Card. Turkson, 3 mai 2019 © Vatican Media

Card. Turkson, 3 mai 2019 © Vatican Media

Journée du tourisme : le Saint-Siège souhaite un travail digne pour les jeunes

Message du cardinal Turkson (Traduction intégrale)

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Le Dicastère pour le service du développement humain intégral appelle les gouvernants à favoriser l’emploi dans le secteur du tourisme, particulièrement pour les jeunes : « Un travail qui mette au centre la dignité de la personne. »
C’est ce que l’on peut lire dans un message du préfet du dicastère, le cardinal Peter Turkson, publié ce 24 juillet 2019 en vue de la Journée mondiale du tourisme (27 septembre).
« Là où il n’y a pas de travail, il ne peut pas y avoir de progrès, il ne peut pas y avoir de bien-être, et sûrement, il ne peut pas y avoir d’avenir meilleur », affirme-t-il.
Le cardinal Turkson plaide pour tous ceux qui travaillent dans le secteur du tourisme, surtout ceux qui souffrent de « conditions de précarité et parfois d’illégalité, avec des rétributions inéquitables, contraints à un travail pénible, souvent loin de leur famille, à haut risque de stress et pliant sous les règles d’une compétitivité agressive ».
Message du cardinal Turkson 
“Tourisme et travail: un avenir meilleur pour tous”, c’est le thème de la Journée mondiale du tourisme célébrée le 27 septembre, promue par l’Organisation mondiale du tourisme (UNWTO). Un thème qui rappelle l’initiative : “l’avenir du travail”, voulue par l’Organisation internationale du travail (OIT), qui célèbre son centenaire cette année.
Le choix de traiter le thème du tourisme dans la perspective du travail semble particulièrement opportun devant les critiques enracinées et croissantes qui caractérisent la dimension du travail, partie prenante de la vie pour de nombreuses personnes, sur toutes les latitudes. Les objectifs souhaités de la paix, de la sécurité, de la promotion et de l’inclusion sociale ne peuvent être atteints si l’on néglige l’engagement commun pour assurer à tous un travail digne, équitable, libre, construit autour de la personne et de ses exigences primaires de développement humain intégral. “Travailler est le propre de la personne humaine. Cela exprime sa dignité d’être créé à l’image de Dieu”1, a dit le pape François. Là où il n’y a pas de travail, il ne peut pas y avoir de progrès, il ne peut pas y avoir de bien-être, et sûrement, il ne peut pas y avoir d’avenir meilleur. Le travail, qui n’est pas seulement l’engagement, mais la modalité à travers laquelle l’homme se réalise lui-même dans la société et dans le monde, est un élément essentiel pour déterminer le développement intégral aussi bien de la personne que de la communauté dans laquelle elle vit.
“Nous sommes appelés au travail depuis notre création”, a écrit le pape François dans l’encyclique Laudato si’, en soulignant que “le travail est une nécessité, il fait partie du sens de la vie sur cette terre, chemin de maturation, de développement humain et de réalisation personnelle”2. “Sans travail – a-t-il encore dit dans le message vidéo aux participants à la 48e Semaine sociale des catholiques italiens (Cagliari, 26-29 octobre 2017) – il n’y a pas de dignité”.
Comme le rappelle le Compendium de la Doctrine sociale de l’Eglise : “La personne est la mesure de la dignité du travail” et – citant l’encyclique Laborem exercens – « Il n’y a en effet aucun doute que le travail humain a une valeur éthique qui, sans moyen terme, reste directement liée au fait que celui qui l’exécute est une personne »3.
Avec une référence particulière au tourisme, dans son Message pour la XXIVe Journée mondiale du tourisme4, saint Jean-Paul II expliquait également que ce secteur “doit être considéré comme une expression particulière de la vie sociale, avec des aspects économiques, financiers, culturels et avec des conséquences décisives pour les individus et les peuples. Sa relation directe avec le développement intégral de la personne devrait en orienter le service, comme pour les autres activités humaines, à l’édification de la civilisation dans le sens le plus authentique et complet, c’est-à-dire à l’édification de la ‘civilisation de l’amour’ (cf. Sollicitudo rei socialis, n. 33)”.
A l’heure actuelle, nombreuses sont les problématiques liées à l’exercice du travail dans le secteur du tourisme, qui se décline dans des professions variées et des tâches spécifiques. Conseillers de voyages et de guides touristiques, chefs, sommeliers et serveurs, personnels de bord, animateurs, experts en marketing touristique et réseaux sociaux : beaucoup travaillent dans des conditions de précarité et parfois d’illégalité, avec des rétributions inéquitables, contraints à un travail pénible, souvent loin de leur famille, à haut risque de stress et pliant sous les règles d’une compétitivité agressive.
Il est indignant aussi de voir l’exploitation du travail dans les pays pauvres mais qui sont à haute vocation touristique en vertu du riche patrimoine environnemental et historico-culturel qui les caractérise, et où les peuples autochtones tirent rarement bénéfice de l’utilisation des ressources locales. Les actes de violence contre les populations qui accueillent sont aussi inacceptables, ainsi que toute offense à leur identité culturelle, et toutes les activités qui causent la dégradation et l’exploitation vorace de l’environnement.
A ce propos, saint Jean-Paul II encore en 2003 soulignait que “l’activité touristique peut jouer un rôle important dans la lutte contre la pauvreté, aussi bien du point de vue économique, que social et culturel. En voyageant, l’on connait des lieux et des situations différentes, et l’on se rend compte que le fossé entre pays riches et pays pauvres est grand. On peut, en outre, mieux valoriser les ressources et les activités locales, en favorisant l’implication des couches les plus pauvres de la population”5.
En ce sens, à bien des égards les possibilités de développement offertes par le secteur du tourisme sont importantes, aussi bien en termes d’opportunités d’engagement que de promotion humaine, sociale et culturelle. Opportunités qui s’ouvrent en particulier aux jeunes et qui encouragent leur participation comme protagonistes de leur développement, même à travers des initiatives d’auto-entrepreneuriat dans les pays défavorisés.
Les données diffusées par l’Organisation mondiale du tourisme (UNWTO) notent que sur 11 postes de travail dans le monde, au moins 1 est généré – directement ou indirectement – par le tourisme, et enregistrent une croissance constante du phénomène qui implique des millions de personnes de tous les coins de la terre. On parle d’un cycle expansif, avec d’énormes implications sur le plan social, économique et culturel, qui a dépassé les attentes les plus optimistes. Il suffit de penser qu’en 1950 les touristes internationaux étaient un peu plus de 25 millions tandis qu’on estime qu’ils pourraient atteindre le chiffre de 2 milliards de voyageurs dans le monde entier au cours de la prochaine décennie.
Face à ces flux, la dimension de la rencontre, que le travail dans le tourisme peut offrir, nous semble encourageante. Les agents du secteur, à tous les niveaux, dans l’exercice de leurs fonctions quotidiennes, dans de nombreux cas, ont l’opportunité de se confronter à des personnes provenant des pays du monde les plus différents, et d’engager cette connaissance qui constitue le premier pas pour abandonner les préjugés et les stéréotypes et pour la construction de relations empreintes d’amitié. Le pape François a parlé du tourisme comme occasion de rencontre, aux jeunes du Centre touristique des jeunes en mars dernier, à l’occasion du 70e anniversaire de fondation de l’association. Le pape a exprimé son appréciation pour leur engagement dans la promotion d’un “tourisme lent”, “non pas inspiré des canons du consumérisme ou seulement désireux d’accumuler des expériences, mais en mesure de favoriser la rencontre entre les personnes et le territoire, et de faire grandir dans la connaissance et dans le respect réciproque”6.
Le Dicastère pour le service du développement humain intégral fait donc appel à tous les gouvernants et les responsables des politiques économiques nationaux, afin qu’ils favorisent le travail, particulièrement des jeunes, dans le secteur du tourisme. Un travail qui mette au centre la dignité de la personne – comme le recommande d’ailleurs la Commission mondiale sur l’avenir du travail de l’Organisation internationale du travail (OIT)7 – qui se fasse l’instrument de promotion du développement intégrale de chaque homme et de tout l’homme, qui coopère au développement des communautés individuelles, chacune selon ses particularités, et qui favorise la création de rapports d’amitié et de fraternité entre les personnes et les peuples.
Nous assurons de notre proximité et de notre soutien tous ceux qui sont engagés pour atteindre ces objectifs, et nous exhortons les responsables et les agents du tourisme à prendre conscience des défis et des opportunités qui caractérisent le travail dans le secteur touristique. Enfin, nous désirons remercier en particulier les agents pastoraux pour toutes les énergies dépensées quotidiennement afin que la Parole de Dieu puisse éclairer et vivifier ce domaine particulier de la vie humaine.
Du Vatican, 23 juillet 2019
Cardinal Peter Turkson, préfet
_________________
1 François, catéchèse à l’audience générale, 15 août 2015.
2 Francesco, Lettre Encyclique Laudato si’, 24 mai 2015, n. 128
3 Compendium de Doctrine sociale de l’Eglise, n. 271.
4 Jean-Paul II, Message pour la XXIV Journée mondiale du Tourisme, 2003.
5 Ibidem.
6 François, Discours durant l’audience aux dirigeants et aux membres du Centre touristique des jeunes, 22 mars 2019.
7 Travailler pour un avenir meilleur, Rapport de la Commission mondiale sur l’avenir du travail, 22 mai 2019; disponible aussi sur le site: https://www.ilo.org/rome/risorse-informative/comunicati-stampa/WCMS_664152/lang– it/index.htm

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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