« Le sort des pauvres et la fragilité de la planète sont intimement liés » : c’est le cœur du message de l’encyclique du pape François, explique le cardinal Turkson.
Le cardinal Peter Turkson, président du Conseil pontifical ‘Justice et Paix’, est en effet intervenu à « l’Événement de haut niveau sur les changements climatiques », organisé à l’ONU, à New York, lundi 29 juin 2015.
« La lettre encyclique Laudato Si’ du pape François soutient que le sort des pauvres et la fragilité de la planète sont intimement liés, et encourage ainsi les gouvernements du monde à embrasser l’écologie intégrale comme l’approche nécessaire à un développement qui inclue tout le monde et protège la terre », explique le cardinal Turkson.
Il souligne que l’encyclique vise à l’action : « Le pape François nous exhorte à faire des choix courageux à tous les niveaux – comme une seule famille mondiale, comme nations, comme communautés, comme individus – « pour inverser la tendance au réchauffement global » et réduire les impacts négatifs du changement climatique. »
Il conclut : « C’est le chemin que nous devons prendre. C’est le chemin vers Paris. C’est la voie vers un avenir meilleur. »
Voici notre traduction intégrale de l’allocution du cardinal Turkson.
A.B.
Allocution du card. Turkson
Excellences,
Monsieur le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies,
Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies,
Mesdames et Messieurs les modérateurs et conférenciers,
Mesdames et Messieurs :
Je vous apporte les salutations d’affection et d’encouragement du pape François. Sa Sainteté espère que ce rassemblement extraordinaire et ce débat honnête porteront du fruit dans les décisions importantes qui attendent la communauté internationale.
Le Sommet de la terre de 1992 à Rio de Janeiro a proclamé que « les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable » (1). Aujourd’hui, plus de deux décennies plus tard, la lettre encyclique Laudato Si’ du pape François soutient que le sort des pauvres et la fragilité de la planète sont intimement liés, et encourage ainsi les gouvernements du monde à embrasser l’écologie intégrale comme l’approche nécessaire à un développement qui inclue tout le monde et protège la terre.
Grâce à son Groupe d’experts intergouvernemental sur les changements climatiques, l’Organisation des Nations Unies a fait usage de la meilleure recherche scientifique disponible. Nous devons permettre à ces conclusions scientifiques de nous toucher profondément de sorte que nous voyions et entendions combien les pauvres souffrent et combien la terre est maltraitée.
Dans l’encyclique Laudato si ‘, le Saint-Père affirme que « le changement climatique est un problème global aux graves répercussions environnementales, sociales, économiques, distributives ainsi que politiques, et constitue l’un des principaux défis actuels pour l’humanité… Malheureusement, il y a une indifférence générale face à ces tragédies qui se produisent en ce moment dans diverses parties du monde. Le manque de réactions face à ces drames de nos frères et sœurs est un signe de la perte de ce sens de responsabilité à l’égard de nos semblables, sur lequel se fonde toute société civile ».
Le pape François affirme en outre que « le climat est un bien commun, de tous et pour tous ». Mais « si la tendance actuelle continuait, ce siècle pourrait être témoin de changements climatiques inédits et d’une destruction sans précédent des écosystèmes, avec de graves conséquences pour nous tous ». Prudence et précaution doivent prévaloir et l’humanité est appelée à reconnaître la nécessité de changer de modes de vie, de production et de consommation.
Le pape François nous exhorte à faire des choix courageux à tous les niveaux – comme une seule famille mondiale, comme nations, comme communautés, comme individus – « pour inverser la tendance au réchauffement global » et réduire les impacts négatifs du changement climatique.
Nous sommes tous confrontés – en tant que dirigeants et représentants des nations du monde, en tant qu’adultes aujourd’hui et au nom de nos enfants et de leurs enfants – au besoin « urgent et impérieux de développer des politiques pour que, les prochaines années, l’émission du dioxyde de carbone et d’autres gaz hautement polluants soit réduite de façon drastique ». « La technologie reposant sur les combustibles fossiles très polluants – surtout le charbon, mais aussi le pétrole et, dans une moindre mesure, le gaz – a besoin d’être remplacée, progressivement et sans retard » avec un accès aux énergies renouvelables et une utilisation de celles-ci qui soient à la fois intelligents et généralisés, facilitant cette transition énergétique.
Pour vaincre la pauvreté et réduire la dégradation de l’environnement, il faudra que la communauté humaine revoie sérieusement le modèle dominant de développement, de production, de commerce et de consommation. Pourtant, le plus grand défi n’est pas scientifique ni même technologique, mais plutôt dans nos esprits et nos cœurs. « La même logique qui entrave la prise de décisions drastiques pour inverser la tendance au réchauffement global, ne permet pas non plus d’atteindre l’objectif d’éradiquer la pauvreté. Il faut une réaction globale plus responsable, qui implique en même temps la lutte pour la réduction de la pollution et le développement des pays et des régions pauvres ».
Un examen et une réforme courageux n’auront lieu que si nous tenons compte de « l’invitation à chercher d’autres façons de comprendre l’économie et le progrès ». La dimension politique a besoin de rétablir un contrôle démocratique sur l’économie et des finances, c’est-à-dire sur les choix fondamentaux faits par les sociétés humaines.
Excellences, Mesdames et Messieurs, voilà le chemin que nous devons prendre. C’est le chemin vers Paris. C’est la voie vers un avenir meilleur.
Merci beaucoup.
© Traduction de Zenit, Constance Roques