Mgr Guy Gaucher est « entré dans la vie », comme disait sainte Thérèse pour elle-même. C’était hier, le 3 juillet. Il avait 84 ans.
Né en 1930, il a été ordonné prêtre pour le diocèse de Paris en 1963 et a collaboré à l’aumônerie des étudiants aux côtés de Jean-Marie Lustiger, son grand ami jusqu’au bout. En 1967, il est entré au noviciat des Carmes. A l’université, l’étudiant Gaucher s’était penché sur Georges Bernanos et le « tout est grâce » final du journal d’un curé de campagne l’avait conduit jusqu’à son véritable auteur, Thérèse de l’Enfant-Jésus : une grande amitié est née. Le jeune carme est allé un jour au parloir des carmélites de Lisieux et a dit son regret aux Sœurs qu’on ne faisait pas grand-chose pour elle. Les moniales n’attendaient que cela et l’ont réclamé au provincial.
C’est ainsi que Guy Gaucher est devenu l’un des collaborateurs les plus éminents de l’édition critique des œuvres de Thérèse et du Totum qui en est résulté (Cerf/Desclée De Brouwer, 1992). Nombreux sont les livres et les articles qu’il a publiés. Son petit Histoire d’une vie : Thérèse Martin (Cerf, 1982) a connu une diffusion impressionnante en… 21 langues. Le dernier ouvrage en date, en quelque sorte le couronnement de son œuvre et de son amitié thérésienne, est la grande biographie parue au Cerf en août 2010 : Sainte Thérèse de Lisieux (1873-1897).
Mgr Gaucher restera dans l’histoire pour une autre raison, toujours thérésienne, d’une immense portée ecclésiale. Ordonné évêque de Meaux en 1986, il dut renoncer à cette mission pour des problèmes de santé et devint évêque auxiliaire de Bayeux et Lisieux avec deux missions : collaborer à la cause de béatification d’un thérésien, le fondateur de Notre-Dame de Vie (il en publiera une biographie en 2007 : La Vie du Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus – Henri Grialou – 1894-1967), et surtout s’atteler au dossier qui permettrait au Pape de proclamer Thérèse docteur de l’Eglise.
Thérèse avait besoin d’un évêque, docteur de la foi, pour que l’Eglise puisse affirmer au monde que sa « Voie est sûre ». Le 19 octobre 1997, Jean-Paul II consacrait cette mission à laquelle Mgr Gaucher s’était donné de toute son âme, fort de son expérience de carme, de prédicateur, d’écrivain : Thérèse de Lisieux a un enseignement universel, une « Petite Voie » toute nouvelle, qui jaillit en fait du cœur de l’Evangile. Pour la comprendre toujours plus, Jean de la Croix et le Père Marie-Eugène lui ont donné des clés décisives qui lui ont fait commencer son Jean et Thérèse (Cerf, 1996) en citant ces simples mots : « ‘la plus illustre des filles de saint Jean de la Croix…’ – P. Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus (Je veux voir Dieu, p. 698) ».
Mgr Gaucher, c’est aussi la vie du sanctuaire de Lisieux qu’il a servi et animé pendant près de quinze ans auprès des Recteurs successifs et de l’équipe du Pèlerinage. En combien de pays il a suivi le reliquaire de Thérèse, témoin à la fois habitué et émerveillé des foules qui accueillaient la petite Sainte et son message de miséricorde.
Mgr Gaucher, c’est encore ce cœur bon, ouvert, qui allait à la rencontre de tous avec une simplicité et une humilité conquérantes. Chacun devenait son ami, du plus grand au plus petit, du plus célèbre au plus ignoré, du plus équilibré au plus « paumé », tout ce monde des petits, assoiffés de la tendresse de Dieu.
Mgr Gaucher, c’est enfin ce grand mystère d’une épreuve de santé portée comme une lourde croix de quasi chaque jour, comme s’il lui avait fallu expérimenter ce qu’avait connu Thérèse.
Il sera inhumé jeudi prochain, 10 juillet, à Lisieux, bien sûr, selon son désir.
Lui aussi continuera à faire du bien au ciel, comme il en a toujours fait sur la terre, avec humour et joie.