Samedi 27 février 1858 à Lourdes: les gestes de la foi

Dixième apparition

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Nous sommes toujours dans la phase pénitentielle des apparitions. Jusqu’au 2 mars, Bernadette ne transmettra aucune nouvelle parole de la Dame, mais elle revient chaque jour et refait, chaque jour, les mêmes gestes. 

Car Lourdes est une réalité physique. Les éléments de la nature sont chargés de symboles. Mais le corps, lui aussi, participe à l’évènement. Celui de Bernadette et celui d’Aquero.

Le 11 février, tout avait commencé par un signe de Croix. Bernadette a été stoppée dans son mouvement et c’est la Dame qui lui montrera comment tracer ce signe, pour que le geste exprime quelque peu la grandeur du mystère d’amour que ce signe rappelle. Lors de son pèlerinage à Lourdes en 2008, le pape Benoît XVI dira du signe de Croix qu’il est comme la synthèse de notre foi.

Par la suite, tous ceux qui verront Bernadette se signer seront dans l’admiration. Elle-même ne se privera pas de quelques remarques aux Sœurs qui le bâclaient.

Le deuxième geste que l’on retrouve à toutes les apparitions est le défilé des grains du chapelet entre les doigts de l’Apparition et les doigts de Bernadette. Certes, le chapelet a une fonction arithmétique : il évite d’avoir à compter jusqu’à dix dans la récitation des Ave Maria. Le défilé des grains n’a pas la même dignité que le signe de Croix. Mais le geste physique est quand même un auxiliaire précieux.

Le dimanche 14 février, Bernadette s’était munie d’eau bénite pour mettre en fuite l’apparition si elle ne venait pas du ciel. Elle a consciencieusement vidé sa bouteille en direction d’Aquero qui souriait, peut-être même riait, de ce geste spontané, non répertorié dans les livres liturgiques.

Bernadette, le plus souvent, est à genoux. Au 19ème siècle, c’était la position la plus fréquente pour prier, en particulier à la Messe. C’est une attitude de respect et d’humilité. Nos genoux sont en contact avec le sol, plus ou moins dur. C’est une position qui nous rappelle notre condition. Dans l’Ecriture, Adam veut dire « le terreux ». Ce n’est pas la seule attitude de prière mais nous avons tort, aujourd’hui, de la mépriser. L’agenouillement abat l’orgueil.

Ces derniers jours, nous avons vu Bernadette se livrer à toutes espèces d’exercices physiques : marcher à genoux, monter et redescendre dans la grotte, baiser la terre, gratter le sol pour découvrir la source, boire non sans peine, se laver (ce qui aboutit à l’effet inverse), manger quelques herbes. Tout cela est riche de sens et ne pourrait pas se passer uniquement dans la tête. La Dame ne donne pas d’explications détaillées. Tout a été dit dans le « Pénitence, pénitence, pénitence, priez Dieu pour la conversion des pécheurs. » Ce sont les gestes qui conduisent au sens.

Il en est ainsi aujourd’hui encore, à Lourdes, pour les pèlerins. Bernadette était venue presque toujours avec le cierge de tante Lucile. Depuis lors, ce sont des dizaines et des dizaines de millions de cierges qui ont brûlé à Lourdes ou qui ont été portés en procession. Le geste exprime une intention mais, en lui donnant corps, il la renforce. De même, gardons-nous de mépriser ceux qui remplissent des bidons : cette eau, ils la distribueront ou la garderont pour des moments-clés de la vie.

La Vierge elle-même n’est pas immobile. A certains moments, elle s’approche davantage de Bernadette. Elle sourit, sauf quand elle parle des pécheurs. Ces changements se traduisent sur le visage de Bernadette. Nous ne sommes pas des êtres purement cérébraux. Nous ne sommes pas, non plus, des êtres insensibles. Bernadette, de son côté, multiplie les sourires, les saluts, les révérences.

Quand elle livrera enfin son nom, la Vierge accompagnera ses paroles d’une gestuelle. Elle tend d’abord les mains vers la terre, comme sur la médaille miraculeuse ; puis elle les joint à hauteur de sa poitrine tout en levant les yeux vers le ciel. Les yeux, et non la tête comme sur la statue de Fabisch, ce qui navrait Bernadette.

Nous n’avons pas à avoir honte de notre corps, comme s’il était un accessoire gênant et indigne de la foi en Dieu qui est Esprit. Le pèlerinage est une démarche physique. Dans les sanctuaires marials, le pèlerin répond à une démarche de la Vierge qui, elle-même, apparaît dans un corps.

Les déformations sont toujours possibles. La prière peut devenir trop intellectuelle ou trop sensible. Les gestes de la prière peuvent, eux aussi, devenir mécaniques. Pour nous garantir là-contre, que Marie nous prenne comme élèves, ainsi qu’elle l’a fait pour Bernadette le 11 février. Que ce soit dans la prière personnelle, en groupe ou à la Messe, les attitudes et les gestes sont de grande importance. Il est beau d’avoir réappris à lever les mains vers le ciel en récitant le Notre Père.

O Marie,
Tu sais la beauté et la grandeur du corps
Puisque tu as donné un corps au Fils éternel du Père.
Tu as montré à Bernadette comment tracer le signe de la Croix.
Apprends-nous à respecter les gestes de la prière.
Que nos cœurs suivent ce qu’expriment nos corps.
Que nos gestes nous fassent grandir dans la foi véritable
Au Nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit.
Amen !

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Jacques Perrier

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