Saint-Louis-des-Français

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"Dieu fort qui détestes la guerre", par Mgr Bousquet

Messe à Saint-Louis-des-Français

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« Dieu fort qui détestes la guerre, Dieu juste qui démasques tout mensonge, attaque-toi, autour de nous et en nous-mêmes aux forces orgueilleuses du mal qui engendrent les atrocités et les souffrances ; et nous pourrons ensemble faire honneur à notre nom de fils de Dieu »: c’est l’invocation liturgique commentée par Mgr Bousquet.

Mgr François Bousquet, recteur, a en effet présidé la veillée de prière et la messe à l’intention des victimes des attentats de Paris et de leurs familles, pour la France et la paix, lundi 16 novembre, à Saint-Louis-des-Français, à Rome (Lectures: Michée 4, 1-4 ; Ps 84 ; Jn 15, 9-12).

Voici le texte complet de l’homélie de Mgr Bousquet, que nosu publions avec l’aimable autorisation de l’auteur.

Homélie de Mgr Bousquet

Ah ! Frères et sœurs, qu’elle est puissante l’invocation de la prière qui a ouvert notre célébration : « Dieu fort qui détestes la guerre, Dieu juste qui démasques tout mensonge, attaque-toi, autour de nous et en nous-mêmes aux forces orgueilleuses du mal qui engendrent les atrocités et les souffrances ; et nous pourrons ensemble faire honneur à notre nom de fils de Dieu. »

Que venons-nous faire ici ce soir, sinon nous réconforter mutuellement en confiant à Dieu les morts et les blessés des attentats de Paris, et de tous les attentats, en Syrie, au Liban, en Iraq et ailleurs. Oui, lui confier les victimes, pour qu’Il accueille les morts et soutienne les vivants, car nous sommes liés en un destin commun, sur la terre comme au ciel.

Si nous prions, ce n’est pas qu’il n’y aurait que cela à faire quand nous sommes désemparés, c’est pour que la prière soit efficace de sa première efficacité : lutter en nous-mêmes et ensemble pour que notre volonté soit conforme à la volonté de Dieu, pour que notre désir soit conforme à son désir, Lui, le Dieu vivant qui nous veut vivants, et libérés de tout désir de haine ou de vengeance. Et lutter pour que notre colère soit semblable à la sienne, qui ne supporte pas que l’humain soit abîmé ou défiguré, qui fustige ceux qui transforment le Temple en caverne de voleurs, mais qui s’engage de tout lui-même pour nous libérer de la violence et de son cortège de terreur.

De tout lui-même. Car il est Père, Père d’une multitude de fils, adoptés dans le Christ Jésus, pour vivre et grandir en fraternité ; et Créateur d’une création belle et harmonieuse, destinée à être une terre qui est sainte d’être habitée ensemble. Car il est Fils, lié d’une manière inouïe à ce que nous devenons, en faisant corps avec nous jusqu’à la fin des temps ; si bien que son visage est à reconnaître dans l’innocent, et son action aussi dans le pécheur qui revient du péché, dont l’entrelacs dérisoire mène toujours peu ou prou à la mort. Car il est Esprit, Esprit d’amour et de vie, qui recrée sans cesse ce qui est démoli, qui suscite le pardon, qui travaille sans cesse à ce que soit transfiguré ce qui a été défiguré, et qui nous donne enfin une autre mémoire pour l’avenir. Oui, il s’engage de tout lui-même.

Et c’est pourquoi nous pouvons espérer, c’est-à-dire entendre non comme une incantation, mais comme la réalité de la promesse, qui a commencé de s’accomplir dans le Verbe incarné et crucifié, et qui fait appel à nos forces et à la conversion des cœurs, la prophétie de Michée : « De leurs épées ils forgeront des socs de charrue, et de leurs lances des faucilles. On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on ne s’entraînera plus pour la guerre. Chacun pourra s’asseoir sous sa vigne et sous son figuier, sans que personne ne l’inquiète. La bouche du Seigneur de l’univers a parlé ! »

Cette bouche, elle a parlé dès l’origine, au cœur des hommes, en y mettant un désir de paix, contre toutes tentations de violence.

Elle a parlé de manière ultime et décisive, avec le Verbe de la croix, qui est cri et silence : « Le centurion, voyant qu’il avait ainsi expiré, s’écria : vraiment, cet homme était le Fils de Dieu » (Mc 15,39) Non pas parce qu’il est mort, mais parce qu’il est mort ainsi : il ne s’est pas retourné avec violence contre les bourreaux, il a pris sur lui, pour que l’autre puisse changer et vivre, et il y a laissé sa peau : là, on a reconnu Dieu.

Cette bouche a parlé dès l’origine, elle a parlé à la croix, elle parle encore aujourd’hui concrètement, lorsqu’elle s’efforce d’inspirer, de donner le souffle et la patience de l’Esprit, sa sagesse et son efficacité à ceux qui veulent l’écouter, tous ceux qui prennent leur responsabilité

de défense et de justice, tous les gouvernants et diplomates, qui cherchent les conditions de la paix, en traitant les causes et non seulement les symptômes, et aussi tous les artisans de paix, qui soignent, nourrissent, éduquent, accompagnent les populations, et viennent au secours des victimes dont ils partagent les situations difficiles.

Quant à nous, restons unis, et proches de ceux qui ont souffert de ces violences aveugles et bestiales. Tenons le cap d’une solidarité, mais de telle sorte que notre désir de paix soit plus fort que la haine, en laissant retentir la parole évangélique qui a été proclamée une fois encore, ce soir, en ces circonstances si particulières : « Si vous êtes fidèles à mes commandements vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé fidèlement les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que vous soyez comblés de joie. Mon commandement, le voici : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »

C’est dans les temps difficiles qu’il est héroïque, et libérateur en même temps, de vivre cet amour sans rivage. Entendons encore cette prière proposée par le Rituel pour temps de guerre ou de troubles graves : « Dieu, qui as envoyé ton Fils dans ce monde pour qu’il le réconcilie avec Toi, suscite en notre humanité divisée des artisans de paix ouverts à ton Esprit : que les hommes s’appuient sur Lui pour retrouver confiance entre eux, et renoncent à régler par la violence les conflits qui les opposent. »

C’est dans cette paix que nous confions au Seigneur tous ceux pour qui nous prions, en les présentant à Dieu en cette eucharistie : les victimes, leurs familles, mais aussi notre pays et tous les pays du monde qui aspirent à la paix ou souffrent de la violence.

Que Dieu nous ait tous en sa garde, jusqu’à la vie éternelle.

Amen.

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ZENIT Staff

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