Enseignement social de l'Eglise : moins de profit, plus d'emplois

Le pape encourage le modèle des coopératives

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Dans le contexte actuel de crise et notamment pour ce qui est du marché du travail, le pape encourage le modèle des « coopératives », qui garantit une égalité « dans les différences » : il recommande moins de profit mais plus d’emplois. Les coopératives, un souvenir de jeunesse.

Le pape François s’est adressé aux participants du Troisième festival de la Doctrine sociale de l’Eglise (Vérone, 21-24 novembre), dans un message vidéo diffusé hier, jeudi 21 novembre, en soirée, en présence du cardinal Oscar Rodriguez Maradiaga, archevêque de Tegucigalpa (Honduras) et président du Conseil des huit cardinaux : c’est dire l’importance que le pape attache à la mise en œuvre de l’enseignement social de l’Eglise.

Une égalité, sans homogénéité

Pour le pape, le thème du congrès – « Moins d’inégalités, plus de différences » – met en relief « la richesse variée des personnes, expression des talents personnels » loins de « l’homogénéité qui mortifie et rend inégaux ».

Le pape a filé l’image de la sphère et du polygone : « La sphère peut représenter l’homogénéité, comme une sorte de globalisation : elle est lisse, sans facettes, égale à elle-même sur toutes les parties. Le polygone a une forme semblable à la sphère, mais est composé de multiples faces ».

« Il me plaît d’imaginer l’humanité comme un polygone, dont les formes multiples (…) constituent les éléments qui composent, dans la pluralité, l’unique famille humaine. Cela est une vraie mondialisation. L’autre globalisation – celle de la sphère – est une homogénéité », a fait observer le pape.

Au contraire, le pape a fait observer que le monde des « coopératives » est « la route pour une égalité, mais non homogénéité, une égalité dans les différences »..

Il confie qu’à 18 ans, en 1954, il a en entendu une conférence de son père « le la notion chrétienne de coopérative » : « cela m’a enthousiasmé », avoue-t-il, encore marqué par cette réflexion sur le travail solidaire.

C’est en effet « une bonne nouvelle » d’apprendre que, « pour répondre à la crise, on a réduit le profit, mais qu’on a sauvegardé le niveau de l’emploi » : « Le travail est trop important. Travail et dignité de la personne marchent de pair » et il vaut donc mieux « avancer lentement, mais sûrement », a recommandé le pape.

L’enseignement social catholique, une mystique

L’enseignement social de l’Eglise « est un grand point de référence, très utile pour ne pas se perdre », a poursuivi le pape : « Qui travaille dans l’économie et dans la finance est attiré par le profit et s’il n’est pas attentif, il se met à servir le profit même, et il devient l’esclave de l’argent ».

Cet enseignement « contient un patrimoine de réflexion et d’espérance en mesure d’orienter les personnes en préservant leur liberté », a-t-il insisté, en faisant observer qu’il faut « du courage » et « la foi », pour « rester sur le marché, en mettant au centre la dignité de la personne, non pas l’idole de l’argent ».

Et quand il est mis en pratique, il engendre « l’espérance », il est « une force pour promouvoir, par le travail, une nouvelle justice sociale ».

Pour le pape, « la mise ne oeuvre de l’enseignement social de l’Eglise est en soi une mystique » : « Je redis le mot : une mystique. On dirait qu’elle enlève quelque chose, qu’elle met hors du jeu, mais cette mystique apporte au contraire à un grand bienfait, car grâce à sa vision globale, elle peut créer du développement en s’occupant du chômage, des fragilités, des injustices sociales, sans se soumettre aux distorsions d’une vision purement économique ».

Parmi les mots-clés de l’enseignement social, « la solidarité », aujourd’hui en passe d’être « supprimée du dictionnaire »,  « un mot inopportun, presque un “gros mot” pour l’économie et le marché », a déploré le pape.

Ne pas hypothéquer l’avenir

Il a évoqué le sort des jeunes et des anciens : aujourd’hui, « jeunes et vieux sont écartés car ils ne répondent pas aux logiques de production dans une vision fonctionnelle de la société, ils ne répondent à aucun critère utile d’investissement. On dit qu’ils sont “passifs”, ils ne produisent pas, dans l’économie de marché ils ne sont pas des sujets de production ».

Or, le pape a recommandé de « ne pas oublier qu’ils portent chacun une grande richesse : ils sont tous deux l’avenir d’un peuple » : « Les jeunes sont la force pour avancer; les personnes âgées sont la mémoire du peuple, la sagesse ».

« Il ne peut pas y avoir de développement authentique, ni de croissance harmonieuse d’une société si la force des jeunes et la mémoire des personnes âgées sont niées. Un peuple qui ne prend pas soin des jeunes, des vieux, n’a pas d’avenir ».

Il s’agit donc de « faire tout ce qui est possible pour éviter que la société ne les élimine socialement » et de « s’engager pour garder vivante la mémoire, avec le regard dirigé vers l’avenir ».

Dans le cas contraire, « on hypothèque l’avenir », a mis en garde le pape : « Si cela n’est pas rapidement résolu, c’est l’assurance d’un avenir trop faible ou d’un non-avenir ».

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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