Retraite au Vatican : le lien nuptial entre Dieu et l'humanité

Surmonter l’absence et le néant

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Le « lien nuptial » entre Dieu et l’humanité a été brisé par le péché, d’où ce sentiment de l’absence de Dieu et du néant : c’est Dieu lui-même qui vient restaurer ce lien, en Jésus, dont le nom a été prononcé par un Ionesco avant de mourir, rappelle le cardinal Ravasi.

La retraite de carême au Vatican arrivé à son cinquième soir : plus qu’un soir, vendredi soir, et elle s’achèvera samedi matin, 23 février, après la fête de la Chaire de Saint-Pierre, demain.

Le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical de la Culture, qui anime la retraite, a centré ses méditations d’hier soir et de ce jour (10e, 11e, 12e et 13e méditations) sur réconciliation et pénitence, l’absence de Dieu et le néant.

La douleur et l’isolement présents dans la société moderne étaient au cœur de la méditation de mercredi soir : « La société contemporaine a créé dans nos villes une foule de solitudes ».

Mais comment le chrétien réagit-il à la douleur ? Dans le Christ, répond le cardinal Ravasi, Dieu « se penche vers l’homme », et il « assume sa souffrance », ses « limites ». Jésus lui-même fait l’expérience de « l’obscurité de toute la gamme de la douleur : peur, solitude, isolement, trahison, souffrance physique, silence de Dieu, mort ».

« Le péché, est un acte personnel qui naît de la liberté humaine », a expliqué le cardinal italien dans sa 11eméditation, ce jeudi matin: il s’agit d’une «  révolte », mais avant tout d’un « éloignement de Dieu ».

Et de préciser la spécificité du péché et donc du sacrement de la réconciliation: « Le péché est, avant tout et surtout, une réalité théologique ; il peut avoir aussi des répercussions psychologiques, mais c’est une réalité théologique. C’est pourquoi le sacrement de réconciliation ne pourra jamais être l’équivalent d’une séance de psychanalyse, parce que la conscience de Dieu qu’a le pécheur est absolument fondamentale ».

Comment redresser la barre ? Le bibliste a invité à voir la solution dans « la conversion », c’est-à-dire dans une « changement de cap », de « mentalité » qui aide à « tourner le dos à ce à quoi nous sommes accrochés ».

Pour arriver à cette décision, le cardinal Ravasi a proposé la lecture de la seconde Epître de saint Paul aux Corinthiens, qui analyse un verbe grec qui signifie le lien entre l’homme et Dieu : « Catallasso : ce verbe, techniquement parlant, indique l’acte du juge qui tente de réconcilier deux époux qui se trouvent en désaccord. C’est ce geste qui est désormais connu – il existe dans notre jurisprudence et dans de nombreux pays – dans les cas de séparation et de divorce : d’habitude, de manière purement formelle, le juge dit si l’on veut encore arriver à un accord. Paul utilise ce verbe, qui est quasiment celui de la réconciliation juridique ; c’est pourquoi c’est un verbe qui revêt une dimension nuptiale, celle, justement, de ce lien que nous avons avec Dieu : un lien nuptial qui a été brisé par le péché ».

L’être humain passe ainsi par un « frémissement profond », pour parvenir à un être nouveau : « Dans la société, on n’a pas toujours la possibilité de recommencer : certains sont désormais marqués, même s’il est vrai qu’il y a, dans la législation, des propositions pour essayer de réhabiliter et de proposer de nouveau à la société quelqu’un qui a fait une erreur. Mais il restera toujours une sorte de marque sur la personne qui a été, peut-être avec raison, jugée pécheur. Dans la Bible, au contraire, cela n’existe pas ; dans le prophète Isaïe, surtout, on trouve cette image de Dieu qui jette loin de lui tes péchés, pour que tu ne les regardes plus, et donc, ils n’existent plus. C’est une véritable annulation ».

« L’absence et le néant : l’homme sans Dieu » : c’était le thème de la 12e méditation proposée par le cardinal Ravasi, à partir des psaumes 14 et 53. Il y voit l’évocation d’un « athéisme pratique ».

Il a fait remarquer que les deux termes « absence et néant » ne sont pas synonymes, l’absence désignant comme « la nostalgie de Dieu, le néant « le véritable mal de la culture actuelle ».

Et de préciser : « C’est l’indifférence, la superficialité, la banalité. C’est pour cela que je ne cesse de me demander comment on peut agir d’une manière ou d’une autre sur cette sorte de brouillard, sur cette sorte de « gélatine » ; c’est quelque chose de mou qui n’a aucune nostalgie, c’est vraiment le vide, le néant, mais pas le vide de l’attente. D’un point de vue pastoral, c’est cette seconde forme d’athéisme que nous rencontrons le plus souvent ».

Mais même le croyant affronte parfois le « silence de Dieu », a-t-il fait remarquer en disant :  « Pensons aussi à nous-mêmes, chaque fois que nous avons ressenti, peut-être à cause de notre tiédeur ou du découragement, le silence de Dieu, l’absence. Pour nous, il n’avait pas complètement disparu de notre horizon, mais nous ne le sentions plus. Je voudrais que nous tous, qui sommes évêques pour la plupart, nous pensions un peu au clergé, à tous les prêtres qui vivent cette expérience et qui n’ont peut-être pas cette capacité d’élaboration qu’ils devraient avoir, que nous aurions dû leur donner. Ce témoignage, je crois que – surtout ceux d’entre vous qui avez été évêques d’une Eglise, pasteurs d’une Eglise – vous pouvez le leur donner vous-mêmes ».

Pourtant la fin du psaume 22, s’ouvre sur cette espérance: « Tu m’as répondu ». La supplication se fait alors action de grâce : « Nos prières de supplication ne tombent jamais dans le néant », a insisté le prédicateur.

Il a évoqué un « dramaturge de l’absurde » comme Eugène Ionesco, athée, qui écrivait avant de mourir : « Prier le Je Ne Sais Qui – j’espère: Jésus Christ.».

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ZENIT Staff

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