Une exposition sur le chemin de foi de saint Pierre sera inaugurée demain, 6 février 2013, au château Saint-Ange à Rome. Le P. Alessio Geretti, directeur de l’exposition, donne un éclairage sur la foi à partir de la vie de l’apôtre: « Dieu joue la première manche ».
Le P. Geretti a donné en effet, ce 5 février, au Vatican, les clés théologiques de l’exposition « le chemin de Pierre » organisée du 7 février au 1er mai 2013.
Si une exposition d’art est généralement « délice pour le regard, enrichissement pour la connaissance, émotion continue », cette exposition présente « quelque chose de plus », estime-t-il : « le chemin de Pierre laisse des traces d’enthousiasme et de découragement, de conviction et de doute, de force et de crises ».
« Sur ce chemin, le croyant et le non-croyant perçoivent ce qu’est vraiment la foi, ce qu’un homme peut faire du fait de sa foi et ce que la foi peut faire d’un homme ».
Pierre, rappelle-t-il, était un homme « de caractère impulsif, impétueux, certainement généreux, d’un âge proche de celui de Jésus, originaire de Galilée, au bord du lac de Tibériade, fils de Jonas, d’une famille de pêcheur. Son frère André avait un nom d’origine grecque, signe que la région était une terre cosmopolite, ouverte d’esprit. Avant de rencontrer Jésus, il s’appelait Simon, ce qui signifie en hébreu « celui qui écoute, le disciple ». Son premier nom indiquait son destin, et son nouveau nom sa mission ».
Le P. Geretti commente l’exposition en huit « moments » de la vie de l’apôtre : rencontre, stupeur, résistance, crise et renaissance, abandon à Dieu, fraternité, mission, ressemblance.
La foi, hautement dramatique
La foi est d’abord une « rencontre » : elle n’est pas « une conviction qui mûrit dans le raisonnement » mais « la réponse à un évènement ».
« Dans la partie entre Dieu et l’homme, Dieu joue la première manche, en se rendant présent de diverses façons ». C’est ensuite à l’homme de répondre, explique le P. Geretti qui illustre son propos avec la rencontre entre Jésus et Pierre : au premier contact « avec la figure fascinante et mystérieuse de Jésus », Simon se détourne : « Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur » (Lc 5, 8).
Cette rencontre, fait-il observer, est « un rendez-vous décisif » où Pierre « se lance dans l’aventure et devra vaincre son plus grand ennemi : lui-même ».
La foi est donc une expérience « hautement dramatique », parce qu’elle contraint à « se mesurer continuellement à ses limites et à ne pas avoir peur ».
La foi, expérience de la miséricorde
La foi provoque ensuite la « stupeur », elle consiste « en un regard d’étonnement », poursuit le P. Geretti : dans la vie de Pierre, le contact avec Jésus fait grandir « l’admiration et la confiance sans mesure de Pierre à l’égard du Maître », auprès duquel il vit des « expériences exaltantes », des « miracles impressionnants ».
Si Pierre est tenté d’une part de s’éloigner, par ailleurs « il cherche de toutes ses forces à être à la hauteur de l’appel et à démontrer à Jésus son amour et son enthousiasme pour lui », fait-il observer, citant l’épisode où l’apôtre se jette à l’eau en dépassant son « incrédulité ».
Bénéficiaire de moments privilégiés comme la Transfiguration, la foi de Pierre « se renforce », fondée sur « l’expérience de l’invisible qui se manifeste dans l’histoire ». Mais il est aussi « inconstant et peureux dans les moments cruciaux », jusqu’à abandonner le Maître la dernière nuit et « le renier ouvertement par trois fois », rappelle le P. Geretti.
« Comment peut-il dans ces conditions être le rocher de la foi ? », s’interroge-t-il. En réalité, son aventure montre que « la foi n’est pas une qualité qui résulte de la valeur d’un homme, un mérite, mais un don reçu ».
Ainsi, Pierre est « le meilleur gardien possible des clés du Ciel » : en effet, si les clés du royaume des cieux, avec le pouvoir d’ouvrir et de fermer, sont confiées dans « les mains de ce pêcheur », on sait aussi que « dans le cœur de Pierre, qui se découvre toujours plus un « homme de peu de foi », il y a la miséricorde ».
L’apôtre a en effet « succombé à la tentation », « a renié de façon inexcusable son Seigneur », et a reçu le pardon. Il sait que « la foi, pour l’Evangile, consiste d’abord à croire fermement que Dieu est miséricorde, amour qui pardonne », souligne le P. Geretti.
La foi comme lutte
Ensuite, la vie de Pierre exprime de la « résistance » : « personne parmi les apôtres, n’est mis à nu comme Pierre dans son humanité, dans toute sa faiblesse et sa difficulté à croire », fait observer le P. Geretti : « en Pierre, il y a quelque chose qui oppose de la résistance à la foi ».
La résistance de Pierre, le « scandale intérieur de l’apôtre », consiste à « ne pas accepter la différence entre la manière dont Dieu se révèle et la manière dont l’homme attend une telle révélation. Il ne réussit pas à se rendre à l’idée que Dieu soit si différent de ce qu’il imaginait ».
En ce sens, sa vie illustre la foi « comme lutte jusqu’à l’abandon total ». Dans cette perspective, « le croyant peut faire l’expérience de l’incrédulité. Le non-croyant peut désirer la foi », ajoute le P. Geretti.
La foi comme principe d’une vie nouvelle
La « crise et renaissance » de Pierre, qui « s’écroule complètement » par son reniement, avant de « se rendre définitivement à l’amour du Christ », montre que le sommet de la foi est de « découvrir la miséricorde de Dieu ».
Sa « vraie renaissance », qui confirme « la confiance que le triple reniement n’a pas pu détruire », montre la « foi en action » dans la vie de Pierre, notamment dans les Actes des Apôtres où Pierre a « beaucoup changé » : « le regard de Jésus l’a rendu capable d’une vie qui n’était pas à la portée de ses seules forces », affirme le P. Geretti.
Les Actes présentent donc un Pierre « mûri », qui sait « gérer les situations les plus compliquées » et qui est doté d’une disposition nouvelle : la « patience ». « Il fait toujours plus l’expérience que la foi consiste à s’abandonner à Dieu, sûr de sa présence et de son souci pour chaque homme », explique le P. Geretti.
« Pierre a appris à être sûr non pas de lui-même, comme au début, mais de Dieu ». Chez Pierre, la foi est donc « principe d’une vie nouvelle, dans le dépassement de toute peur et dans une audace inexplicable pour un groupe d’hommes limité dont le maître était mort dans l’échec total ».
Ainsi, dans les représentations artistiques, il n’est pas rare que Pierre « apparaisse aux autres croyants pour les encourager à la persévérance » : il enseigne que « la foi est essentiellement fidélité », non dans le sens d’un « effort humain héroïque » mais dans « la persévérance comme don », comme « force qui vient d’en haut, par la prière ».
La foi comme principe d’unité
La foi chez Pierre est aussi « l’expérience d’une nouvelle fraternité », la communion étant « le critère de vérité de la foi », rappelle le P. Geretti. Dans le chemin de Pierre, cela se manifeste de façon spéciale « dans son rapport avec l’apôtre Paul » : malgré leur « différence problématique de personnalité, d’idées et de styles », ils vivent « le miracle d’une nouvelle fraternité » à cause de la foi.
La foi comme « principe d’unité dans l’Eglise » sera illustrée par «
des icônes d’Orient » à ce moment-là de l’exposition, précise-t-il.
Dans son chemin de foi, Pierre, a aussi reçu une « mission » particulière. Son Successeur, à Rome, reçoit aussi la « mission de protéger la fidélité de l’Eglise à la Parole de Dieu », poursuit-il.
L’apôtre est donc « l’intercesseur par excellence qui confirme la foi de ses frères, le rocher qui édifie la vie des croyants ». Le chrétien « apprend de lui la foi ».
Et son parcours se termine par la « ressemblance » : « tu me suivras plus tard », avait dit Jésus à Pierre lors de la dernière Cène. Pierre vit une « transformation » qui le rend « toujours plus semblable au Christ » : il accomplit des « gestes identiques », jusqu’à la consommation finale, « l’identification totale, physique, avec le sacrifice du Christ » sur la croix.
Le parcours de l’exposition se conclut en direction de la basilique Saint-Pierre. « Une façon de rappeler que la foi, c’est voir à travers les yeux de celui qui a vu », conclut le P. Geretti.