Mgr Bernardito Auza 13/12/2017 © Oss_romano

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Exploitation minière des fonds marins: limiter les conséquences négatives, par Mgr Auza (traduction complète)

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La vie humaine et la protection des océans, « au centre »

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Mgr Auza souligne l’appréciation du pape François « pour la manière réfléchie dont l’Autorité internationale des fonds marins envisage la réglementation, la finance, la technologie, et les défis environnementaux présentés par l’exploitation minière des grands fonds marins ». Il souhaite cependant « une étude et un débat approfondis afin de limiter, atténuer et éliminer les conséquences négatives » de la demande croissante.

Mgr Bernardito Auza, chef de la délégation du Saint-Siège a fait une déclaration générale à la deuxième partie de la vingt-quatrième session du Conseil de l’Autorité internationale des fonds marins, à Kingston (Jamaïque), le 17 juillet 2018.

« Bien que les considérations économiques soient au cœur de l’exploitation minière des fonds marins », souligne le représentant du Saint-Siège, « la vie humaine et la sollicitude pour nos océans doivent être au centre de toute approche réglementaire ». La délégation du Saint-Siège, a-t-il encore dit, « soutient l’appel à la coopération, le partage des meilleures pratiques et la création de normes et de lignes directrices pour compléter les règlements ».

Voici notre traduction de la déclaration générale de Mgr Auza.

HG

Déclaration générale de Mgr Bernardito Auza

Monsieur le Président,

Je vous apporte, ainsi qu’à l’Autorité internationale des fonds marins, les salutations du pape François, dont l’amour et la sollicitude pour notre maison commune sont bien connus, et j’exprime son appréciation pour la manière réfléchie dont l’Autorité internationale des fonds marins envisage la réglementation, la finance, la technologie, et les défis environnementaux présentés par l’exploitation minière des grands fonds marins. Ma délégation est reconnaissante pour les progrès réalisés en mars sur ces questions et attend avec intérêt de parvenir à une plus grande clarté cette semaine concernant diverses questions importantes

Tandis que ma délégation comprend le besoin de davantage de ressources minérales en raison de la demande croissante, les incertitudes et les risques que cette nouvelle activité commerciale apporte aux fonds marins nécessitent une étude et un débat approfondis afin de limiter, atténuer et éliminer les conséquences négatives. Cela est conforme à l’approche de précaution recommandée dans le projet de règlement.

Le Saint-Siège souhaite attirer l’attention sur cinq points.

  1. En ce qui concerne les questions de réglementation, le Saint-Siège a été informé de la grande préoccupation de certaines régions du Pacifique concernant l’impact de l’exploitation minière des fonds marins sur les approvisionnements alimentaires et sur la vie des communautés côtières locales dont la vie dépend principalement des ressources marines. Nous sommes conscients que de tels cas d’exploitation des fonds marins relèvent des juridictions nationales. Néanmoins, nous aimerions les porter à l’attention de l’Autorité, compte tenu de sa fonction consultative dans ce domaine. Bien que les considérations économiques soient au cœur de l’exploitation minière des fonds marins, la vie humaine et la sollicitude pour nos océans doivent être au centre de toute approche réglementaire. Ces valeurs sont la base sur laquelle se fonde la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, et en particulier la partie XI mettant en œuvre l’accord. Par exemple, le projet de règlement 2, qui énonce les Principes fondamentaux, place avant la protection de la vie humaine et du milieu marin le droit aux avantages monétaires du patrimoine commun de l’humanité, la santé de l’économie et du commerce mondial et les principes commerciaux. Afin de mieux faire face aux risques substantiels de l’exploitation minière en haute mer, la protection de la vie humaine et du milieu marin doit être assurée avant toute considération économique et commerciale.
  2. En ce qui concerne les considérations financières, ma délégation estime que la discussion animée sur plusieurs aspects du modèle financier présenté hier a montré qu’il était nécessaire de mieux comprendre le partage des avantages, l’épuisement des océans résultant de l’activité minière, et les obligations financières des entreprises minières des fonds marins pour la préservation des aires marines protégées. Bien que le coût de la restauration du site soit inclus dans le projet de règlement, le très long délai de cicatrisation de l’environnement marin rend les conséquences de l’activité minière quasi permanentes. D’autres utilisations des ressources du fond marin, y compris les formes rares de vie marine, d’énergie et de ressources génétiques marines, devraient être considérées. Si la communauté mondiale est pleinement engagée dans la planification spatiale marine, y compris en ce qui concerne les fonds marins, toutes les ressources doivent être identifiées et évaluées avant de commencer l’exploitation minière, afin que des décisions éclairées puissent être prises.
  3. Ma délégation reconnaît l’importance de la technologie pour extraire et transporter les minéraux des grands fonds marins et soutient l’appel à la coopération, le partage des meilleures pratiques et la création de normes et de lignes directrices pour compléter les règlements. Afin de minimiser le risque que les intérêts financiers l’emportent sur les meilleures pratiques et la protection de l’environnement, ma délégation souhaiterait des incitations plus attrayantes pour le partage des technologies et des meilleures pratiques, notamment des accords de licence innovants et des initiatives de recherche partagées.
  4. En ce qui concerne les risques sociaux, le Saint-Siège préconise de mettre davantage l’accent sur les impacts sociaux négatifs potentiels. Les textes juridiques réitèrent le besoin de coopération, de coordination, de transparence, de participation de toutes les parties prenantes et de partage des meilleures pratiques et de la technologie. Ma délégation souhaite encourager l’Autorité à opérationnaliser ces principes dans le cadre juridique et à anticiper plus complètement les situations susceptibles d’engendrer des conflits. Par exemple, la manière dont pourraient être traitées les ressources minérales extraites dans les zones situées au-delà de la juridiction nationale qui traversent les eaux juridictionnelles, n’est pas claire ; ou si les critères de sélection de l’État qui patronne doivent tenir compte de sa situation géographique par rapport au site d’extraction; ou si un État ayant des eaux juridictionnelles plus proches du site d’extraction devrait avoir le droit de s’opposer à la sélection d’un État qui patronne avec des eaux juridictionnelles plus lointaines ; ou si un État qui patronne peut avoir un pourcentage de participation dans un projet minier et en même temps exercer un pouvoir réglementaire, créant ainsi un conflit d’intérêts.
  5. Enfin, en ce qui concerne les risques environnementaux, ma délégation salue et encourage une politique environnementale globale, y compris l’élaboration de plans régionaux de gestion de l’environnement. Nous sommes particulièrement préoccupés de donner à l’Autorité ou à l’État qui patronne le pouvoir ou le droit de résilier ou de suspendre un contrat d’exploitation en cas de dommages inacceptables causés à l’environnement. L’annexe X du projet de règlement, sur les Clauses types pour l’exploitation des contrats, semble peu claire à cet égard, et le modèle financier illustré hier a explicitement exclu une considération sur les « dommages sérieux » ou les niveaux inacceptables de dommages environnementaux dans les calculs des dépenses et des revenus et de la participation aux bénéfices.

Merci, Monsieur le Président.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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