Message aux évêques de Pologne en visite ad limina

Le mariage, le sacerdoce, la vie consacrée, les pauvres

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Le pape François invite les évêques de Pologne à aider les personnes dont le mariage a échoué de façon à ce « qu’ils ne se sentent pas exclus de la miséricorde de Dieu, de l’amour fraternel d’autres chrétiens et de la sollicitude de l’Église pour leur salut ; ils doivent aussi chercher comment les aider à ne pas abandonner la foi et à élever leurs enfants dans la plénitude de l’expérience chrétienne ».

Le pape a en effet reçu les évêques de POlogne en visite ad limina, vendredi 7 février, au Vatican.

« Le mariage est souvent considéré comme une forme de gratification affective qui peut s’exprimer de n’importe quelle façon et être modifiée selon la sensibilité de chacun (cf. ibid.). Malheureusement, cette vision a une influence sur la mentalité des chrétiens, facilitant le recours au divorce ou à la séparation de fait. Les pasteurs sont appelés à se demander comment aider ceux qui vivent dans cette situation, afin qu’ils ne se sentent pas exclus de la miséricorde de Dieu, de l’amour fraternel d’autres chrétiens et de la sollicitude de l’Église pour leur salut ; ils doivent aussi chercher comment les aider à ne pas abandonner la foi et à élever leurs enfants dans la plénitude de l’expérience chrétienne. », a dit le pape qui invite en même temsp à « améliorer la préparation des jeunes au mariage ».

Il invite aussi les évêques à la sollicitude pour les prêtres afin qu’ils soient toujours missionnaires, pour la vie consacrée et pour les pauvres.

Voici notre traduction intégrale du discours du pape.

A.B.

Discours du pape François aux évêques de Pologne

Chers frères dans l’épiscopat,

Je salue cordialement chacun d’entre vous, ainsi que les Églises particulières que le Seigneur a confiées à votre conduite paternelle. Je remercie Mgr Józef Michalik pour ses paroles et en particulier de m’avoir assuré que l’Église qui est en Pologne prie pour moi et pour mon ministère. Nous nous rencontrons, si l’on peut dire, à la veille de la canonisation du bienheureux Jean-Paul II. Nous avons tous dans le cœur ce grand pasteur qui, à toutes les étapes de sa mission – comme prêtre, évêque et pape – nous a donné un exemple lumineux d’abandon total à Dieu et à sa mère, et d’un dévouement complet à l’Église et à l’homme. Du ciel, il nous accompagne et nous rappelle l’importance de la communion spirituelle et pastorale entre les évêques.

L’unité des pasteurs, dans la foi, dans la charité, dans l’enseignement et dans le souci du  bien des fidèles, constitue un point de référence pour la communauté ecclésiale entière et pour quiconque cherche une orientation sure dans son chemin quotidien sur les voies du Seigneur. Que rien ni personne ne puisse introduire de divisions entre vous, chers frères ! Vous êtes appelés à construire la communion et la paix enracinées dans l’amour fraternel et à en donner à tous un exemple encourageant. Et une telle attitude sera certainement féconde et offrira à votre peuple fidèle la force de l’espérance. Au cours de nos rencontres des ces jours-ci, j’ai eu la confirmation du fait que l’Église en Pologne a de grandes potentialités de foi, de prière, de charité et de pratique chrétienne.

Grâce à Dieu, il y a en Pologne une bonne fréquentation des sacrements, des initiatives valables dans les secteurs de la nouvelle évangélisation et de la catéchèse, une vaste activité caritative et sociale, et une évolution satisfaisante des vocations sacerdotales. Tous ces éléments favorisent la formation chrétienne des personnes, une pratique motivée et convaincue, une disponibilité des laïcs et des religieux pour collaborer activement dans les structures ecclésiales et sociales. Dans la mesure où l’on observe aussi un certain fléchissement de la vie chrétienne, sous divers aspects, un discernement est nécessaire, ainsi qu’une recherche des motifs et des moyens d’aborder les nouveaux défis comme, par exemple, l’idée d’une liberté sans limites, une tolérance hostile ou méfiante vis-à-vis de la vérité, ou encore un ressentiment envers la juste opposition de l’Église au relativisme dominant. Avant tout, dans le cadre de la pastorale ordinaire, je voudrais centrer votre attention sur la famille, « cellule de base de la société », « lieu où l’on apprend à vivre ensemble dans la différence et à appartenir à d’autres, et où les parents transmettent la foi à leurs enfants » (Exhort. apost. Evangelii gaudium, 66).

Mais aujourd’hui, le mariage est souvent considéré comme une forme de gratification affective qui peut s’exprimer de n’importe quelle façon et être modifiée selon la sensibilité de chacun (cf. ibid.). Malheureusement, cette vision a une influence sur la mentalité des chrétiens, facilitant le recours au divorce ou à la séparation de fait. Les pasteurs sont appelés à se demander comment aider ceux qui vivent dans cette situation, afin qu’ils ne se sentent pas exclus de la miséricorde de Dieu, de l’amour fraternel d’autres chrétiens et de la sollicitude de l’Église pour leur salut ; ils doivent aussi chercher comment les aider à ne pas abandonner la foi et à élever leurs enfants dans la plénitude de l’expérience chrétienne.

D’autre part, il faut se demander comment améliorer la préparation des jeunes au mariage, de sorte qu’ils puissent découvrir de plus en plus la beauté de cette union qui, bien fondée sur l’amour et sur la responsabilité, est en mesure de dépasser les épreuves, les difficultés et les égoïsmes par le pardon mutuel, en réparant ce qui risque d’être ruiné et sans tomber dans le piège de la mentalité du rejet. Il faut s’interroger sur la manière d’aider les familles à vivre et à apprécier les moments de joies comme les moments de souffrance et de faiblesse. Que les communautés ecclésiales soient des lieux d’écoute, de dialogue, de réconfort et de soutien pour les époux, dans leur chemin conjugal et dans leur mission d’éducation. Qu’ils trouvent toujours dans les pasteurs le soutien de pères et de guides spirituels authentiques qui les protègent des menaces des idéologies négatives et les aident à devenir forts en Dieu et dans son amour.

La perspective de la prochaine Rencontre mondiale de la jeunesse, qui aura lieu à Cracovie en 2016, me fait penser aux jeunes qui, comme les personnes âgées, sont l’espérance de l’Église. Aujourd’hui, un monde riche d’instruments informatiques leur offre de nouvelles possibilités de communication tout en réduisant les rapports interpersonnels de contacts directs, d’échanges de valeurs et de partages d’expériences. Toutefois, dans le cœur des jeunes, il existe une attente anxieuse de quelque chose de plus profond, qui valorise pleinement leur personnalité. Il faut aller à la rencontre de ce désir. Dans ce sens, la catéchèse offre de vastes possibilités. Je sais qu’en Pologne, la majorité des élèves y participent dans les écoles et acquièrent ainsi une bonne connaissance des vérités de la foi. Cependant, la religion chrétienne n’est pas une science abstraite mais une connaissance existentielle du Christ, un rapport personnel avec Dieu qui est amour. Il faut peut-être insister davantage sur la formation de la foi vécue comme une relation, dans laquelle on fait l’expérience de la joie d’être aimé et de pouvoir aimer.

Il est nécessaire que les catéchistes et les pasteurs intensifient leur attention pour que les nouvelles générations puissent découvrir pleinement la valeur des sacrements comme moyens privilégiés de rencontre avec le Christ vivant et source de grâce. Les jeunes doivent être encouragés à faire partie des mouvements et des associations dont la spiritualité se fonde sur la Parole de Dieu, sur la liturgie, sur la vie communautaire et sur le témoignage missionnaire
. Qu’ils trouvent aussi des occasions d’exprimer leur disponibilité et l’enthousiasme de leur jeunesse dans les œuvres de charité développées par les groupes paroissiaux ou scolaires de la Caritas ou dans d’autres formes de volontariat et de vie missionnaire. Que leur foi, leur amour et leur espérance soit fortifiés et portent du fruit dans un engagement concret au nom du Christ.

Le troisième point d’attention que je voudrais vous recommander concerne les vocations au sacerdoce et à la vie consacrée. Je remercie avec vous le Seigneur qui, ces dernières décennies, a appelé sur la terre de Pologne de nombreux ouvriers pour sa moisson. Tant de bons et saints prêtres polonais vivent leur ministère avec dévouement dans les Églises locales ou à l’étranger, dans les missions ! Que l’Église de Pologne ne se lasse pas de prier pour les nouvelles vocations sacerdotales ! C’est à vous, chers évêques, que revient la charge de veiller à ce que cette prière se traduise en engagement concret dans la pastorale des vocations et dans une bonne préparation des candidats dans les séminaires. En Pologne, grâce à la présence de bonnes universités et facultés de théologie, les séminaristes reçoivent une solide préparation intellectuelle et pastorale. Cette-ci doit toujours être accompagnée d’une formation humaine et spirituelle, afin qu’ils vivent dans une relation personnelle intense avec le Bon pasteur, qu’ils soient des hommes de prière assidue, ouverts à l’action de l’Esprit-Saint, généreux, pauvres en esprit, remplis d’un amour ardent pour le Seigneur et pour leur prochain.

Dans le ministère sacerdotal, la lumière du témoignage pourrait être obscurcie ou « cachée sous le lampadaire » s’il manquait l’esprit missionnaire, la volonté de « sortir » dans une conversion missionnaire sans cesse renouvelée, pour aller chercher – y compris dans les périphéries – et approcher ceux qui attendent la Bonne nouvelle du Christ. Ce style apostolique requiert aussi un esprit de pauvreté, d’abandon, pour être libres dans l’annonce et sincères dans le témoignage de la charité. À cet égard, je rappelle les paroles du bienheureux Jean-Paul II : « On attend de nous tous, prêtres de Jésus-Christ, que nous soyons fidèles à l’exemple qu’il a laissé. Que nous soyons par conséquent ‘pour les autres’. Et si ‘nous avons’, que nous ayons aussi ‘pour les autres’. Et cela d’autant plus que si nous avons, nous avons reçu ‘des autres’ (…) Avec un style de vie proche de celui d’une famille moyenne, ou plutôt de celui d’une famille plus pauvre » (Discours aux séminaristes, aux clercs et aux religieux, cathédrale de Szczecin, 11 juin 1987, 9).

N’oublions pas, chers frères, les vocations à la vie consacrée, surtout les vocations féminines. Comme vous l’avez observé, la baisse des engagements dans les congrégations religieuses est préoccupante aussi en Pologne : c’est un phénomène complexe, aux causes multiples. Je souhaite que les Instituts religieux féminins puissent continuer d’être, en adéquation avec notre époque, des lieux privilégiés de l’affirmation et de la croissance humaine et spirituelle des femmes. Que les religieuses soient prêtes à affronter les tâches et les missions, même lorsqu’elles sont difficiles et exigeantes, qui valorisent leurs capacités intellectuelles, affectives et spirituelles, leurs talents et leurs charismes personnels. Prions pour les vocations féminines et accompagnons nos sœurs de notre estime, elles qui dépensent leur vie, souvent dans le silence et à l’insu de tous, pour le Seigneur et pour l’Église, dans la prière, la pastorale et la charité.

Je conclus en vous exhortant à la sollicitude envers les pauvres. En Pologne aussi, malgré le développement économique actuel du pays, il y a beaucoup de personnes démunies, au chômage, sans abri, malades, abandonnées, ainsi que de nombreuses familles, surtout les familles nombreuses, qui manquent des moyens nécessaires pour vivre et éduquer leurs enfants. Soyez proches d’elles ! Je sais tout ce que fait l’Église dans ce domaine en Pologne, donnant la preuve d’une grande générosité non seulement dans votre patrie mais aussi dans d’autres pays du monde. Je vous en remercie, vous et vos communautés. Continuez d’encourager vos prêtres, les religieux et tous les fidèles à avoir l’ « imagination de la charité » et à la pratiquer sans cesse. Et n’oubliez pas ceux qui, pour divers motifs, quittent leur pays et cherchent à construire une nouvelle vie à l’étranger. Leur nombre croissant et leurs exigences requièrent certainement davantage d’attention de la part de la Conférence épiscopale. Accompagnez-les avec une sollicitude pastorale adéquate, pour qu’ils puissent conserver leur foi et les traditions religieuses du peuple polonais.

Chers frères, je vous remercie pour votre visite. Apportez mes salutations cordiales à vos Églises particulières et à tous vos compatriotes. Que la Vierge Marie, Reine de la Pologne, intercède pour l’Église dans votre pays : qu’elle protège de son manteau les prêtres, les religieux, les religieuses et tous les fidèles et qu’elle obtienne pour chacun et pour chaque communauté la plénitude des grâces du Seigneur.

Et prions-la ensemble : Sub tuum praesidium confugimus, Sancta Dei Genitrix, nostras deprecationes ne despicias in necessitatibus, sed a periculis cunctis libera nos semper, Virgo gloriosa et benedicta.

Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Francis NULL

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