Mgr Paul Richard Gallagher

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Le Saint-Siège pour des relations internationales sous le signe de l’amitié

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Le Saint-Siège désire que les relations internationales « se développent sous le signe de l’amitié » explique le « ministre des Affaires étrangères » du Saint-Siège, Mgr Gallagher, à l’occasion d’un colloque sur l’histoire des relations de la Hongrie et du Saint-Siège.

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Mgr Paul R. Gallagher, secrétaire pour les Relations avec les États, est en effet intervenu, ce vendredi 12 juin, au Colloque organisé par l’ambassade de Hongrie près le Saint-Siège et par l’Académie de Hongrie à Rome, à l’occasion du 95ème anniversaire de l’institution de la nonciature apostolique de Budapest (1920) et du 25ème anniversaire de sa réouverture (1990).

Mgr Gallagher a rappelé les longues années de la persécution, puis l’Accord de 1990 qui « a inauguré un nouveau chapitre des relations amicales ».

« Il a offert à l’Église un espace adéquat pour s’employer, en particulier, à l’éducation des jeunes dans le respect de ces valeurs éthiques et morales que sont la paix, la justice et le patriotisme, qui font partie de la meilleure tradition nationale », a expliqué Mgr Gallagher.

Il a souligné que le Saint-Siège « offre à tous les peuples son amitié, ses services et ses énergies spirituelles et morales » qu’en même temps, il « désire que les relations internationales se développent sous le signe de l’amitié. »

Il citait Paul VI : « Le passé a été trop souvent marqué par des rapports de force entre nations : vienne le jour où les relations internationales seront marquées au coin du respect mutuel et de l’amitié, de l’interdépendance dans la collaboration, et de la promotion commune sous la responsabilité de chacun » (Populorum Progressio 65).

Voici notre traduction intégrale de l’intervention de Mgr Paul Richard Gallagher.

Intervention de Mgr Gallagher

Excellences,

Mesdames et Messieurs,

Je remercie vivement les organisateurs pour l’invitation qu’ils m’ont faites d’introduire cette conférence, promue par l’Ambassade de Hongrie près le Saint-Siège, en collaboration avec l’Académie de Hongrie à Rome, à l’occasion du 95ème anniversaire des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et la Hongrie et du 25ème anniversaire de leur rétablissement, après 45 années de rupture.

Il y a vingt-cinq ans, précisément le 7 février 1990, le cardinal Agostino Casaroli, secrétaire d’État, partit pour une visite de six jours en Hongrie, accompagné de Mgr Francesco Colasuonno, nonce apostolique avec charges spéciales. La visite marqua la reprise des relations diplomatiques, à travers l’Accord signé à Budapest, au cours de ladite visite, le 9 du même mois

En introduisant la conférence de ce jour, je voudrais rappeler brièvement la signification de cet Accord, stipulé « à la suite de la profonde évolution politique et sociale qui s’est produite en Hongrie », qui a conclu un passé d’accords et de lois restreignant la liberté religieuse de la période d’oppression, a inauguré un présent de relations amicales et a prévu un avenir de nouveaux accords bilatéraux.

La persécution contre l’Église catholique en Hongrie a commencé avec la réforme agraire de 1945, qui expropria l’Église de la majeure partie de ses propriétés foncières, et s’est poursuivie en 1948 avec la nationalisation des écoles, appartenant jusqu’alors en grande partie à l’Église, avec les obstacles entravant l’enseignement religieux dans les écoles, avec la répression des organisations et de la presse catholique, avec la suppression des ordres et des congrégations religieuses en 1950. Un décret gouvernemental de 1957 rendait pratiquement impossible au Saint-Siège de pourvoir au gouvernement des diocèses. Par disposition du pape Jean XXIII, en 1963, Mgr Casaroli, alors sous-secrétaire de la Congrégation pour les affaires ecclésiastiques extraordinaires, effectua deux voyages à Budapest et à Prague pour reprendre les contacts, interrompus depuis des années, avec les gouvernements communistes. « Il s’agissait de voir ce qu’il était possible de faire pour le service de l’Église dans la Hongrie et dans la Tchécoslovaquie communistes, en cherchant à ne pas limiter le dialogue aux seuls ‘cas’ Mindszenty et Beran » (Agostino Casaroli, Le martyre de la patience. Le Saint-Siège et les pays communistes (1963-89), Turin 2000, 9). Grâce à de tels contacts, le 15 septembre 1964, fut signé au siège du Ministère des affaires étrangères à Budapest une Déclaration avec en annexe un protocole qui reconnaissait au Saint-Siège le droit de nommer les évêques. Le gouvernement se réservait toutefois celui de donner ou de refuser son accord aux nominations. Aux évêques, en outre, était imposée l’obligation de prêter serment de fidélité à la République populaire hongroise. Une autre entente fut obtenue le 23 janvier 1969, relative à la nomination de onze archevêques, évêques et administrateurs apostoliques et, le 11 janvier 1975, à propos de la nomination de cinq nouveaux évêques. Malgré les ententes partielles, la vie demeurait difficile pour l’Église sous l’œil vigilant de l’État et du Bureau des cultes. L’accord de 1990 a déclaré terminée cette période : « Les deux parties considèrent dépassées les ententes partielles obtenues par la Déclaration souscrite à Budapest le 15 septembre 1964 avec, en annexe, le protocole et les deux pièces jointes et les déclarent désormais abrogées ».

En second lieu, l’Accord de 1990 a inauguré un nouveau chapitre des relations amicales, rétablissant les relations diplomatiques entre le Siège apostolique et la Hongrie, au niveau de la nonciature, de la part du Saint-Siège, et au niveau de l’ambassade, de la part de la République hongroise. Le Saint-Siège serait représenté à Budapest par un nonce apostolique, tandis que la République de Hongrie accréditerait auprès du Siège apostolique un ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire. Seulement un mois plus tard, le 28 mars, a été nommé nonce apostolique en Hongrie Son Excellence Mgr Angelo Acerbi, auquel a succédé, en 1997, l’archevêque Karl-Joseph Rauber qui, au consistoire du 14 février dernier, a été créé Cardinal de la Sainte Église romaine. Désormais, les questions concernant l’Église catholique en Hongrie seraient réglées par le Code de droit canonique ou par les règles de la nouvelle loi sur la liberté de conscience et de religion et sur les Églises. Il vaut la peine de rappeler qu’après la chute du régime communiste en Hongrie, parmi les premiers actes du nouveau gouvernement eut lieu la révision de la législation ecclésiastique avec la reconnaissance de la pleine liberté de religion.

En troisième lieu, l’Accord cité prévoyait qu’à l’avenir « des questions particulières d’intérêt mutuel qui nécessiteraient des ententes bilatérales » pourraient « être résolues d’un commun accord ». En ce sens, l’Accord sur l’assistance religieuse aux Forces armées et à la Police de frontière, stipulé en 1994, a permis à l’Église catholique, depuis des siècles liée à la nation hongroise, de remplir de manière appropriée son action pastorale dans un domaine vital et important de la société. Il a offert à l’Église un espace adéquat pour s’employer, en particulier, à l’éducation des jeunes dans le respect de ces valeurs éthiques et morales que sont la paix, la justice et le patriotisme, qui font partie de la meilleure tradition nationale.

Un nouvel accord, stipulé en 1997, établissait que les activités des entités ecclésiales à caractère social et éducatif jouissent du même traitement que celui qui est réservé aux institutions publiques analogues. En outre, il garantissait à l’Église une autonomie financière adéquate pour subvenir aux besoins des activités proprement religieuses à travers la restitution en partie des biens nationalisés, à travers l’obligation de l’État de fournir une aide économique à titre d’indemnisation pour les biens qu’il n’était pas possible de restituer à l’Église ; et e
nfin, à travers la décision des fidèles de destiner aux Églises 1% de l’impôt sur le revenu des personnes physiques en faveur des communautés religieuses de leur choix. L’accord qui a été signé le 21 octobre 2013 et ratifié le 10 février 2014 a apporté certaines modifications à celui de 1997, pour le mettre à jour dans le contexte de la nouvelle législation liée à la Loi fondamentale de la Hongrie, promulguée le 25 avril 2011.

Je fais volontiers remarquer que l’Accord de 1990 exprime « l’intention de remettre officiellement en vigueur et de développer des relations mutuelles d’amitié ». L’amitié est une relation d’égal à égal, basée sur le respect, sur l’estime et sur la disponibilité réciproques. Mais l’amitié a une signification particulière pour les chrétiens à cause du dessein d’amitié révélé par le Christ. Le Seigneur a dit à ses disciples : « Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître » (Jean 15,15). Dieu invisible, dans son immense amour, parle aux hommes comme à des amis et s’entretient avec eux, pour les inviter et les admettre à la communion avec lui (cf. Dei Verbum 2). Une telle amitié engage. C’est pourquoi l’Église « ne peut pas ne pas établir un dialogue avec la société humaine au milieu de laquelle elle vit » (Christus Dominus, 13) mais elle désire offrir aux hommes de tous les temps « le message d’amitié, de salut et d’espérance que le Christ a apporté au monde » (Paul VI, Discours d’ouverture de la seconde période du Concile, 29 septembre 1963).

Elle offre à tous les peuples son amitié, ses services et ses énergies spirituelles et morales. En même temps, elle désire que les relations internationales se développent sous le signe de l’amitié, comme l’a souhaité le bienheureux Paul VI dans sa lettre encyclique Populorum Progressio, consacrée à la coopération entre les peuples : « Le passé a été trop souvent marqué par des rapports de force entre nations : vienne le jour où les relations internationales seront marquées au coin du respect mutuel et de l’amitié, de l’interdépendance dans la collaboration, et de la promotion commune sous la responsabilité de chacun » (n.65).

Pour sa part, le Siège apostolique, de qui saint Étienne reçut la couronne, demeurée au long des siècles symbole de l’unité nationale, a le désir de continuer à développer les relations d’amitié avec la Hongrie. J’espère que les contributions des chercheurs qui interviendront à ce colloque feront connaître les événements importants de l’histoire hongroise en lien avec le Saint-Siège. Merci pour votre écoute et pour votre attention.

© Traduction de Zenit, Constance Roques

 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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