Le modérateur de la rencontre du mondiale Vatican pour la Protection de mineurs, le p. Federico Lombardi SJ, explique que l’objectif de la “tolérance zéro” est important mais qu’il ne suffit pas à répondre à la crise des abus sexuels.
Le p. Lombardi est intervenu sur ce thème lors du point presse de la mi-journée qui a rassemblé également, à l’institut de patristique “Augustinianum” de Rome, à deux pas du Vatican, ce vendredi 22 février 2019, les card. Blase Joseph Cupich (Chicago, EEUU), membre du Comité organisateur de la rencontre, et Sean Patrick O’Malley, O.F.M. Cap. (Boston, EEUU), président de la Commission vaticane pour la Protection des mineurs, membre du Conseil des cardinaux), ainsi que Mgr Charles J. Scicluna (Malte, secrétaire adjoint de la Doctrine de la foi, membre du comité organisateur), Paolo Ruffini, préfet du Dicastère pour la communication, et Alessandro Gisotti, directeur par intérim du Bureau de presse du Saint-Siège.
A la presse qui faisait état de la « déception » de certaines victimes de ne pas avoir vu apparaître la « tolérance zéro » dans les 21 points synthétisés par le pape François à partir des « retours » des Conférences épiscopales et des commissions, le cardinal O’Malley a d’abord rappelé que le principe a été « clairement articulé déjà par Jean-Paul II » lorsqu’il a affirmé qu’il n’y avait « pas de place » dans le sacerdoce ou la vie consacrée pour qui agresserait un enfant. Et ce principe, a-t-il insisté, est « important pour nous tous ».
C’était le 23 avril 2002, lorsque le pape Jean-Paul II a convoqué au Vatican onze cardinaux américains. À cette occasion, il déclarait: «Les gens ont besoin de savoir qu’il n’y a pas de place dans la prêtrise et dans la vie religieuse pour ceux qui feraient du mal aux jeunes ». Jean-Paul II s’est alors déclaré « profondément peiné » et il a exprimé sa « solidarité aux victimes des violences sexuelles et à leurs familles, où qu’elles soient ».
Le principe prudentiel de toute décision
Pour sa part Mgr Scicluna a fait observer que l’expression « tolérance zéro » pose aussi un « problème de langue », comme un manifestation de cet « impérialisme » linguistique – cité le matin même en assemblée -, mal perçu par des cultures non occidentales.
Il a rappelé cependant que c’est le « principe de chaque décision » en redisant: « nous ne pouvons permettre dans le ministère une personne qui puisse faire mal aux jeunes », il y a là une « urgence prudentielle ».
Le « principe prudentiel », a-t-il expliqué, c’est d’écarter du ministère celui qui « pourrait faire du mal », même si son comportement n’implique pas pour le moment qu’il doive être « puni ».
Pour Mgr Scicluna ce principe affirmé le 23 avril 2002 par Jean-Paul II « doit animer toute décision ». Mais il va plus loin: la non « idonéité » au ministère ne relève pas du « pénal » – que l’expression « tolérance zéro » peut indiquer – et l’on n’écarte pas dans ce cas quelqu’un pour le « punir » mais pour « protéger le troupeau ». Prévention en somme et pas seulement punition.
Seulement une partie du problème
Le p. Lombardi a ajouté que cette expression de « tolérance zéro » est employée en Amérique du Nord (Etats-Unis, Canada) sans poser de problème de compréhension.
Mais elle ne reflète, souligne-t-il qu’une « partie limitée de la problématique que nous affrontons » et qui inclut au contraire le « soin pastoral » pour la sélection des candidats au sacerdoce, mais aussi la « prévention » des cas d’abus et « l’accompagnement » des victimes.
La « tolérance zéro » désigne « une façon d’intervenir punitive envers les criminels » et c’est « important ». « Mais cela ne représente qu’une partie du problème de la protection des mineurs, qui est plus ample » : les problèmes sont « plus complexes ».
« Quand je parle de la protection des mineurs, je parle aussi d’autres choses », a insisté le p. Lombardi.
De fait la rencontre actuelle au Vatican aborde, par exemple, pour la prévention, les réformes structurelles, les procédures, la formation non seulement des clercs mais aussi des laïcs, la responsabilité de tous les évêques, et de toutes les composantes de l’Eglise, mais aussi le processus de guérison, et l’accompagnement nécessaire des plaignants, des victimes, de leurs familles.
En somme « tolérance zéro » oui, mais beaucoup davantage : l’objectif de la Protection des mineurs dans l’Eglise, se révèle au fil des jours beaucoup plus exigeant encore, plus englobant. Et cette liste de 21 points a été présentée par le pape comme un appel à une réflexion très « concrète ».
Point presse du 21/2/2019 @ Vatican Media
Protection des mineurs: la "tolérance zéro", oui, mais "cela ne suffit pas", explique le p. Lombardi
Un principe affirmé par Jean-Paul II en 2002 et qui inspire les décisions