Le cerveau, un boulet ? (2) Façon de parler

Les indices pensables Episode 36

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Résumé des épisodes précédents : Nous sommes  dotés d’un cerveau extrêmement couteux à entretenir car iI consomme environ 20% de notre énergie métabolique alors qu’il ne représente que 2 % de notre poids total.

Selon  une étude américaine parue le 25 août 2014 dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), il est même possible que ce coût onéreux, soit la raison pour laquelle l’enfance des êtres humains est si longue. Dans la classe des mammifères, les primates grandissent en général moins vite que les autres animaux. Et chez les primates, Homo sapiens semble être celui dont la croissance est la plus lente.  On se demande pourquoi.

Plusieurs hypothèses sont aujourd’hui énoncées par les scientifiques (1) : les longs apprentissages que nécessitent les techniques complexes indispensables à la survie des êtres humains, auraient ralenti le développement pré-adulte.

Mais aussi, cette autre théorie envisagée par « de nombreux biologistes » selon le blog scientifique du Monde (2):  Le scénario « du cerveau coûteux et du compromis énergétique : la structuration de notre énorme cerveau (le plus gros du monde des mammifères, si on rapporte sa masse à celle d’un individu) pendant l’enfance,  nécessite une telle quantité d’énergie que l’organisme serait obligé d’arbitrer, de faire des choix dans la distribution du carburant qu’est le glucose, de privilégier la matière grise au détriment de la croissance corporelle. »

On mesure donc une fois de plus le caractère onéreux du cerveau humain, qui nous a conduits à la métaphore (exagérée ?) du « boulet ». Les lecteurs auront compris que si ce boulet s’était avéré  aussi encombrant que celui des Dalton s’évadant de leur pénitencier pour une cavale hasardeuse, les homo sapiens ne seraient pas allés bien loin avant d’être stoppés dans leur audacieuse échappée. Le « poids » de ce  cerveau aurait freiné, voire même interdit toute progression-évolution de l’être humain. Puisque cela n’a pas été le cas, il faut croire que son coût considérable valait la peine d’être payé pour permettre la survie et le développement remarquable d’homo sapiens.

Tout compte fait,  il est plus intelligent de tout faire pour garder le cerveau… Y compris, prendre le risque de prolonger la durée de l’enfance qui a pour conséquence de fragiliser l’espèce en retardant la reproduction.

Comme le confirme le site de l’Université de Genève (3) : « Cependant, les cerveaux sont coûteux : les neurones coûtent beaucoup d’énergie, et donc les cerveaux sont en compétition avec les autres organes pour l’énergie. Ils sont coûteux aussi d’une autre manière: les grands cerveaux mettent longtemps à maturer, ce qui ralentit la reproduction. Il ressort de tout cela que les animaux à grand cerveau sont rares. »

Parmi les rares, il n’y a pas que l’Homme, nous noterons qu’il y a également  les chondrichtyens ! Ces poissons à squelette toujours cartilagineux, dont les plus connus sont les requins et les raies. Or il se trouve que l’encéphalisation des chondrichtyens est un mystère. A quoi cela sert-il aux requins et aux raies d’avoir un grand cerveau?  Cette caractéristique est d’autant plus étonnante qu’elle est très ancienne: les fossiles montrent qu’il y a 300 millions d’années, certains requins étaient déjà fortement encéphalisés. En fait, les requins ont été les premiers vertébrés à « expérimenter » l’encéphalisation! (4) 

Fermons la parenthèse des dents cerveaux de la mer. Les grands cerveaux sont rares, ce luxe coûte cher, autant s’en servir. C’est ce que fait l’être humain, qui doit apprendre tant de choses, lui qui est si démuni à la naissance. Un sérieux handicap qui finit par se retourner à son avantage…

 (A suivre…)

Brunor

(1)   Comme on peut le constater, dans ce domaine, nous n’en sommes qu’à l’étape des recherches et pas encore à celle des sciences exactes, c’est pourquoi, nous ne pouvons pas encore utiliser ces hypothèses dans nos albums des indices pensables, puisque notre enquête ne peut s’appuyer que sur des données acquises et confirmées. Mais le coût onéreux du cerveau en est une.

(2)   http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2014/08/31/pourquoi-lenfance-des-humains-est-elle-si-longue/

(3)   http://ethologie.unige.ch/etho4.13/par.date/2013.09.30.htm

(4)   On notera que la fameuse « utilisation de 5, 10,  ou 20% des capacités de notre cerveau » n’est pas une donnée acquise par les sciences exactes,  mais plutôt un lieu commun très approximatif, dans le style des fausses croyances. De fait : que signifie utiliser 10 % de son cerveau ? C’est une estimation subjective, sans doute une façon de dire qu’il nous reste des potentialités à découvrir… On pourrait encore l’entendre d’une autre façon. Si mon cerveau détient la potentialité d’apprendre 10 langues, et que j’en apprends que deux, je n’utilise en effet que 20% des capacités de mon cerveau dans ce domaine précis. Mieux vaut se mettre d’accord sur les définitions avant de débattre d’un sujet.

(5)   Erratum : dans la chronique 35,  en Genèse 27 : l’original hébreu n’est pas nichmot (aucun signe de pluriel dans ce mot) mais nichmat : état construit singulier de nichma.
La traduction : souffle/haleine de vie convient donc très bien.

Copyrights : Brunor


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