. Je supplie les jeunes, l’avenir de notre pays, de réfléchir avant d’accuser quelqu’un. »
Pour ce qui est du gouvernement du diocèse, un des avocats du cardinal Barbarin avait annoncé fin novembre que son client allait « quitter Lyon ». Pour le moment, le diocèse de Lyon est sous la conduite de Mgr Michel Dubost, nommé administrateur apostolique, le cardinal Barbarin demeurant, en titre, archevêque. Mgr Dubost s’est entretenu avec le pape François vendredi dernier, 24 janvier. Le pape avait refusé la démission du cardinal Barbarin en raison de la « présomption d’innocence ».
Communiqué des évêques de France
Dans un communiqué de la Conférence des évêques de France (CEF), signée de son président, Mgr Eric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims, les évêques prennent acte « de la décision de justice ». La CEF assure le cardinal Barbarin « de sa communion fraternelle dans cette phase nouvelle de sa vie qui s’ouvre au service du Christ et de l’Église ».
S’adressant aux victimes de Bernard Preynat, la CEF ajoute qu’elle « assure de sa gratitude les personnes victimes qui ont parlé et qui parlent pour l’œuvre de vérité qu’elles rendent possible ».
La CEF affirme aussi son engagement pour éradiquer les abus: « Elle redit sa détermination à poursuivre le travail nécessaire face aux abus sexuels ou de pouvoir afin qu’ils ne se reproduisent plus dans l’Église. »
Le procès Preynat
Bernard Preynat, pour sa part, a fait l’objet d’un procès ecclésiastique et il a été démis de l’état clérical au cours de l’été dernier, rappelle Vatican News : « Son procès pénal s’est tenu du 14 au 17 janvier dernier, dans le cadre d’une procédure distincte de celle concernant le cardinal Barbarin. Le procureur de la République a requis à l’encontre de l’ancien prêtre une peine d’au moins huit ans de prison ferme pour de multiples agressions sexuelles commises sur des jeunes garçons âgés de 7 à 15 ans. Le verdict sera rendu le 16 mars. »
(Mis à jour toute la journée du 30 janvier 2020)