ROME, lundi 6 février 2012 (ZENIT.org) – Une « petite minorité » d’abuseurs a causé « un grand mal aux victimes et à la mission de l’Eglise » fait observer le cardinal William Levada, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi.
Il a en effet a ouvert lundi soir les travaux du colloque « Vers la guérison et le renouveau », organisé par l’Université pontificale grégorienne de Rome. Radio Vatican résume sa longue intervention – en anglais -.
« La petite minorité [d’abuseurs] a causé un grand mal aux victimes et à la mission de l’Eglise qui est d’apporter l’amour du Christ au monde d’aujourd’hui », a-t-il expliqué. Il a ajouté que les mesures actuellement mises en œuvre depuis une dizaine d’années aideront à « répondre de manières diverses et fructueuses afin de guérir les blessures du passé et à renouveler l’engagement en faveur d’un avenir d’espoir ».
Son intervention, intitulée « une réponse à multiples facettes au défi des abus sexuels sur mineurs », a rappelé tout d’abord combien Benoît XVI, déjà du temps où il était cardinal-préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, a agi pour que les lignes changent à l’intérieur de l’Eglise et pour que « la délicate et urgente question » des abus trouve des réponses.
Le cardinal-préfet a exposé devant les délégués de cent dix conférences épiscopales et d’une trentaine d’ordres religieux le travail déjà accompli par l’Eglise lors de ces dix dernières années. Cette question fut déjà abordée par Jean-Paul II lorsqu’il promulgua le 30 avril 2001 le motu proprio Sacramentum sanctitatis tutela. Ce texte faisait explicitement référence au crime d’abus sexuel, l’incluant dans la liste des graviora delicta, autrement dit, crime canonique. Il était fait obligation de rapporter tout acte de cette nature auprès de la CDF. Le texte fut ensuite amendé et complété le 21 mai 2010 par Benoît XVI.
Après la révélation par la presse des abus commis aux Etats-Unis au début des années 2000, les évêques américains ont adopté de leur côté la Charte pour la protection des enfants et des jeunes adultes. Le cardinal Levada n’a pas manqué de rendre hommage à Benoît XVI, qui, à l’époque où il dirigeait la CDF, a apporté tout son soutien aux normes prises par les évêques américains après 2002, ce qui ne l’a pas empêché de « subir des attaques de la part des médias durant ces dernières années un peu partout dans le monde », et ce, « quand il devrait recevoir la reconnaissance de tous, dans et hors de l’Eglise ». Le cardinal-préfet a aussi cité la lettre aux catholiques irlandais que le Pape a envoyée en mars 2010, et a rappelé les différentes interventions de Benoît XVI lors de ses voyages aux Etats-Unis en 2008, en Grande-Bretagne, à Malte, en Allemagne et en Australie.
A l’occasion de l’année sacerdotale, en décembre 2010, lors de la présentation des vœux de Noël à la Curie romaine, Benoît XVI avait abordé de front et sans concession le drame des abus. Après cette prise de position sans équivoque sur la volonté du Pape d’affronter le problème, la CDF a publié une circulaire le 3 mai 2011, « pour aider les conférences épiscopales à établir des directives pour le traitement des cas d’abus sexuel commis par des clercs à l’égard de mineurs ».
Le préfet de la CDF a ensuite détaillé la première partie de la lettre circulaire de 2011, celle concernant les considérations générales. Il a souligné que les conférences épiscopales et les évêques étaient au centre de la réponse que l’Eglise doit donner aux problèmes posés par les abus. « Le rôle de la conférence épiscopale est double : celui d’offrir une assistance aux évêques diocésains, et celui de coordonner une réponse effective et uniforme face à la crise des abus sexuels sur mineurs. » Mais cette disposition ne décharge en rien les évêques diocésains et les supérieurs religieux de leurs responsabilités. Ils doivent aussi collaborer avec la CDF rappelle le préfet.
Un des points les plus importants, et qui sera illustré par le témoignage d’une victime mardi, est l’attention portée aux victimes d’abus. Le premier besoin pour les victimes, « est d’être écoutées, de savoir que l’Eglise les écoute, que l’Eglise comprend la gravité de leur souffrance, qu’elle veut les accompagner le long d’un chemin de guérison souvent long, et qu’elle a entrepris ou qu’elle est désireuse de prendre des mesures effectives pour s’assurer que d’autres enfants seront protégés de tels abus. » D’où l’importance des diverses interventions publiques du Pape ces dernières années. L’exemple donné par le Pape devrait ainsi, a expliqué le cardinal Levada, « animer le cœur de tous les évêques et prêtres. »
Au-delà de l’écoute nécessaire, il y a la protection proprement dite des mineurs. Des programmes nationaux existent déjà en la matière et proposent les moyens de reconnaître les signes d’abus afin de créer un environnement sûr pour les enfants. Un autre défi se pose, selon le cardinal, celui d’une « éducation des parents et des enfants eux-mêmes au sujet des abus dans la société dans son ensemble ».
C’est là qu’entre en jeu la formation des prêtres et des religieux. « Les évêques et les supérieurs des ordres religieux [ont besoin ] d’être des plus attentifs lorsqu’ils acceptent des candidats à la prêtrise et à la vie religieuse. » « Les candidats devraient être formés à apprécier au mieux les notions de chasteté et de célibat. » Le cardinal Levada pointe aussi du doigt le fait que les conférences épiscopales doivent communiquer entre elles, ainsi que les ordres religieux, sur les candidats qui changent de séminaire, de diocèse ou même de pays car ces transferts ont maintenant une dimension internationale.
L’évêque a toujours « le devoir de traiter tous ses prêtres en tant que père et frère ». Il doit ainsi mettre à leur disposition un programme de formation continue surtout pour les plus jeunes prêtres. Il est de son devoir en outre de soutenir et d’aimer chacun de ses prêtres, surtout quand l’un d’entre eux est accusé injustement d’un crime.
Dernier point abordé par le cardinal Levada concernant la lettre circulaire de 2011, la coopération avec les autorités civiles. Cette coopération « reconnaît la vérité fondamentale que l’abus sexuel sur mineurs est non seulement un crime aux yeux du droit canon, mais qu’il est aussi un crime qui viole les lois dans la plupart des juridictions civiles. » « L’Eglise a donc l’obligation de coopérer et de rapporter les crimes aux autorités compétentes.
Traduction de Radio Vatican