« Il faut défendre la communauté contre tout type de division » : avec l’unité, le pape François a recommandé aussi la sollicitude et la joie chrétienne aux prêtres, aux consacrés, aux séminaristes, mais aussi aux évêques présents en l’église du Saint-Rosaire, qui sert de cathédrale au diocèse de Chittagong (Bangladesh), ce samedi matin, 2 décembre 2017, à 5 h 45 à Rome (10h 45 heure locale), après d’être rendu en visite privée à la Maison Mère Teresa de Tejgaon, dans la banlieue sud de Dacca. C’est son troisième et dernier jour au Bangladesh. Environ 1 500 personnes ont participé à la rencontre.
Il s’agit d’une paroisse connue comme la « Japamala Rani Church ». L’église ancienne, fondée en 1677 par les pères Augustins portugais, est maintenant une chapelle de l’Adoration perpétuelle du Saint-Sacrement. Le pape a été accueilli sur le parvis de l’église nouvelle par des chants et des danses, et par l’évêque de Khulna, Mgr Romen Boiragi, par le curé et par le président de l’Association des religieux du Bangladesh.
L’archevêque de Chittagong (sud), Moses M. Costa, C.S.C., a introduit la rencontre par quelques paroles de bienvenue avant les témoignages d’un prêtre, d’un missionnaire, d’une soeur, d’un religieux et d’un séminariste.
Le pape François n’a pas prononcé le discours préparé, mais il l’a remis aux évêques. il a parlé d’abondance du cœur en espagnol, avec une traduction consécutive en anglais, avec trois points principaux : sollicitude, communion, et joie chrétienne.
Attention et discernement
Une sollicitude qui soit “attention”, “prière”, “discernement” et “tendresse”, la « tendresse d’un père ». Le pape a pris l’exemple de la semence, de la graine, dont il est question chez le prophète Isaïe : « La plante vient de la graine, et cela n’est ni tien ni mien. C’est de Dieu. Et c’est Dieu qui donne la croissance. Chacun de nous est une plante, mais pas par notre mérite, mais par la graine dont on est formés. Alors je dois la protéger, afin qu’elle grandisse. »
Le pape insiste sur le fait de « prendre soin », une expression qu’il aime et qu’il emploie par exemple dans Laudato si’ pour prendre soin de la création.
Ici il s’agit, dit-il, de prendre soin de « la vocation reçue » et de même être « attentifs » à un enfant, une personne âgée, un malade.
Et une vocation, il faut s’en occuper avec une « tendresse humaine » et il avertit que si dans la communauté le prêtre manque de cette « tendresse humaine », la « petite plante ne peut pas grandir » et elle risque même de se « dessécher ».
Certes, fait observer le pape il y a l’ennemi qui « vient de nuit » et sème d’autres graines, cette zizanie « qui fait beaucoup de mal aux communautés »: comme à Milan en mars dernier, le pape invite les prêtres et les consacrés à savoir discerner. Mais raison de plus pour bien « prendre soin » des bonnes graines et la distinguer des mauvaises.
Dans ce sens, prendre soin implique aussi de « discerner » et l’on discerne si l’on a un « cœur priant ». Prendre soin, ajoute le pape c’est « prier » et « prier celui qui a semé de m’enseigner à irriguer la petite plante ».
Et si moi je suis « en crise » ? « Je dois demander à Dieu de prendre soin de moi. Prendre soin et demander au Seigneur de prendre soin, de donner la tendresse que nous devons donner.
L’harmonie et l’unité
L’harmonie. Le pape recommande la vie de communauté, la communion, l’unité et la paix entre prêtres, entre séminaristes, entre consacrés, et dans la conférence épiscopale: « Il faut défendre la communauté contre tout type de division. »
Le pape a cité le cardinal Jean-Louis Tauran pour qui le Bangladesh est le meilleur exemple d’harmonie pour le dialogue interreligieux: le pape est applaudi et il dit: “Cet applaudissement va au cardinal Tauran!” Il fait l’analogie en souhaitant que l’Eglise aussi brille par son harmonie interne.
Or, dit-il, l’ennemi de l’harmonie dans une communauté religieuse, c’est « l’esprit de commérage »: rires et applaudissements. Le pape cite la lettre de saint Jacques: la langue détruit une communauté, le fait de “mal parler des autres, de souligner les défauts des autres”.
Et une des menaces contre l’unité, ce sont les commérages qui se combattent de trois façons, explique le pape. En “se mordant la langue” plutôt que de “faire du mal à un frère ou une soeur”. Et s’il y a un problème en en parlant directement “en face” à la personne concernée. Et si la “prudence” veut que ce ne soit pas possible, en en parlant “à la personne qui peut remédier et seulement à elle”. Le pape redit que les médisances sont comme des “bombes” de terroristes: celui qui médit “pose sa bombe, il s’en va, elle explose”.
« J’ai vu des communautés être détruites par l’esprit de commérage. Mordez-vous d’abord la langue », insiste le pape. Applaudissements.
Troisième point : la joie chrétienne
Le pape a proposé un examen de conscience : « Comment va ta joie?” “Cela fait mal, a-t-il dit, quand quelqu’un rencontre des évêques, prêtres, séminaristes, consacrés, amers avec un visage triste. On a envie de lui demander: qu’as tu pris au petit déjeuner, du vinaigre?” Rires. Le pape recommande la joie “même dans les moments difficiles”: cela donne la paix et la sérénité. Il cite Thérèse d’Avila et Thérèse de Lisieux. Cet épisode notamment où sainte Thérèse de l’Enfant Jésus accompagne au réfectoire une soeur âgée pas commode. A un moment, parvient de l’extérieur une musique de fête. Et Thérèse se dit, souligne le pape: « Ma grande joie c’est celle-ci, et je ne l’échange pas pour une autre ».
Il recommande cette “joie du coeur” et il confie: “J’ai beaucoup de tendresse quand je rencontre des prêtres, soeurs, évêques âgés dont yeux sont indescriptibles de joie et de paix”. Il ajoute: “On le voit chez les veilles religieuses qui ont les yeux pétillants parce qu’elles ont la sagesse de l’Esprit Saint. »
Le cardinal archevêque de Dacca, Patrick D’Rozario, a remercié le pape d’avoir “parlé l’Evangile” et la rencontre s’est terminée par une prière d’intercession lue par une moniale et la bénédiction du pape François.
Dans l’assistance on notait la présence, notamment, parmi les prêtres, reconnaissable entre tous, avec sa chevelure et sa barbe abondantes, et ses lunettes aux montures blanches, un missionnaire xavérien italien, au Bangladesh depuis 1982, le père Riccardo Tobanelli, qui accueille les enfants des rues du Bangladesh dans sa maison associative et sur lequel Radio Vaticna a réalisé un reportage vidéo (Xavier Sartre).
Etaient également présents, entre autres, les cardinaux Pietro Parolin, Secrétaire d’Etat, Fernando Filoni (Evangélisation des Peuples), Oswald Gracias (Bombay, Inde, président de la Fédération des conférences épiscopales d’Asie), Mgr Angelo Becciu, Substitut de la Secrétairerie d’Etat.
Bénédiction des enfants
Le pape s’est ensuite arrêté au cimetière de la paroisse, l’un des deux cimetières chrétiens de la capitale pour se recueillir et bénir les tombes aux croix blanches, sous un grand crucifix coloré.
Il s’est aussi rendu dans l’ancienne église du Rosaire, celle qui date du XVIIe s. Il a été accueilli par l’évêque de Dinajpur, Mgr Sebastian Tudu, par la supérieure générale et la supérieure de la maison qui accueille 200 orphelins.
Il les a remerciés de leur « joie « et de leur « accueil »: « Merci beaucoup! Et je voudrais voudrais vous demander une chose: priez pour moi. Vous me le promettez? [“Oui!”] Ah, bien. Et je voudrais vous faire une suggestion, je voudrais vous donner un conseil. Le soir, avant d’aller dormir, priez un Ave Maria à la Vierge. Chaque soir, avant d’aller au lit, prier un Ave Maria à la Vierge. Vous le ferez? [“Oui!”] Maintenant prions la Vierge tous ensemble. Ave Maria. »
Le pape leur a donné sa bénédiction avant d’ajouter en anglais: « Thank you very much. »Il est ensuite rentré déjeuner à la nonciature.
Dans l’après midi, le pape a rencontré les jeunes, avant la cérémonie de congé à l’aéroport et son départ pour Rome, vers 17h, pour une arrivée à Rome à 23h, après onze heures de vol.
Rencontre avec le clergé et les consacrés, Bangladesh © L'Osservatore Romano
Bangladesh: "Il faut défendre la communauté contre tout type de division", recommande le pape
Rencontre avec les prêtres et les consacrés