Prédication du p. Cantalamessa 2017 © L'Osservatore Romano

Prédication du p. Cantalamessa 2017 © L'Osservatore Romano

Le p. Cantalamessa évoque ses prédications de carême

Entretien dans L’Osservatore Romano

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« Un jour peut-être, au ciel, nous serons émerveillés en découvrant des géants de sainteté demeurés tout à fait inconnus aux hommes », affirme le père Raniero Cantalamessa dans un entretien de Nicola Gori publié par L’Osservatore Romano en italien du 23 février 2018 intitulé « Les saints sont au milieu de nous ». Il y évoque ses prédications de carême 2018 pour le pape et la curie romaine.

« Il y a des fleurs que Dieu ne cultive que pour lui, a-t-il ajouté, des saints dont le parfum n’a été respiré que par Dieu et peut-être par ceux qui ont vécu à leurs côtés. »

« L’Église doit affronter d’infinis défis et répondre à d’infinis devoirs mais pour Dieu, la chose la plus importante de l’Église, dans l’absolu, c’est la sainteté », explique le prédicateur de la maison pontificale. « Tout le reste doit servir à ce but ». Le Concile Vatican II a donné « une vision renouvelée de la sainteté ». Il s’agit « de la faire passer dans la pratique de l’Église », poursuit-il.

Voici notre traduction de l’italien.

HG 

Les saints sont au milieu de nous

 

Les saints sont parmi nous, ils vivent dans notre environnement quotidien, souvent cachés aux yeux de la plupart, mais ils ont quelque chose en commun : ce ne sont pas des surhommes. Ce sont des disciples du Christ qui se sont revêtus de lui. C’est justement sur l’invitation paoline « Revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ » que le capucin Raniero Cantalamesa appuiera ses prédications de Carême dans la chapelle Redemptoris Mater du Palais apostolique du Vatican, qui commencent vendredi 23 février 2018. Le prédicateur de la maison apostolique a accordé une interview à L’Osservatore Romano.

Pouvez-vous expliquer le choix de ce thème ?

L’Église doit affronter d’infinis défis et répondre à d’infinis devoirs mais pour Dieu, la chose la plus importante de l’Église, dans l’absolu, c’est la sainteté. Le Christ l’a formée « pour être sainte et immaculée devant lui dans l’amour ». Tout le reste doit servir à ce but : sacrements, ministères, documents, initiatives pastorales. Pour une fois, j’ai ressenti le besoin de consacrer la prédication de carême à rappeler, à moi-même et aux autres, cette vérité du « porro unum necessarium », de l’unique chose nécessaire. « Il y a une seule disgrâce irréparable dans la vie, disait Léon Bloy, et c’est de ne pas être des saints ». Il y a aussi un autre motif qui m’a poussé à choisir ce thème. Avec l’appel universel à la sainteté, le concile Vatican II a aussi donné des indications précises sur ce que l’on entend par sainteté dans le christianisme. « La sainteté, dit-il, est la parfaite union avec le Christ » (Lumen gentium, 50). Il s’agit de prendre conscience de cette vision renouvelée de la sainteté et de la faire passer dans la pratique de l’Église, y compris la pratique de « faire les saints ».

Comment est-il possible de « revêtir Jésus » ?

« Revêtir le Christ » est une manière métaphorique mais efficace, employée par saint Paul pour exprimer la vraie nature de la sainteté chrétienne qui est essentiellement christologique. L’apôtre exprime la même idée quand il exhorte les Philippiens à « avoir en eux les sentiments qui étaient en Jésus-Christ ». Il ne s’agit donc pas de poursuivre un modèle abstrait de vie morale, et encore moins de la fameuse « héroïcité des vertus », mais de pouvoir dire avec l’apôtre : « Ce n’est plus moi qui vis mais le Christ qui vit en moi ». Ici, on voit la distance qui sépare la sainteté chrétienne de celle que, à la suite d’Albert Camus, beaucoup proposent comme une forme laïque et même athée de sainteté.

Les saints servent-ils à l’Église ?

Les saints sont l’Évangile vécu ; ce sont eux qui rendent l’Église crédible ; ils sont vraiment « le sel de la terre ». Il est difficile d’imaginer comment serait l’Église de ces deux mille ans sans la foule infinie de saints qui l’ont marquée. Une des choses qui remplit le plus d’étonnement et qui pousse à glorifier Dieu pour ses saints est leur infinie diversité. Dieu réussit à faire des saints avec toutes les étoffes, à faire éclore ses fleurs dans tous les climats, même les plus hostiles. Il y a eu des époques plus ou moins « spirituelles » et vivantes dans la vie de l’Église, mais les saints n’ont fait défaut à aucune.

Existe-t-il une sainteté du quotidien ?

La sainteté est essentiellement du quotidien. Nous avons fait un long chemin pour libérer l’idée du saint d’état et de style de vie particuliers, auxquels elle est trop longtemps restée liée. Il y a encore beaucoup de chemin à faire, toutefois, pour donner au peuple chrétien la véritable idée de la sainteté et surmonter la crainte que ce mot inspire encore à beaucoup qui l’associent à des épreuves et des mortifications hors de leur portée. Un jour peut-être, au ciel, nous serons émerveillés en découvrant des géants de sainteté demeurés tout à fait inconnus aux hommes. Il y a des fleurs que Dieu ne cultive que pour lui, des saints dont le parfum n’a été respiré que par Dieu et peut-être par ceux qui ont vécu à leurs côtés.

À quoi reconnaît-on les saints ?

Ce serait long de répondre à cette question, c’est pourquoi je ne nomme qu’un signe infaillible de reconnaissance : l’humilité. L’Église catholique, à travers les siècles, s’est donné toute une série de critères objectifs en vue de la « canonisation » des saints. Elle a accumulé en cela une expérience indubitable et sage, toujours en voie de perfectionnement. Si je peux me permettre un souhait, c’est que ces critères reflètent de plus en plus l’idéal biblique rappelé par le Concile, donnant une nouvelle sève à la doctrine scolastique de la sainteté jusqu’ici dominante, axée sur les « vertus ». C’est précisément pour cela que j’ai choisi pour thème des méditations de carême la synthèse biblique la plus complète et la plus compacte d’une sainteté fondée sur le kérygme, qui est celle qu’a tracée saint Paul dans la partie parénétique de la lettre aux Romains (chap. 12-15).

© L’Osservatore Romano

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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