Aikumale Alemin, capture @ Vatican Media

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Synode pour l’Amazonie : témoignage d’Aikumale Alemin, un futur diacre autochtone de la Guyane française

«Il faut que nous soyons considérés comme des êtres humains»

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« Il faut que nous soyons considérés comme des êtres humains, il faut nous reconnaître, il faut reconnaître nos histoires, nos cultures et il faut reconnaître que nous aussi nous avons besoin d’un bout de terre pour nos enfants », a déclaré Aikumale Alemin, un autochtone de l’ethnie Wayana, de la Guyane française, dans une interview accordée au micro de Vatican News à Hélène Destombes, le 8 octobre 2019. « Les Guyanais, surtout les autochtones », « les Bushinengués, les Amérindiens », « ne sont pas très écoutés », a-t-il regretté.
Aikumale Alemin s’est exprimé sur ses attentes suscitées par le travail de l’Assemblée spéciale du synode des évêques sur l’Amazonie qui est en cours au Vatican (6-27 octobre). Représentant du peuple Wayana – un des six peuples autochtones vivant en Guyane, sur les rives des cours d’eau Tampok, Marouini et Maroni – Aikumale Alemin a été désigné pour représenter, lors de synode, tous les peuples amérindiens de la Guyane française. Il a parlé, entre autres, des « Bushinengués » (habitants du « bush ») : les populations d’origine afro-américaines, descendants d’esclaves, qui vivent dans la forêt et qui ont reconstitué une culture propre, issue de leurs diverses origines ethniques africaines.
Candidat au diaconat dans le diocèse de Cayenne, Aikumale a été invité au synode comme auditeur et accompagne l’un des pères synodaux, Mgr Emmanuel Lafont, évêque de Cayenne.
« Nous vivons toujours de l’agriculture, de la pêche, de la chasse, raconte Aikumale, mais il y a l’orpaillage illégal qui détruit la nature, notre nature où l’on chasse, où poussent les médecines traditionnelles, et – que ce soit chez les Amérindiens ou chez les Bushinengués, c’est exactement pareil – nous n’avons pas beaucoup d’endroits où aller. »
« C’est vrai que la terre ne nous appartient pas forcément, ça appartient à l’État, fait-il remarquer. Nous souhaitons que la terre de nos ancêtres nous appartienne vraiment. »
Cette terre « n’est pas du tout respectée, affirme-t-il : Il y a la pollution au mercure, parce qu’ils utilisent le mercure pour amalgamer l’or, et puis ils jettent ça sur la terre et dans la rivière. Tous les animaux ainsi que les poissons que nous consommons sont contaminés. … nous, on mange et … des fois les bébés naissent avec des malformations ».
« Que l’Église catholique puisse avoir les yeux un peu partout »
Aikumale raconte sa propre histoire : « Je suis un chrétien catholique. Je suis converti ça fait maintenant 6 ans, avec mon épouse. Nous sommes les premiers Amérindiens wayanais qui ont fondé la communauté chrétienne catholique sur le fleuve du Haut Maroni. Nous attendons que l’Église catholique ne soit pas comme les autres Eglises » qui ne font que diviser « la famille » et qui font « perdre complètement la culture ».
« À travers l’Église, poursuit-il, nous demandons le soutien : comme accompagner les enfants et éduquer les enfants. Qu’ils puissent avoir une école catholique en pays amérindien, parce que ça fait dix années que je me bats pour avoir un collège en pays amérindien wayanais sur le Haut Maroni ». Et que l’Église « défende aussi la jeunesse contre la drogue », ajoute-t-il. « Et puis qu’il n’ait plus de viols de jeunes filles qui tombent enceintes dès le jeune âge, 15-16 ans. Donc, je souhaite que l’Église catholique puisse avoir les yeux un peu partout. C’est-à-dire : l’ensemble de l’Amazonie. »
En parlant du soutien concret de la part de l’Église, Aikumale souligne qu’il aimerait que « l’Église catholique puisse appuyer les projets dont nous avons besoin en ce moment, pour que nos enfants restent un peu auprès de nous, parce que trop tôt – à l’âge de 12 ans – ils partent dans les villes. C’est ça aussi qui fait perdre la langue, la culture, parce qu’on n’a pas le temps de les former complètement ».
Aikumale affirme que dans son pays « il y a toujours la colonisation jusqu’à maintenant ». « Je vis dans cette situation-là, dit-il. Mais ce n’est pas comme à l’époque : au niveau de la langue, ça fait partie de la colonisation, au niveau de l’éducation, de l’école – ça fait partie de la colonisation. La colonisation a diminué, mais ça continue. »
« Et l’Église catholique, il ne faut pas que ça soit comme les autres Eglises, insiste-t-il. Il faut que ça soit avec nous, pas imposé. Il faut que ça soit nous qui demandions » et qu’il y ait « un partenariat avec l’Église catholique ».
De ce synode, précise-t-il, « j’attends que l’Église nous fasse confiance par rapport à la culture, parce que la culture fait partie d’un peuple et j’attends que l’Église apporte vraiment du soutien approfondi pour nos enfants » et qu’elle apporte « aussi de l’éducation de la jeunesse et de la sécurité ».
Nous avons besoin d’être « accompagnés par l’Église catholique », souligne Aikumale.
On peut écouter l’interview d’Hélène Destombes ici.

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Marina Droujinina

Journalisme (Moscou & Bruxelles). Théologie (Bruxelles, IET).

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