La vie chrétienne ne peut pas être « unilatérale », rappelle le cardinal Sarah : « lorsqu’on sépare la foi de la charité, dans la vie de tous les jours, inévitablement le rapport avec Dieu vole en éclats », met-il en garde en énumérant des conceptions erronées de la vie chrétienne, qui mettent en opposition foi et charité.
Le cardinal Robert Sarah, président du Conseil pontifical « Cor Unum » a présenté le message de Benoît XVI pour le Carême 2013 sur le thème : « Croire dans la charité suscite la charité ; « Nous avons reconnu et nous avons cru que l’amour de Dieu est parmi nous » (1 Jn 4, 16) », ce matin, 1er février 2013, au Vatican.
Mgr Giampietro Dal Toso, secrétaire du dicastère, Mgr Segundo Tejado Muñoz, sous-secrétaire et M. Michael Thio, président général de la Confédération Internationale de la Société de saint Vincent de Paul, sont également intervenus.
Cette année, a expliqué le cardinal, le message du pape se focalise sur l’« enchevêtrement indissoluble » entre la foi et la charité, ce qui implique « deux dimensions », a-t-il estimé : d’une part, « la vraie foi ne se vit pas sans les œuvres » et d’autre part, « la charité suscite la foi, et donc est témoignage ».
Les fausses conceptions de la vie chrétienne
Citant Benoît XVI: « nous ne pouvons jamais séparer, voire opposer, foi et charité », le cardinal a mis en lumière divers « malentendus » qui engendrent « séparation ou opposition ».
Un des malentendus, a-t-il souligné, est « d’accentuer si fortement la foi, et la liturgie comme son canal privilégié, que l’on oublie qu’elle s’adresse à un homme concret, avec ses besoins, même humains, son histoire, ses relations ».
Dans ce cas l’Eglise reste « enivrée du parfum des cierges, occupée à mettre de l’ordre dans la sacristie, concentrée sur d’obscurs débats théologiques, plutôt que sur la personne dans son intégrité à laquelle le Christ s’est adressé », a-t-il ajouté.
Le cardinal a diagnostiqué un second malentendu dans l’idée que l’Eglise serait « une sorte de grande œuvre philanthropique et de solidarité purement humaine, où l’engagement social est prioritaire » et où le plus important serait « la promotion de l’homme », réduit à « pain et culture ».
Dans ce second cas, le premier devoir de l’Eglise devient « l’édification d’une société juste et équitable, en oubliant qu’au centre de l’homme se tient le besoin de Dieu ».
Enfin, le cardinal a vu un troisième malentendu qui distingue « une Eglise bonne, celle de la charité », d’une « Eglise « mauvaise », celle de la vérité, qui défend et protège la vie humaine et les valeurs morales universelles ».
« L’Eglise va bien quand elle s’occupe des malades, elle va moins bien quand elle exerce le devoir de réveiller les consciences », a-t-il fait observer.
La vie chrétienne n’est pas unilatérale
Face à ces déviances, le cardinal a insisté : « foi et charité vont ensemble, et donc Evangile et œuvres vont ensemble », et cela vaut aussi bien « pour l’expérience personnelle » que pour « l’Eglise en tant que communauté ».
« On ne peut pas prétendre au quotidien organiser sa vie chrétienne de façon unilatérale », a-t-il poursuivi, mettant en garde : « Lorsqu’on sépare la foi de la charité, dans la vie de tous les jours, inévitablement le rapport avec Dieu vole en éclats ».
En effet, « une vie fondée seulement sur la foi court le risque d’échouer en un banal sentimentalisme qui réduit le rapport avec Dieu à une simple consolation du cœur. Une charité qui ne s’agenouille pas en adoration devant Dieu, source et direction de toute bonne action, risque d’être réduite à une simple philanthropie et pur « activisme moraliste » ».
Avec la foi, l’homme peut « connaitre et adhérer à la vérité ». Avec la charité, « son expérience d’amitié avec Dieu se réalise, devient visible et communicable ». Il s’agit donc de « tenir ensemble la « connaissance » de la vérité avec le « cheminement » dans la vérité », a souligné le cardinal.
Pour Cor Unum, « ces orientations du pape sont un encouragement » pour les chrétiens à « agir dans le monde de l’assistance et du développement à travers les organismes de charité », en gardant « un profil très clair », et « une vision intégrale de la personne ».
Et si l’Eglise « a peut-être peiné à se faire comprendre parce que son message a été cultivé trop souvent de façon moralisatrice », le cardinal a invité plutôt à développer une « approche personnelle », qui est la grande richesse « que l’Eglise offre par son réseau très vaste et très apprécié d’organismes caritatifs ».
En quoi consiste cette approche ? « La vie dans la charité » du chrétien reçoit son sens de la « rencontre personnelle et intime avec l’amour du Christ, qui offre un nouvel horizon et imprime à la vie sa direction décisive ».
Le message de Benoît XVI, a-t-il conclu, « présente une proposition unitaire, un parcours de vie où l’accueil de Dieu conduit à l’accueil de l’autre dans toutes ses dimensions, expressions et exigences et ainsi l’Eglise peut être le phare d’une humanité renouvelée et donc contribuer à l’avènement de la « Civilisation de l’Amour » ».