Résumé de l’épisode : Nous avons appris que les atomes ne sont pas éternels, les premiers sont apparus 380 000 ans après le Big Bang. Imaginons que la théorie des multivers soit vraie, et que les atomes aient toujours existé dans des univers précédents. Il reste la question : les atomes sont-ils capables de s’organiser SEULS pour construire des êtres vivants ?
Imaginer que la théorie des multivers soit possible, voire vraie, c’est à la mode, mais il faut savoir que cette théorie (ou hypothèse) n’a absolument rien de scientifique. Pourquoi ? Parce qu’elle n’entre pas dans la définition de ce qui est scientifique ou non, selon le principe reconnu par toute la communauté scientifique sous le nom de « Principe de réfutabilité de Poppers » (1).
Autrement dit, même si cette théorie des multivers ou celle des univers parallèle est parfois énoncée par des scientifiques en blouses blanches, cela ne veut pas dire que c’est une hypothèse « scientifique ». En effet, tant qu’on ne pourra pas dépasser le « mur de Planck » (2) (qui définit la limite des connaissances concernant notre Univers ) cette hypothèse restera « métaphysique ou mythique ou mythologique ».
Après cette remarque, revenons à cette question que l’humanité se pose depuis l’Antiquité grecque : les atomes sont-ils capables de s’organiser SEULS pour construire des êtres vivants ? C’est une des affirmations fondamentales du matérialisme depuis Démocrite, vers l’an 400 avant Jésus-Christ : « On passe du Chaos (désordre) au Cosmos (ordonné) sans aucune intelligence organisatrice ».
Comment ? Tout simplement grâce à la rencontre des atomes qui fabriquent tout ce qui existe. Atome… Démocrite donne ce nom à plus petite partie de la matière qu’on ne peut plus couper : a-tomos. Pour lui, ces particules sont en nombre infini et disposent d’un temps infini pour se rencontrer. Aucune intervention d’une intelligence organisatrice, tout se fait au gré du hasard seul. Ainsi, de la rencontre fortuite de plusieurs atomes vont naître (dans le désordre) les animaux, les hommes, les plantes. Pourquoi pas ?
Cette théorie atomiste tente d’expliquer l’Univers et tout ce qu’il contient, en évacuant l’idée de création par un ou plusieurs dieux, en ce sens elle est très contemporaine. Mais la question n’est pas de savoir si cette théorie nous plait, si elle est esthétique ou branchée, la question est de savoir si elle est compatible avec le réel.
Elle n’était pas mise en danger par les sciences, jusque dans une période récente. Cette théorie qu’on appelle « mythe du Chaos » ou philosophie « atomiste » de Démocrite aurait pu être concevable si les êtres vivants étaient composés des mêmes atomes tout au long de leur vie. Si ces atomes qui se sont rencontrés pour fabriquer ce chien Milou étaient comme des pièces d’un puzzle, il suffirait, comme le croyait Démocrite, d’attendre que toutes ces pièces se réunissent par hasard pour que ce vieux Milou puisse exister. Mais aussi, que la réunion de ces pièces soit bien verrouillée pour lui permettre de continuer de vivre sa vie entière avec les mêmes atomes/pièces de puzzle. Surtout, ne pas perdre une de ces précieuses pièces !
Ainsi nous pourrions dire que ces atomes particuliers qui constituent Milou sont responsables de « l’individuation de Milou ». L’individuation, c’est ce qui fait que tel chien est différent de son voisin, pourtant de la même espèce. Car chaque individu est particulier, on arrive à le distinguer des autres.
Or nous venons d’apprendre depuis quelques années que la matière qui constitue Milou ne reste pas dans le corps de Milou. Ce chien n’est pas constitué des mêmes atomes une fois pour toutes, ni vous ni moi non plus.
Tout ce qui contribue à faire que physiquement, je suis « moi » : mes yeux, mes dents, mes os, ma peau, tout cela est remplacé sans cesse ! Nous venons d’apprendre (depuis quelques dizaines d’années) que les atomes qui constituent cette matière de mes yeux ne mes os, de ma peau, tous ces multiples atomes ne restent pas toute ma vie comme un puzzle de matière définitive, mais nous constatons au contraire que ces atomes ne font que passer, ils participent à la composition de mon organisme provisoirement. Puis ils s’en vont.
Donc, ce ne sont pas les atomes qui suffisent à définir mon physique puisqu’ils ne restent pas dans mon organisme. Même les atomes de mon cerveau s’en vont, pourtant je conserve ma personnalité, ma mémoire (surtout la mémoire du passé, celle qui est le plus profondément gravée !)
Ces dernières années, on croyait encore que le nombre de neurones était attribué au départ, et que les neurones n’étaient pas remplacés comme le sont les autres cellules. Depuis peu, on sait qu’ils sont, eux-aussi, provisoires.
Sur internet, vous remarquerez que les articles les plus anciens affirment le non-remplacement des neurones du cerveau, alors que les plus récents tentent de nous libérer de cette fausse croyance ! (Les fausses croyances ont la vie dure.)
Alors ? Ce n’est pas ma matière qui fait que je suis moi, puisque nos biologistes nous apprennent que nos cellules restent dans notre organisme plus ou moins longtemps : en 15 ans, nous avons remplacé la totalité de notre matière ! Il ne reste rien de ce qui faisait mes yeux, mes os mon cerveau, quinze ans plus tôt ! Toutes les cellules, tous les atomes ont été remplacés…
J’apprends ainsi que je suis constitué d’environ cent mille milliards de cellules. Et il parait que chaque jour on déplore la mort de cinquante à soixante-dix milliards de mes chères cellules ! Heureusement elles sont remplacées (mais de moins en moins au fil du temps, ce qui contribue à mon vieillissement).
Même la matière de mon cerveau meurt et de nouveaux atomes sont substitués à ceux qui sont partis… et pourtant, je reste moi-même !! Je garde ma personnalité, mes opinions, mes habitudes, mes goûts et ma mémoire, (tant bien que mal, bien sûr, et ça ne va pas en s’arrangeant, comme pour le nombre de mes cheveux ou leur couleur qui tend vers le blanc)…
Alors ? Qui ou quoi s’occupe de de toutes ces opérations en moi ? Qui assure la maintenance de ces cellules qu’il faut sans cesse remplacer. (Comme à Verdun, où se livrait une guerre d’extermination, il fallait sans cesse du « sang neuf, c’est le cas de le dire !!)
Qu’on le veuille ou non, ce ne sont donc pas les atomes qui s’organisent seuls : ils ont besoin des instructions du message génétique. Et quelqu’un avait compris que les atomes recevaient des instructions d’un principe organisateur. Ce génie c’est Aristote(3)… Nous en parlerons la prochaine fois…
(A suivre…)
Brunor
(1) Je cite Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9futabilit%C3%A9 : Une affirmation est dite réfutable s’il est possible de consigner une observation ou de mener une expérience qui, si elle était positive, entrerait en contradiction avec cette affirmation.
(2) Karl Popper a popularisé le concept. Une proposition réfutable est réputée être une hypothèse scientifique. Si elle est réfutée elle cesse d’être valide.
Il suffirait ainsi d’un seul fossile de lapin ou de poule trouvé dans des couches géologiques datées de l’ère secondaire pour invalider l’idée d’évolution des espèces (ou bien la pertinence de la méthode de datation).
En revanche, une proposition non réfutable (irréfutable au sens logique) est catégorisée comme méta-physique (…) ainsi en est-il des univers parallèles en 2013).
Par exemple, l’affirmation « tous les corbeaux sont noirs » pourrait être réfutée en observant un corbeau blancnote 1. Le cygne noir ne fut d’aill
eurs connu que tardivement. (Voir Théorie du cygne noir.)
Voir l’album : La lumière fatiguée. Les indices pensables, Tome 4, Brunor
Voir Un os dans évolution page 31.
Et http://www.brunor.fr/PAGES/Pages_Chroniques/11-Chronique.html