Pour ses vœux de 2013, Mgr Michel Chafik, recteur de la Mission copte catholique de Paris, formule « le vœu de la paix ».
Évoquant la situation politique et sociale non seulement en France mais également en Égypte, berceau de l’Eglise copte, il rappelle que la paix « n’est pas seulement le contraire de la guerre » mais « l’expression de l’agapé qui fait taire les armes et réconcilie les frères ennemis ».
« La règle d’or du christianisme nous oblige vis-à-vis des musulmans, tout comme nous issus d’Abraham », déclare-t-il également.
Vœux de Mgr Michel Chafik
المجد لله في الاعالي وعلي الارض السلام
Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’Il aime
Noël 2012
Chers amis,
L’année 2012 se referme comme elle s’était ouverte, sur les doutes et les incertitudes. En France, on s’interroge sans fin sur l’identité sexuelle, la nature du mariage et des liens de parentalité. On ne sait comment redresser les comptes publics et on peine, dans les conflits internationaux, à distinguer l’agresseur de l’agressé. Ce doute, multiforme, qui touche tant à l’intime qu’au politique et au social, provoque une intranquillité profonde ; la nostalgie aussi de l’époque, pas si lointaine, où la lumière de l’Evangile paraissait éclairer la cité.
Mon pays natal est plus encore déchiré. En 2010, l’Egypte avait cru à un rêve, celui d’un Etat où tous les citoyens seraient égaux en droit. Aujourd’hui, le songe s’est dissipé, le pays est coupé en deux avec, à sa tête, un président qui, homme-lige des frères musulmans, s’est arrogé les pleins pouvoirs. Oui, les lendemains de la Révolution déchantent, d’autant que les biens de première nécessité- pain, eau potable, électricité- font cruellement défaut. L’Egypte a faim, l’Egypte a soif, elle s’enfonce dans une misère sans nom.
Au printemps égyptien pourrait succéder l’hiver islamique sur le modèle iranien avec, aux affaires, la même sorte d’hommes figés dans leurs discours haineux, leur mépris de la vie et leur rejet de l’altérité ; avec aussi le même soutien candide de l’Occident, aveuglé par son lourd besoin de devises et de pétrole léger. L’or au noir rend impuissantes les puissances d’hier.
Le peuple a été floué mais il n’abdique pas : place Tahrir et ailleurs, au nom de la liberté et de la justice sociale, il poursuit son combat. Dans la tourmente, les chrétiens sont particulièrement vulnérables. Certains se résignent, la mort dans l’âme, à quitter le pays. Jamais il n’y eut tant de migrants coptes de par le monde, tant de désorientés. D’autres choisissent de demeurer accrochés à la Croix là où le Seigneur les a fait naître. Enfermés dans l’interminable attente d’une pâque toujours différée, ils sont la mémoire longue de notre terre, les irréductibles témoins de notre espérance. Signe de cette féconde continuité, nos frères orthodoxes se sont choisi un nouveau pape, nos églises sont pleines et nos fidèles ignorent la tiédeur.
Dans un tel contexte, quel vœu formuler pour l’année à venir ? Celui-là même que le Saint Père adressa aux Eglises Orientales lors de son voyage au Liban, le vœu de la paix. Le plus précieux des dons de Dieu n’est pas seulement le contraire de la guerre. Il est l’expression de l’agapé qui fait taire les armes et réconcilie les frères ennemis. La règle d’or du christianisme nous oblige vis-à-vis des musulmans, tout comme nous issus d’Abraham. C’est pourquoi Benoît XVI a pu s’écrier, au cœur du brasier : « Aimez les musulmans et priez pour eux ». Ainsi se construira la civilisation de l’amour qui, au contraire de nos très éphémères printemps arabes, ne passera jamais.
Joyeux Noël et bonne année dans la paix du Seigneur !
Mgr Michel Chafik
Recteur de la Mission copte catholique de Paris