« Les tensions croissantes en Asie du Sud ont accru les risques de conflits armés entre voisins dotés d’armes nucléaires », alerte Mgr Auza. Invitant, à la suite du pape François, à « ne pas se laisser séduire par le faux sentiment de sécurité engendré par les armes nucléaires et autres armes de destruction massive », le nonce philippin demande des « mesures concrètes pour réduire la proéminence des armes nucléaires dans la sécurité mondiale par des mesures vérifiables, en vue de la réalisation d’un monde exempt d’armes nucléaires ».
Mgr Bernardito Auza, nonce apostolique et observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies, a délivré un discours à la Première Commission de la soixante-quatorzième session de l’Assemblée générale des Nations Unies. Elle était intitulée : « Désarmement général et complet », à New York, le 18 octobre 2019. Le discours a été présenté par Mgr Fredrik Hansen.
La Commission du désarmement de l’ONU est « bien placée pour atteindre ses objectifs », rappelle le représentant du Saint-Siège. C’est pourquoi la Conférence du désarmement pourrait, « avec plus de détermination », « entamer des négociations sur les mesures qui permettraient de faire évoluer le monde vers un paradigme de sécurité dans lequel les armes nucléaires ne seraient plus présentes ». Le Saint-Siège exhorte aussi vivement « tous les gouvernements concernés à ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires ».
Le thème tient à coeur au pape François qui se rendra à Hiroshima et Nagasaki (Japon) en novembre prochain (23-26 novembre), après avoir passé quatre jours en Thaïlande.
Voici notre traduction de l’intégralité du discours – en anglais – de Mgr Auza.
HG
Discours intégral de Mgr Bernardito Auza
Monsieur le Président,
Je vous félicite de votre accession à la présidence et vous assure de notre coopération dans la poursuite des travaux essentiels du Comité pour faire progresser la paix et la sécurité internationales.
Notre débat sur le désarmement général et complet intervient après les événements marquants, qui ont eu lieu au cours de la Semaine de haut niveau de l’Assemblée générale récemment conclue, de la XIe Conférence chargée de faciliter l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires et de la Réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée générale pour commémorer et promouvoir la Journée internationale pour l’élimination totale des armes nucléaires.
En ce qui concerne ce dernier point, je voudrais, une fois de plus, rappeler les paroles que le Pape François a adressées aux participants d’un colloque tenu au Vatican en 2017, lorsqu’il a dit : « la menace de l’emploi (des armes nucléaires), ainsi que leur possession même, doit être fermement condamnée. Car elles existent au service d’une mentalité de peur qui affecte non seulement les parties en conflit, mais toute la race humaine ». Il a appelé la communauté internationale à ne pas se laisser séduire par le faux sentiment de sécurité engendré par les armes nucléaires et autres armes de destruction massive, mais plutôt, en tant que membres de l’unique famille humaine, de fonder leur sécurité sur les principes fondamentaux de fraternité et de solidarité universelles.
Le Comité examine un large éventail de concepts et de propositions spécifiques pour parvenir à l’élimination des armes nucléaires. Le Saint-Siège demande instamment qu’ils fassent l’objet d’un examen détaillé en vue d’établir – par consensus dans toute la mesure possible – des mesures concrètes pour réduire la proéminence des armes nucléaires dans la sécurité mondiale par des mesures vérifiables, en vue de la réalisation d’un monde exempt d’armes nucléaires. Ma délégation exhorte les gouvernements qui possèdent des armes nucléaires à reconsidérer tout projet de « modernisation » de leurs capacités nucléaires, qu’il s’agisse de missiles, d’avions, de sous-marins ou de têtes nucléaires. Cette évolution risque de se développer au lieu de réduire le rôle des armes nucléaires dans la sécurité mondiale. Le Saint-Siège exhorte aussi vivement tous les gouvernements concernés à ratifier le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) afin qu’il puisse enfin entrer en vigueur en tant que rempart contre la poursuite du développement des armes nucléaires et en tant que complément nécessaire au Traité de non-prolifération (TNP).
Monsieur le Président,
L’ONU ne manque pas de tribunes où les éléments du désarmement nucléaire peuvent être examinés et négociés. La Commission du désarmement a inscrit à son ordre du jour actuel des mesures de désarmement nucléaire, de transparence et de confiance pour l’espace. Elle est bien placée pour atteindre ses objectifs. En effet, les mesures de transparence et de confiance pour l’espace renforceront la stabilité en protégeant les moyens de surveillance et de vérification qui contribuent à assurer le bon fonctionnement des obligations en matière de désarmement.
Dans le même temps, il est regrettable que la Conférence du désarmement n’ait pas été en mesure, pendant des années, de s’entendre sur de nouvelles mesures en faveur de l’élimination des armes nucléaires. Ses membres ont la lourde responsabilité de travailler ensemble pour sortir de cette impasse. Les tensions croissantes en Asie du Sud ont accru les risques de conflits armés entre voisins dotés d’armes nucléaires. Un accord visant à mettre fin à la production de matières fissiles pour la fabrication d’armes nucléaires contribuerait à réduire ces risques. Tous les États dotés d’armes nucléaires sont membres de la Conférence du désarmement. Avec plus de détermination, la Commission pourrait entamer des négociations sur les mesures qui permettraient de faire évoluer le monde vers un paradigme de sécurité dans lequel les armes nucléaires ne seraient plus présentes. En outre, les modifications des forces conventionnelles liées aux armes nucléaires à des fins de dissuasion devraient également faire l’objet de négociations. Les forces nucléaires et conventionnelles relèvent du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), dont l’article VI exige la réalisation du désarmement nucléaire dans le cadre d’un « désarmement général et complet sous un contrôle international strict et efficace ».
Monsieur le Président,
Je terminerai en saluant le Partenariat international pour la vérification du désarmement nucléaire, auquel le Saint-Siège participe en qualité d’observateur. Cet important effort de renforcement de la confiance, qui est en cours depuis un certain temps, contribue à la mise en place de mécanismes de vérification qui appuient l’objectif de renforcer la sécurité mondiale sans recourir aux armes nucléaires.
Merci, Monsieur le Président.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat